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Madame Cloutier, nous ne parlons pas uniquement chiffons...

L'accès à une information de qualité et une présentation plus approfondie des enjeux de société est indispensable. Ce contenu de fond est complémentaire à du contenu plus léger, tels les sports, le divertissement ou les variétés. Toutefois, il ne faut pas qu'il y ait déséquilibre. Or, il semble bien que ce soit la tendance actuellement. Au Québec et ailleurs.
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Comme un certain nombre d'entre vous, j'étais, dimanche soir, devant mon téléviseur pour le retour de la grande messe dominicale : Tout le monde en parle. Rien de bien nouveau pour cette 10e saison, même concept, même duo d'animateurs, même plateau, même Manon-pèse-sur-le-piton, même rituel. Pour cette première émission, on a eu droit à une belle brochette d'invités, dont le ministre Bernard Drainville et Gérard Bouchard, l'un des signataires du rapport Bouchard-Taylor sur les accommodements raisonnables. De leur mini-échange sur le projet de charte, j'en aurais pris beaucoup plus. Mais que voulez-vous, les débats ou les grandes entrevues de fond, ça n'est plus tellement à la mode dans les médias. « Les gens décrochent au bout de 10 minutes », entend-on souvent.

Et puis, il fallait bien laisser un peu de place à une autre invitée, la surexposée femme d'affaires-animatrice-productrice, madame Véronique Cloutier. Entendons-nous bien, je n'ai rien contre madame Cloutier que je félicite (et que je jalouse peut-être) pour ses succès en tous genres qui reposent sans aucun doute sur son ardeur au travail et sur la collaboration d'équipes dévouées. En revanche, deux choses m'ont particulièrement agacée. En premier lieu, sa présence sur le plateau. Est-il sain de constater que Ici Radio-Canada télé, notre diffuseur public, offre à l'une de ses animatrices-vedettes un plateau d'argent pour vanter les mérites d'un produit et pour mousser ses ventes, alors que les profits n'iront certainement pas dans les poches des contribuables...?

Deuxième chose et, malheureusement, cela concerne encore madame Cloutier et son nouveau magazine Véro. D'où vient cette idée que les seuls sujets qui intéressent les femmes sont la mode, la beauté, la vie de famille, la cuisine, la santé et le bien-être ? Comment peut-on affirmer qu'un magazine représente la femme québécoise d'aujourd'hui ? Je ne suis pas d'accord. Personnellement, j'aime aussi la politique, les enjeux géopolitiques, la culture, les affaires. Je veux découvrir de nouveaux visages du Québec (place aux différentes communautés culturelles), apprendre et approfondir mes connaissances sur toutes sortes de sujets. En plus de me faire saliver devant le dernier rouge à lèvres Tom Ford, présentez-moi de grandes réalisations, parlez-moi de diplomatie et de politique internationale, proposez-moi des portraits d'hommes et de femmes admirables. Bref, ouvrez les horizons ! Ce qui me désole, c'est que le contenu des magazines féminins est conçu majoritairement par des femmes. Disons que l'on ne s'aide pas, mesdames. Pendant que nous continuons à discuter chiffons, les hommes brassent de vraies affaires...

Et puis, a-t-on suffisamment de place pour accueillir un nouveau magazine qui, somme toute, ressemble tant à ses concurrents ? C'est possible, mais ne soyons pas dupes. Ces « nouveautés » sont au centre d'une compétition féroce qui se joue entre des magnats des médias dans un marché aussi petit que celui du Québec. Tout comme Patricia Paquin est une marque qui rapporte au groupe Quebecor, Véronique Cloutier devient celle du groupe TC Média. Elles ne sont pas nos muses, mais bien celles de ces importants joueurs de la convergence médiatique.

Plus globalement, doit-on s'inquiéter d'une homogénéisation des contenus médiatiques ? Est-ce qu'elle peut nuire à la qualité des contenus ? Je crois bien que oui. Remarquez comme l'information est à peine livrée que l'on passe déjà à autre chose. Il y a aussi ces fameux réseaux sociaux sur lesquels on peut apprendre la nouvelle à la minute même. Ajoutons que ceux-ci, surestimés par les médias traditionnels qui leur font la part belle, donnent aussi naissance à ce qu'on appelle des «influenceurs» dont la belle parole - payée parfois à prix d'or - peut avoir un véritable impact dans les médias. Une sorte de propagande principalement consumériste, devenue outil de relations publiques pour bon nombre d'entreprises. De plus en plus difficile de trancher entre le vrai et le faux.

J'ajouterais une certaine mainmise d'un groupuscule d'animateurs-journalistes-chroniqueurs sur l'opinion publique. On les retrouve dans les pages de nos journaux, sur des blogues et à la radio. Qu'il s'agisse, par exemple, des montées de lait d'un Mathieu Bock-Côté, blogueur, chroniqueur au Journal de Montréal, invité régulier sur les ondes de Radio-Canada, ou du journaliste à La Presse Vincent Marissal, qui intervient parfois également sur les ondes de la SRC et sur le plateau de Bazzo.Tv à Télé-Québec (et maintenant chroniqueur dans le nouveau magazine Véro).

Quoique leurs interventions puissent être fort intéressantes, il n'en reste pas moins qu'elles sont le reflet de leurs propres interprétations de l'actualité. Pour ma part, je souhaiterais avoir également accès à des spécialistes, des intellectuels, des créateurs ou des experts (notamment de l'actualité internationale à laquelle on prête si peu d'intérêt) qui, de par leurs présentations et leurs connaissances, me donneront les clés pour me permettre de construire ma propre opinion.

À mon humble avis, l'accès à une information de qualité et une présentation plus approfondie des enjeux de société et politiques est indispensable. Ce contenu de fond est sans aucun doute complémentaire à du contenu plus léger, tels les sports, le divertissement ou les variétés. Toutefois, il ne faut pas qu'il y ait déséquilibre. Or, il semble bien que c'est la tendance actuellement. Au Québec et ailleurs.

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