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Mamans: soyez vous-même!

Je n'ai franchement rien à foutre de votre opinion sur mes trois césariennes, sur ce que je donne à manger à mes enfants (oui certains d'entre eux n'ont pas été allaités!) ou la façon dont ils dorment. Cela ne vous regarde tout simplement pas.
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Il y a de ça bien longtemps, la toute première fois que j'ai laissé mon petit Finn, qui avait 2 ans à l'époque, à la garderie, il m'a immédiatement tourné le dos, fasciné par les trains et les voitures avec lesquels il allait pouvoir jouer. Je suis restée un certain temps, discrète, puisque je ne connaissais aucune autre mère qui se trouvait sur place, puis je me suis dirigée vers ma voiture, et dès que j'ai quitté le stationnement, je me suis mise à pleurer. Je ne voulais pas être "cette maman", celle qui pleure lorsqu'elle laisse son enfant de 2 ans à la garderie, même si ce n'était que pour une heure. Je ne comprends toujours pas pourquoi je me sentais honteuse d'avoir été émotive de le laisser à la garderie, mais je l'étais et il n'était pas question qu'on s'en rende compte.

Le même scénario s'est reproduit à quelques reprises, et des situations similaires ont commencé à se manifester dans d'autres situations. Une de ces fois s"est produite alors que nous étions en vacances, Finn avait alors environ un an. Sa grand-tante lui a offert des raisins, entiers. J'étais convaincu que des raisins entiers à son âge n'étaient pas la meilleure des idées, J'ai attrapé les raisins et me suis dirigée vers la cuisine tout en expliquant qu'il était encore petit pour qu'on lui offre des raisins entiers, encore moins un plat complet de ces derniers simplement mis à sa portée, tout en essayant de ne pas avoir l'air d'être une mère poule. Sa grand-tante a fini par acquiescer, à contrecoeur, et cet après-midi-là, j'ai officiellement été affublée de l'étiquette de mère poule, même si je crois que j'avais, malgré tout, parfaitement raison. Mais le fait d'avoir raison ne m'a pas empêchée d'être un peu blessée, de sentir que ma confiance était légèrement ébranlée. Étais-je trop stricte? Peut-être que je devrais me laisser aller un peu?

Ce qui rend le travail de parent si complexe, c'est qu'il y a une infinité de façons d'éduquer ses enfants, chacun étant différent. Il y a des différences culturelles, il y a l'impact de la façon dont on a nous-mêmes été éduqués, voire l'impact de l'endroit où nous avons été éduqués. Et, bien entendu, il y a la question de nos connaissances et de notre expérience. Soyons honnêtes: pour une maman dont c'est la première expérience, il y a une pléthore de choses que vous ne savez pas qui paraissent évidentes pour une maman qui a des enfants plus vieux. Et je ne dis pas ça pour dénigrer les nouvelles mamans; c'est simplement un fait. Cependant, dans cette ère de connaissances instantanées et d'hyper conscientisation sur l'éducation des enfants, certaines idées et méthodes d'éducation peuvent paraître quasi archaïques. Prenez la grand-tante de Finn. Elle donnait probablement des raisins entiers à ses enfants, et ceux-ci se baladaient probablement en voiture sans ceinture de sécurité. Avaient-ils "tort"? Pas vraiment. Les parents de cette époque éduquaient leurs enfants de la meilleure façon qu'ils le pouvaient avec les connaissances de l'époque, et même si nous avons de nouvelles connaissances aujourd'hui, cela ne signifie pas qu'ils avaient pour autant tort. Donc, en plus du reste, nous devons naviguer le champ de mines générationnel.

