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Docteur Barrette: utiliser les statistiques en les interprétant

Le ministre Barrette profite de la commission parlementaire sur le projet de loi 20 pour continuer à insister sur le manque de productivité des médecins omnipraticiens.
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Le ministre Barrette profite de la commission parlementaire sur le projet de loi 20 pour continuer à insister sur le manque de productivité des médecins omnipraticiens. Il a même fourni dans La Presse du 17 mars 2015 (section Débats : «Adapter la pratique aux besoins») des statistiques pour expliquer son argumentaire.

Or, en s'appuyant sur des moyennes comme celle fournie par la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) stipulant que la charge moyenne normale d'un médecin est de 18 patients par jour, le ministre en arrive à extrapoler que nos médecins pourraient accueillir 31,5 millions de visites par année, alors que les statistiques de la RAMQ indiquent que les Québécois en effectuent 27,5 millions par année.

Le ministre préconiserait plutôt l'atteinte d'une moyenne de 20 visites quotidiennes. Cette utilisation de moyennes montre sa faiblesse parce qu'elle ne tient pas compte de la réalité du milieu de la santé. Certains cas sont relativement simples, d'autres, des cas lourds demandant une attention particulière et du temps pour comprendre parfaitement la situation avant de prononcer un diagnostique et de recommander des solutions. Donc, ces derniers cas influencent la moyenne vers le bas. Et avec une population vieillissante comme la nôtre, ils sont nombreux à réduire la moyenne de productivité sur la base du nombre de patients rencontrés par jour.

De plus, l'utilisation de ces moyennes cache une autre réalité de notre corps médical dont les politiciens se gardent de parler pour demeurer politiquement corrects. La gent féminine a envahi la médecine au cours des dernières décennies et cette situation perdure. Il y a beaucoup d'avantages pour les patients parce que les femmes médecins sont en général plus empathiques que les hommes ou tout au moins le font voir. En conséquence, elles vont être très à l'écoute du patient. Cependant, ces jeunes femmes qui ont choisi la médecine sortent des universités à un âge où elles veulent aussi fonder une famille, ce qui est légitime. Elles contribuent probablement d'ailleurs à mieux faire comprendre à la société en général le concept de conciliation travail-famille. Mais en contrepartie, elles se retirent du marché du travail à différentes occasions pour vivre leur grossesse, leur accouchement et leur maternité. De plus, lorsqu'elles reviennent à la pratique de la médecine, plusieurs ne reviennent qu'à temps partiel.

L'utilisation de moyennes pour calculer la productivité actuelle et souhaitée de nos médecins est influencée par ces travailleuses à temps partiel. Il serait donc utile de lire entre les lignes et de faire des calculs réalistes quant au nombre de médecins pratiquant à temps plein et de calculer le nombre de médecins équivalents à temps plein qui ne travaillent qu'à temps partiel pour faire des projections réalistes quant au nombre de visites que pourraient accueillir nos médecins de famille.

De là, il serait possible de mieux évaluer la nature du manque d'accessibilité des médecins. Est-ce que les patients n'ont pas tous accès à un médecin de famille parce que le nombre d'heures des médecins disponibles ne correspond pas aux besoins, ou est-ce vraiment un problème de productivité?

Dans le premier cas, il faudrait possiblement se tourner vers les Universités qui continuent à appliquer des critères de sélection très rigoureux basés sur les notes au dossier scolaire des candidats admis. Or, tous admettent que les filles sont plus studieuses que les gars qui, autour de la vingtaine aiment bien vivre leur vie de jeunes adultes et ne consacrent possiblement pas autant d'énergies que les filles à leur dossier scolaire, sauf peut-être pour les candidats vietnamiens. Le nombre de médecins portant le nom Nguyen dépasse, semble-t-il, le nombre de Tremblay au registre de l'Ordre des médecins du Québec. Nous pouvons nous en réjouir parce qu'en général, ils sont très dévoués à leurs patients et très dédiés à leur profession.

Mais en maintenant leurs normes d'admissibilité actuelles, en se basant sur les notes obtenues avant leur entrée à l'Université, les facultés de médecine nous privent-elles de bons médecins qui travailleraient à temps plein et augmenteraient les statistiques de productivité si chères au ministre Barrette? Comme vous tous, je ne voudrais pas être soigné par un médecin admis et diplômé avec des notes tout juste passables. Cependant, il y a possiblement une marge de manœuvre entre des notes excellentes et passables.

De toute façon, les professeurs d'université auraient le loisir de faire travailler plus fort ceux qui se traineraient les pieds et ne mériteraient pas de réussir leurs études et de prononcer le serment d'Hippocrate. Aussi, une fois sur le marché du travail, si un médecin médiocre s'était faufilé au travers des mailles du système scolaire, les patients auraient vite la réaction de le détecter et de le mettre de côté si sa vocation n'était justifiée que par le revenu potentiel de sa profession.

Statistiquement vôtre et en tout respect, je le répète, pour la gent féminine qui compose notre corps médical, je propose cette avenue de solution au ministre Barrette.

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