Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.
J'ai senti le besoin de t'écrire au courant des derniers jours parce que, après tout, c'est en se parlant qu'on se comprend. Comme tu le vois dans les médias, leset lesqu'on qualifie de «Québécois(es) de souche» parlent beaucoup de toi, ces temps-ci. Trop souvent sans te demander ton avis, je le sais.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Hey, salut à toi, nouvel arrivant.

Je t'avertis d'avance, ça va sortir comme ça vient. Assieds-toi, faut qu'on se jase.

J'ai senti le besoin de t'écrire au courant des derniers jours parce que, après tout, c'est en se parlant qu'on se comprend. Comme tu le vois dans les médias, les ceuzes et les ceuzesses qu'on qualifie de «Québécois(es) de souche» parlent beaucoup de toi, ces temps-ci. Trop souvent sans te demander ton avis, je le sais.

On jase surtout de ce que tu portes comme vêtements. Ou des symboles que tu as dans le cou pour montrer ta foi en un Dieu qui est le tien. Pis on mélange tout, comme d'habitude: tes coutumes, ta nationalité, ta religion: tout est dans le même panier. Ça doit t'être un peu inconfortable d'être épié ainsi.

Tu sais, y'a pas si longtemps - à peine quelques siècles -, on passait par le même processus. C'est juste qu'au lieu d'essayer de nous inclure dans la nation qui était déjà là, on a eu le culot de les tasser, parfois en utilisant les plus atroces manières de le faire. Ben oui: même si on fait nos bien-pensants ces jours-ci, on a oublié qu'on a un jour été les pires rapaces auxquels on pourrait penser. On a pillé, volé, violé, tué. Mais bon, on a fini par se pardonner. Un peu, en tous cas.

L'ennui, c'est qu'on a jamais trouvé la manière de devenir adulte en le faisant. Ben oui, on est encore des adolescents, au Québec. De très talentueux adolescents qui ne connaissent pas encore l'étendue de leur potentiel, certes. Mais on fait les Tanguy au sein d'une nation qui n'est pas la nôtre même si, au fond, on sait qu'on serait mieux gérés par nous-mêmes.

Et tu sais comment c'est, un adolescent: ça se cherche, ça change d'idée souvent, ça a des sautes d'humeur. Ça installe une affiche «Keep out!» sur sa porte de chambre, ça se met des écouteurs sur les oreilles et ça écoute de la musique trop fort.

Mais il y a de l'espoir, cher nouvel-arrivant. Tu sais, ça ne fait pas très longtemps qu'on a découvert qu'on a le droit d'exister. Pis on ne sait pas trop quoi faire avec ça ou comment le faire. Alors quand on te dit «retourne dans ton pays si t'es pas content», ne le prends pas mal. C'est parce qu'on est jaloux du fait que tu en as un, toi, de pays.

En somme, je te lance une invitation. Parce que ce sera pas long, je te le dis: on va se défâcher de notre petite crise existentielle et on va te sacrer patience. Je t'invite à faire partie d'une collectivité qui a beaucoup à offrir, mais qui sait pas encore par quel bout pogner ça. Peut-être que tu le sais, toi? Voudrais-tu nous montrer comment on fait par chez vous? Qui sait, peut-être est-ce la bonne manière pour nous aussi.

Je t'invite aussi à ne pas trop porter attention à ceux et celles qui te jugent d'un rien donné par ce que tu portes, ou par ce en quoi tu crois. Je te le dis, aujourd'hui: tu as le droit de croire comme nous, au Québec, on a choisi de ne pas croire en grand nombre. T'as même le droit de le montrer. En fait, s'il te plaît, montre-nous le. Question qu'on s'ouvre un peu sur le monde.

Ça fait à peine 50 ans qu'on va à l'école, nouvel arrivant. On a beaucoup de rattrapage à faire. Pis tu vois? Ça nous a juste pris 50 ans pour qu'on prenne un peu notre place dans le monde. Pis après tout, c'est peut-être parce que c'est la religion qui nous empêchait d'apprendre, comme il se doit qu'on a peur.

Le grand mot, hein? «Peur». Mais c'est ça qui se passe, présentement. On a peur. Parce qu'on ne te connaît pas encore assez. Aide-nous donc à faire un bout de chemin.

J'suis certain qu'on a beaucoup en commun. Il faut juste apprendre à se parler.

Pour l'instant, entre. C'est notre maison, on l'a bâtie du mieux qu'on a pu avec les connaissances qu'on avait. Bienvenue chez moi, bienvenue chez toi.

Pis regarde pas le ménage, maudit j'suis gêné...

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Retrouvez les articles du HuffPost sur notre page Facebook.
Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.