Lorsque je suis devenue maman pour la première fois, il y avait tant de choses que j'ignorais: quels biberons utiliser, quelle était la meilleure pompe d'allaitement, comment bien emmailloter mon bébé, quand introduire les aliments solides, et j'en passe. J'étais inquiète en permanence. Je m'inquiétais de savoir si Finn avait trop chaud, mais constamment, à toutes les nuits. Je m'inquiétais de savoir s'il était habillé assez chaudement, trop chaudement. Je vivais dans une crainte permanente du syndrome de mort subite du nourrisson. Je passais mon temps à aller vérifier en personne si tout allait bien et s'il respirait encore, et ce, même si nous avions un moniteur vidéo pour veiller sur lui. Ça m'obsédait, littéralement. Puis, pour notre fils Jack, tout ça a changé. Nous n'avons même pas installé de moniteur et il dort même avec une couette, ce que je n'aurais jamais osé faire avec Finn. Est-ce qu'il y a une des deux façons de faire qui est "bonne"? Elles le sont toutes les deux, ne serait-ce que parce que je suis confortable avec le fait de faire les deux à la fois. Et toc!

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Le corps d'une mère

Il n'y a pas si longtemps, nous étions dans l'aire de jeu d'un parc, et j'ai remarqué un étrange comportement dont je faisais preuve. Jack s'amusait à coeur joie dans un module conçu pour les enfants de son âge, pas très haut et à peu près dénué de danger potentiel. Je me suis assise sur un banc, et j'ai consulté mes email, car j'attendais un email important du boulot. Je n'ai pas regardé dans sa direction pendant plusieurs minutes. Voyez-vous, je tiens à ce qu'il explore, qu'il se sente autonome, que je ne sois pas constamment à ses côtés, les bras tendus pour l'attraper en cas de chute. À la limite, je veux qu'il tombe, pour apprendre à se relever et à essayer de nouveau, ou pas. C'est son choix. C'est ainsi qu'il apprendra à ne pas refaire le geste qui a causé sa chute. Il doit apprendre à prendre ces petites décisions par lui-même. Mais malgré cela, je me suis levée de nombreuses reprises pour aller le voir parce que je sentais que c'était ce qu'on attendait de moi. Nous étions dans une aire de jeu et je devais veiller sur lui, de peur que les autres mères me jugent. J'avais peur qu'elles se disent "Qui est cette mère indigne qui laisse son enfant courir un peu partout?" Pourquoi me sentais-je ainsi? Parce que j'avais déjà été cette mère, je m'étais déjà posé cette même question au sujet d'une autre mère. J'ai déjà été cette mère qui juge, malgré moi. Mais je ne voulais plus être cette mère et, cette fois-là, j'ai changé d'avis, et je ne me suis plus levée pour aller veiller sur Jack. J'ai même porté mon regard sur mon smartphone une fois de plus, et sans remords. Si les autres mères ont eu l'impression que j'étais une mère négligente, ainsi soit-il. C'est ainsi que j'éduque Jack, un point c'est tout. Je suis une mère non-interventionniste, si vous ressentez le besoin de m'accoler une étiquette. Voilà. C'est dit.

Mais alors, pourquoi nous livrons-nous à ce genre d'éducation comparative? Je crois que c'est dû, en partie, au fait que ça nous permet de justifier nos choix -- "Elle n'allaite pas, elle non plus, alors je ne suis pas la seule". Cela conforte nos choix, ces jugements renforcent notre niveau de compétence. Il vous arrive peut-être de voir une maman qui donne des frites à son enfant (ce que j'ai moi-même fait à de nombreuses reprises), et vous la jugez. Vous ressentez probablement de la fierté parce que vous ne donnez pas de frites à vos enfants, uniquement de la nourriture bio. Grand bien vous fasse! Vous avez fait ce choix, mais est-ce que cela vous permet de juger les autres? Vous avez une amie qui est une adepte du co-dodo et vous trouvez cela complètement fou, et vous êtes très heureuse de faire dormir vos enfants chacun dans sa chambre et son propre lit. Pourquoi pas? Les deux se valent.

