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Campagne électorale: le PQ est en retard d'une guerre

On dit des militaires qu'ils font souvent l'erreur de se préparer à livrer la dernière guerre. Ils oublient les nouvelles conditions qui apparaissent et s'aperçoivent trop tard que leurs plans sont désuets quand le nouveau conflit arrive. C'est ce qui se produit actuellement au Parti québécois.
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On dit des militaires qu'ils font souvent l'erreur de se préparer à livrer la dernière guerre. Ils oublient les nouvelles conditions qui apparaissent et s'aperçoivent trop tard que leurs plans sont désuets quand le nouveau conflit arrive. C'est ce qui se produit actuellement au Parti québécois.

Après avoir atteint des sommets il y a un peu plus d'un an, l'engouement pour le parti de François Legault avait beaucoup diminué. La CAQ peinait à définir son agenda, une confusion incarnée entre autres par le fameux « on verra » de son chef. Le PQ avait clairement repris la tête dans les intentions de vote. Même après avoir appuyé les grévistes durant le conflit étudiant, le PQ restait au coude-à-coude avec le PLQ et sa confortable avance chez les francophones assurait son élection. Les premiers jours de la campagne ont bouleversé ce scénario.

Que s'est-il passé? Les caquistes ont d'abord recruté plusieurs candidats crédibles capables d'inspirer confiance et de les présenter désormais comme une alternative crédible aux libéraux. Le PQ n'est plus le seul à afficher une bonne équipe, la CAQ l'a surpassé à ce jeu en recrutant Jacques Duchesneau. Paré d'une aura d'incorruptible, l'ancien chef de police vient de ravir d'un coup sec aux péquistes un des enjeux importants de cette campagne, celui de l'intégrité.

Qu'en est-il de l'autre thème qui domine cette campagne jusqu'à présent, la grève étudiante? François Legault demeure un opposant ferme à la grève, il a même promis qu'il sévirait contre les professeurs qui se joindraient aux grévistes lors de la rentrée scolaire. Son message, cohérent et limpide, est en phase avec l'opinion majoritaire qui, selon presque tous les sondages, situe à 60% l'appui des Québécois à la hausse des droits de scolarité.

Sur cette question le PQ est en porte-à-faux avec la majorité. Marois a plutôt pris fait et cause pour la grève dès le début, aimantée par l'aile gauche de son parti. Ayant visiblement constaté que son flirt avec un mouvement minoritaire n'est pas rentable électoralement, elle tente depuis le début de l'été de rétropédaler. Elle a enlevé son carré rouge et invite maintenant les étudiants à rentrer en classe et à faire une trêve. Dans le but apparent de grappiller des votes du côté des 60% opposés à la grève, elle est allée plus loin cette semaine. La chef péquiste a déclaré vouloir encadrer la démocratie étudiante, sous-entendant qu'elle désavouait les méthodes des associations étudiantes lors de la tenue de votes de grève.

Pauline Marois en campagne

Cette déclaration est en complète contradiction avec tout ce que Marois a dit et fait au cours du printemps érable. Elle s'en est d'ailleurs rendu compte puisqu'elle est revenue sur ses propos. Il n'est aucunement question d'encadrer les activités des associations étudiantes, a-t-elle alors précisé, promettant plutôt qu'on en rediscuterait lors d'un sommet après son élection.

N'incarnant plus la lutte à la corruption et tentant maladroitement de ménager la chèvre et le chou sur la question de la grève, il ne reste plus au PQ que la question nationale pour marquer des points. Malheureusement pour elle, ici aussi Marois se tire joyeusement dans les pieds. Il y a quelques jours elle martelait que son parti était le seul à défendre l'identité québécoise. Les péquistes promettent plusieurs choses à ce chapitre. Entre autres, ils réduiraient l'immigration et renforceraient la loi 101, notamment en ne permettant plus aux francophones et aux allophones de fréquenter les cégeps anglophones. De même le PQ veut présenter une charte de la laïcité qui viendrait baliser les accommodements raisonnables tout en s'opposant à la logique du multiculturalisme canadien.

Il y a toute une discussion à faire sur le bien-fondé ou non de ces mesures et elles devraient provoquer un débat important. Le problème est qu'on en parle peu parce que la chef péquiste ne parvient pas à s'imposer sur ce sujet. L'identité semble pour elle un thème comme les autres. Elle le saupoudre au besoin et n'en parle jamais avec passion, comme si c'était la même chose que promettre d'ensemencer une rivière à saumons sur la Côte-Nord. Pire encore, elle se contredit. Elle invite désormais les anglophones à appuyer son parti. L'enjeu de l'élection, leur a-t-elle dit vendredi, consiste à élire un bon gouvernement. La question nationale ne se posera que plus tard.

Si la chef péquiste pense vraiment ce qu'elle dit, cela doit signifier que l'affirmation du Québec est secondaire à ses yeux. À moins qu'elle pense qu'il n'y a pas de contradiction entre les aspirations des anglophones et celles des nationalistes sur les questions identitaires.

Ici comme dans le dossier dans la grève, Pauline Marois et son État-major ne réalisent pas à quel point il est dommageable de promettre tout et son contraire. Avec la nouvelle crédibilité de la CAQ, il est désormais insuffisant de miser simplement sur l'impopularité du gouvernement Charest, de recourir au clientélisme et d'attendre que la règle de l'alternance fasse son œuvre. Ce plan de campagne n'est plus valide et, à moins d'un changement de cap dramatique, les péquistes vont subir de plein fouet le feu ennemi.

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