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Gob Squad's Kitchen: Étonnant!

J'ai vu hier soir quelque chose que je n'avais jamais vu auparavant, quelque chose d'étonnant, d'inclassable, de fascinant, d'hilarant, de superficiel, de profond, de bizarre aussi, quelque chose qui m'a fait une très forte impression et qui est, j'avoue, difficile à décrire.
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Courtoisie

J'ai vu hier soir quelque chose que je n'avais jamais vu auparavant, quelque chose d'étonnant, d'inclassable, de fascinant, d'hilarant, de superficiel, de profond, de bizarre aussi, quelque chose qui m'a fait une très forte impression et qui est, j'avoue, difficile à décrire.

Lorsqu'on entre dans la salle de L'Usine C, on passe sur un plateau de tournage où on est accueilli par les comédiens de Gob Squab. Parce qu'ils vont jouer derrière un écran que les spectateurs vont regarder et où sont projetées les diverses scènes de la reconstitution du film Kitchen tourné en 1965 par Andy Warhol. Warhol, le père du Pop-Art, a été aussi l'inventeur d'une forme de cinéma-vérité qui s'est révélée par la suite être l'ancêtre de la télé-réalité telle qu'on la connait aujourd'hui : des gens ordinaires sans talent remarquable qui sont filmés et qui en sont conscients et à qui on demande d'exposer leur intimité sur la place publique. Cela donne de nos jours Honey Boo-Boo, My strange addiction, Mon chat vient de l'enfer, Say yes to the dress, I'm having their baby, Storage wars, etc. (je pourrais continuer comme ça pendant des pages et des pages), confirmant aussi la célèbre phrase de Warhol à l'effet que In the future, everybody will be famous for 15 minutes. Quel visionnaire quand même...

Crédit photo : David Baltzer

Gob Squad est un collectif de créateurs allemands et britanniques qui créent en alliant la performance, le théâtre et les médias. Et la vie aussi. Le résultat est remarquable à tous les points de vue et nous interpelle à plusieurs niveaux quand ce ne serait que pour nous inspirer une réflexion sur la frontière qui sépare la fiction du réel. C'est expérimental, mais de la meilleure façon possible. C'est très drôle, mais il y a aussi des montées dramatiques qui nous laissent pantelants, le tout désamorcé par une bonne dose de cynisme. Kitchen se passe en 1965, une année de tous les dangers où tout le monde fumait et où il était impossible de boire un capucino. Et ces années soixante, déterminantes dans l'histoire de la civilisation occidentale, sont comme l'explique un comédien, la raison pour laquelle tout est arrivé par la suite.

Kitchen d'Andy Warhol se voulait le véhicule pour mettre en valeur le talent et la présence de la It Girl du moment, Edie Sedgwick, héritière d'une famille renommée de la Nouvelle-Angleterre, muse de l'inventeur du pop Art mais aussi personnage troublé qui est morte à 28 ans d'une overdose d'alcool et de médicaments. Sharon Magaret évoque dans Kitchen cette jeune femme déroutante avec ses cheveux platine, sa minirobe et son maquillage outrancier. Simon Will, Sean Patten et Sarah Thom constituent avec elle le noyau de cette performance qui nous réserve cependant bien des surprises pendant l'heure et demie que cela dure en faisant appel à des gens de la salle pour participer au spectacle. Avec des résultats étonnants.

Il ne se passe pas grand-chose comme histoire dans Kitchen : la banalité du propos est en soi fascinante et elle présuppose notre appétit pour la vacuité des Big brother et Occupation double de ce monde. Et c'est justement là l'intérêt de la chose: pourquoi sommes-nous là à regarder des gens poser des gestes du quotidien et pourquoi cela capte-t-il notre intérêt à ce point? Andy Warhol a, je crois, fait une percée dans la psyché humaine lorsqu'il a fait ce film. Au même titre qu'il a élevé au rang d'œuvre d'art la boîte de soupe Campbell et les tampons à récurer Brillo, il a tout à fait compris que le spectateur trouvait le réconfort et la réponse à ses névroses dans des gestes, des émotions et des objets familiers. Gob Squad nous le rappelle de brillante façon.

Gob Squad's Kitechen est présenté en anglais jusqu'au 15 février 2013 à l'Usine C.

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