Regardez la façon dont nous jugeons les mamans célèbres. Oh! mon Dieu! Suri Cruise boit encore au biberon! La fille de Brad Pitt utilise encore une tottote! (Remarquez, au moment d'écrire ces lignes, je crois que ce n'est plus le cas). Posh Spice a eu quatre césariennes! Oh! Mon! DIEU! Mais vraiment, qu'est-ce que ça peut bien changer? Ah! mais évidemment, c'est important parce que ça nous permet de les regarder de haut en tant que parents. "Angelina a donné des Cheetos à ses enfants! C'est révoltant!", s'exclame cette maman alors qu'elle tend des craquelins bio au cheddar vieilli à son enfant.

Je n'ai franchement rien à foutre (je répète: RIEN. À. FOUTRE.) de votre opinion sur mes trois césariennes, sur ce que je donne à manger à mes enfants (oui certains d'entre eux n'ont pas été allaités!) ou la façon dont ils dorment. Cela ne vous regarde tout simplement pas. Vous êtes contre les césariennes? Eh! bien, accouchez de façon naturelle! Vous êtes contre les préparations lactées? Eh! bien, allaitez vos enfants! Mais gardez-vous de me juger et de juger mes enfants. Ça n'apporte rien à personne, sinon de l'insécurité. Nous avons tous accès à la même information, et nous prenons tous nos propres décisions. Il n'y a aucune nécessité d'"éduquer" les autres parents sur le bienfondé de vos choix personnels. Aucune. Nécessité. Oh! et toi, la maman qui m'a dit un jour que je ne savais pas ce que c'était d'accoucher parce que j'avais eu des césariennes: je t'emmerde. Mais tu sais quoi? Je suis sincèrement heureuse pour toi que tu aies choisi les couches de coton et que ton allaitement se soit bien passé! Sincèrement! C'est même très chouette que tu partages ton expérience avec les autres mères. Elles aussi doivent apprendre que le fait que tu partages tes expériences avec elles ne signifie pas pour autant qu'elles doivent se sentir jugées.

Ma suggestion? Mettre l'emphase sur nos propres enfants plutôt que sur les autres mamans. Est-ce que vos enfants sont heureux et en bonne santé même s'ils mangent des frites et que vous faites du co-dodo? Génial! Sont-ils heureux même s'ils boivent du lait en poudre et qu'ils sont végétaliens? Fantastique! Soyez la maman que vous avez envie d'être, mais ne soyez surtout pas la maman qui juge les autres mamans afin de se sentir mieux au sujet de sa propre "mamantitude". C'est votre choix de mettre des photos de vos enfants sur Facebook ou de ne pas le faire pour des raisons de préservation de votre vie privée. C'est tout à fait acceptable de suivre votre fil Instagram pendant que vos enfants s'amusent au parc, tout comme c'est parfaitement acceptable de vouloir être complètement déconnectée pendant ce temps privilégié. Et avant de clamer haut et fort que vous ne jugez pas les autres, prenez un peu de recul. Vous constaterez que nous l'avons toutes fait et que le monde se porterait beaucoup mieux si nous faisions un effort pour le faire moins.

À ce chapitre, je commence vraiment à en avoir ras le pompon des blogs tenus par des mamans qui font tout pour nous faire sentir comme les pires mamans du monde. Un de leurs chevaux de bataille, par les temps qui courent, c'est de s'en prendre aux mamans qui consultent leurs téléphones pendant qu'elles sont avec leurs enfants parce que la petite merveille, pendant ce bref instant, va peut-être accomplir quelque chose de quasi miraculeux dont cette mère indigne ne sera pas témoin par sa propre faute. Allez vous faire voir. Que dire de ces blogs qui considèrent les parents qui partagent des photos de leurs enfants sur les réseaux sociaux comme des parents-impresarii de la pire espèce (chose dont je suis, de toute évidence, coupable)? Allez vous faire voir, vous aussi! Je suis une adulte responsable et je fais mes propres choix au sujet de la façon dont j'éduque mes enfants, et cela me valorise encore plus. Je fais mes trucs, vous faites les vôtres, et je vous promets de ne jamais vous juger ou vous faire sentir coupable pour vos choix. Et si par malheur cela devait se produire, n'hésitez surtout pas à me le laisser savoir!

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