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Pont Champlain: notre dépendance au régime canadien nous coûte

Dans ce dossier, le régime canadien, quel que soit le parti qui sera au gouvernement après le 19 octobre, est un frein structurel au développement du Québec.
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Le dossier du pont Champlain n'a pas fini de défrayer les manchettes. Au-delà de l'arrogance du gouvernement canadien actuel, à contre-sens des consensus du Québec, le régime canadien s'avère encore une fois dysfonctionnel et il nous coûte très cher. Ce type de situation est habituel au sein de ce que René Lévesque a déjà qualifié de «régime de fou», un régime qui laisse à notre État national peu de moyens en matière de transports.

Il y a des ponts gérés par Québec et des ponts gérés par Ottawa. Ottawa s'entête à installer un péage sur le pont Champlain et laisse même entendre qu'il pourrait le faire aussi sur les ponts Jacques-Cartier et Mercier, qu'il gère également, et ce, malgré deux résolutions unanimes de tous les partis représentés à l'Assemblée nationale (2 juin et 2 octobre 2014), malgré l'opposition de tous les organismes de la grande région de Montréal. Il faut combattre cette mesure avec vigueur.

L'attitude du gouvernement conservateur actuel est d'une arrogance consommée qui n'a d'égale que celle des gouvernements précédents, libéraux comme conservateurs. Le pont coûtera aux contribuables près de 5 milliards de dollars: des coûts gonflés parce le pont doit être surélevé de 40 mètres (ce qui le rallongera de 1,3 kilomètre) pour enjamber la voie maritime du Saint-Laurent, voie maritime qui a déplacé une partie de l'activité économique à Montréal, surtout autour du canal de Lachine, vers Toronto et les Grands Lacs. Il n'est donc que juste que tous les Canadiens partagent les coûts du nouveau pont.

Dans un Québec indépendant, nous pourrons financer les travaux de gestion du pont par des redevances qui seront versées au Québec pour l'usage de la voie maritime du Saint-Laurent.

Actuellement la partie «canadienne» est gérée par un organisme mandaté par le gouvernement canadien (la CGVMSL) qui y impose des droits de péages qui profitent très peu au Québec. Les revenus perçus sont passés de 8,3 millions de dollars en 1959 à 70,2 millions en 2012.

La consultation populaire, la transparence et les coûts

D'ici l'indépendance, il faut se préoccuper des coûts du projet, de ses impacts environnementaux et de la nécessaire consultation des personnes qui vivent aux abords de ce gigantesque chantier et qui en subiront les effets pendant longtemps. La maîtrise d'œuvre du projet a été confiée au consortium SSS (Signature sur le Saint-Laurent), essentiellement formé de partenaires de la firme d'ingénierie SNC-Lavalin. On a appris que près de la moitié des coûts (totalisant 2 milliards de dollars) allait servir à la gestion du pont par ce mandataire privé. Combien iront aux profits et comment sera assuré le contrôle des coûts? Il s'agit d'un mode de gestion en partenariat privé-public (PPP) qui a laissé de mauvais souvenirs par le passé. Nous n'avons qu'à penser à la construction des hôpitaux de Montréal.

La répartition des coûts et des revenus demandera à être analysée de très près pour nous assurer que les contribuables y trouvent leur compte, que le gonflement des coûts soit évité, et surtout que la responsabilité (et les coûts) du bon déroulement du projet avant, pendant et après (sécurité, ajustements post-construction, gestion du trafic et des alternatives de transport, etc.) incombent aux bonnes instances. C'est le rôle des élus à Ottawa de surveiller ces étapes de près; on ne les a pourtant pas entendus sur le sujet.

L'environnement et le transport en commun

Les travaux pour la réalisation du pont Champlain et des voies d'accès auront d'importants impacts environnementaux. Il faut notamment protéger l'eau potable de Montréal de toute contamination pouvant émaner du chantier du pont et des travaux sur l'autoroute 15. Pour être acheminée jusqu'à l'usine Atwater, l'eau brute doit emprunter un canal à ciel ouvert, celui de l'Aqueduc, en plein cœur de la circonscription de LaSalle--Émard--Verdun. Les risques de contamination de l'eau sont élevés. Pour sécuriser l'approvisionnement de l'usine Atwater, qui traite 42% de l'eau potable de l'île, Montréal devra procéder à des travaux qui coûteront 78 millions de dollars à la Ville de Montréal. Actuellement Ottawa et Québec se renvoient la balle.

Tant qu'Ottawa a la responsabilité du pont Champlain, c'est à lui d'assumer ces coûts rapidement, car ces travaux d'envergure sont requis avant le début des travaux sur l'autoroute 15.

Par ailleurs, le pont doit accueillir un monorail ou un système léger sur rail (SLR), une alternative au transport automobile, entre la rive-sud et le sud-ouest de Montréal. Cette mesure est nécessaire pour répondre aux impératifs de protection du climat. Une fois le nouveau pont Champlain livré, l'implantation d'un SLR prendrait quatre ans à voir le jour. Chaque jour d'indécision reporte d'autant le projet.

Le gouvernement canadien investit six fois moins que Québec dans de tels projets, et il est grand temps qu'il «fasse sa part», notamment sur et autour du pont Champlain. Il existe des fonds d'infrastructures dits «au mérite», attribués par le gouvernement fédéral sur une base purement discrétionnaire, sans critères stricts. Entre 2007 et 2014, nous n'avons reçu que 8%. Au prorata de la population, le Québec devrait minimalement pouvoir bénéficier de sa juste part, c'est-à-dire 903 millions de dollars, une somme actuellement disponible dans les coffres de l'État fédéral et dont nous aurions besoin, notamment pour le transport et l'environnement, en lien avec le projet du pont Champlain.

En somme, dans ce dossier, le régime canadien, quel que soit le parti qui sera au gouvernement après le 19 octobre, est un frein structurel au développement du Québec. Cela nous coûte très cher en terme de délais, de coûts et de développement vers une économie du XXIème siècle. Un développement que le Québec, devenant seul responsable du transport sur tout le territoire du Québec, pourra tellement mieux assumer par lui-même et pour lui-même.

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