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Les revenus de retraite des Québécois évolueront considérablement d'ici 2030

Si les retraités québécois des 20 prochaines années toucheront des revenus de retraite significativement plus élevés que les retraités actuels, et qu'ils auront ainsi individuellement moins besoin de l'aide de l'État pour soutenir leur niveau de vie, les forces opposées du vieillissement démographique l'emporteront : les prestations du RRQ et de la SV doubleront au cours des 20 prochaines années, alors que le PIB et les revenus de l'État croîtront d'à peine 25 %.
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Ce billet a aussi été publié sur Libres Échanges, le blogue des économistes québécois.

L'évolution des sources futures de revenu de retraite suscite un certain nombre de préoccupations à la fois privées et sociales. En premier lieu, des questions importantes se posent sur l'impact de l'instabilité, du sous-financement et de l'évolution structurelle des régimes privés de pension (évolution manifestée entre autres par le changement dans la part des régimes à prestations déterminées vs ceux à cotisations déterminées) sur le niveau de vie des retraités actuels et futurs.

En deuxième lieu, des inquiétudes sont régulièrement formulées à l'égard de la capacité future des régimes assuranciels et assistantiels publics à fournir aux retraités des prestations suffisantes pour éviter des chutes trop importantes de revenu lors de la retraite.

En troisième lieu, on peut légitimement se préoccuper de l'impact des changements démographiques, et en particulier du vieillissement de la population, sur la croissance, les finances publiques ainsi que sur la capacité des gouvernements à combattre la pauvreté et l'inégalité. Ces préoccupations sont d'autant plus pertinentes que la part de la population âgée dans la population totale est appelée à croître rapidement au cours des prochaines années.

En dernier lieu, l'évolution du portrait socio-économique des Québécois plus âgés au cours des 20 prochaines années est tributaire de l'évolution des salaires et de l'épargne des cohortes de travailleurs encore trop jeunes pour être en ce moment à la retraite.

Une récente étude utilise des méthodes de microsimulation dynamique (appartenant au programme de recherche SIMUL) pour traiter de ces questions. Ces méthodes, qui reposent sur un large échantillon représentatif d'individus et de ménages provenant d'enquêtes rétrospectives et longitudinales, permettent de projeter le Québec jusqu'en 2030 à l'aide de probabilités de transition de statut démographique, social et économique.

Les phénomènes démographiques et économiques principaux (mortalité, immigration, émigration, formation et dissolution des familles, départ du foyer familial, scolarité, revenu d'emploi, participation au marché du travail et épargne) y sont modélisés de manière conjointe et séquentielle, en tenant compte de la richesse des informations micro-économiques disponibles. Des données prospectives sur la composition future de la population (p. ex., prévisions démographiques de l'Institut de la Statistique du Québec (ISQ)) sont également employées dans le but de calibrer les résultats du modèle aux prévisions officielles.

Les prévisions de SIMUL mettent ainsi en lumière l'impact de l'évolution sociodémographique anticipée sur la situation économique des retraités québécois. En particulier, on observe une croissance importante du niveau d'éducation de la population du Québec, ce qui fera en sorte que les prochains retraités seront significativement plus éduqués que les retraités actuels.

Comme les individus plus éduqués ont tendance à bénéficier de revenus de travail plus importants, et que ces revenus de travail plus importants mènent à de l'épargne-retraite plus élevée, il est à prévoir une augmentation significative des revenus réels et de l'épargne des retraités dans le temps.

L'on peut aussi anticiper que le taux de croissance annuel des revenus provenant de pensions privées ainsi que des prestations de la Régie des rentes du Québec (RRQ) se maintiendra entre 1 % et 4% de 2010 à 2030 (selon les années). Ces augmentations seront causées à la fois par l'augmentation du niveau d'éducation des générations plus jeunes de travailleurs et par les effets de cohortes, les cohortes plus récentes de travailleurs bénéficiant d'une productivité des facteurs plus élevée que celle observée pour les générations antérieures.

Le niveau de prestations du RRQ sera aussi haussé par l'augmentation de la proportion des femmes admissibles à ces prestations. Cette augmentation provient naturellement de la croissance importante de la participation des femmes au marché du travail depuis quelques décennies. Cette participation féminine plus importante est aussi explicable par le niveau croissant d'éducation des femmes à travers le temps. Cela donne lieu non seulement à des revenus féminins de travail plus élevés, mais aussi à des revenus de retraite également plus élevés pour les femmes âgées.

L'évolution de ces revenus privés de retraite aura une incidence substantielle sur certains aspects des finances publiques. Bien que les revenus de l'État subiront des pressions à la baisse substantielles en raison du vieillissement de la population, certaines dépenses en transferts sociaux seront allégées par l'effet de l'augmentation des revenus de travail et de l'épargne. Ainsi, l'augmentation globale des revenus privés de retraite diminuera fortement la proportion des individus éligibles aux prestations de Supplément de revenu garanti (SRG). On prévoit que cette proportion passera de 35,7 % en 2010 à 22,5 % en 2030. Combiné à l'effet du vieillissement, cela fera en sorte que les prestations de SRG diminueront légèrement, puis se stabiliseront autour de 1,6 milliard à partir de 2013.

L'effet combiné des changements démographiques et économiques laisse toutefois entrevoir que d'autres dépenses publiques liées aux régimes publics de retraite augmenteront fortement dans les prochaines années. Les prestations du RRQ passeront d'environ 8 milliards à 18 milliards durant la même période. Le coût total des prestations de Sécurité de la vieillesse (SV) pour le Québec seulement passera d'environ 6 milliards de dollars en 2010 à environ 11 milliards de dollars en 2030 (en dollars constants de 2004).

En somme, quoique les retraités québécois des 20 prochaines années toucheront des revenus de retraite significativement plus élevés que les retraités actuels, et qu'ils auront ainsi individuellement moins besoin de l'aide de l'État pour soutenir leur niveau de vie, les forces opposées du vieillissement démographique l'emporteront : les prestations du RRQ et de la SV doubleront au cours des 20 prochaines années, alors que le PIB et les revenus de l'État croîtront d'à peine 25 %.

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