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Quand notre cerveau grandit de façon atypique

Les enfants semblent de plus en plus grognons, susceptibles, distraits, excitables, bizarres, lents ou géniaux, mais en tout cas atypiques.
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Des enfants qui apprennent par cœur une longue histoire en quelques séances, mais qui ne peuvent comprendre les émotions de leurs amis. Des enfants qui inventent régulièrement des mots, mais qui ont des difficultés à parler. Des enfants qui font des colères explosives tous les deux jours, mais qui adorent leurs victimes. Des enfants fonceurs qui développent de nouvelles phobies chaque semaine. L'enfant moyen semble une espèce en voie de disparition.

Les enfants semblent de plus en plus grognons, susceptibles, distraits, excitables, bizarres, lents ou géniaux, mais en tout cas atypiques. Est-ce le rythme de vie effréné, le laxisme parental, le manque de sport ou la pollution qui est responsable? Ou serait-ce simplement qu'on est devenus plus sensibles ou intolérants à des écarts qu'on ignorait avant? On n'a pas toutes les réponses, mais il est probable que tous ces facteurs jouent un rôle à un certain degré.

Se rendre à cinq ans est un parcours de combattant

Le cerveau grandissant est sensible. Bien avant notre naissance, ce qui passe du sang de notre mère au nôtre à travers le placenta peut faire toute la différence. L'oxygène et les nutriments sont essentiels. Mais si notre mère a une vie stressante (travail, conjoint, difficultés financières, troubles mentaux, guerre), les hormones de stress qui sont normalement bloquées par des enzymes du placenta vont parfois affecter le développement de notre cerveau. Il en est de même pour les neurotoxines comme l'alcool, la nicotine et autres drogues, le plomb, les BPCs et autres polluants qui peuvent affecter l'expression des gènes qui construisent notre cerveau.

Les problèmes métaboliques de maman (hypertension, diabète, obésité), les virus et les bactéries auxquels on est exposés et les complications de l'accouchement peuvent aussi influencer notre développement. Et si on est un garçon, les risques augmentent du fait d'avoir un seul chromosome X (pas de rechange en cas de panne) et d'avoir de la testostérone qui circule dans le cerveau et qui fait quelques ajustements qui font de nous un garçon.

Les connexions entre les neurones se développent de façon phénoménale avant 2 ans et ces connexions peuvent être modifiées par les conditions de l'environnement prénatal autant que par le milieu dans lequel on se trouve après la naissance.

Entre 0 et 5 ans, les circuits des fonctions cérébrales se tissent en toiles élaborées, stimulés par nos programmes génétiques, mais aussi par nos besoins et nos expériences. On apprend à bouger et à parler. Mais plusieurs d'entre nous prennent du temps à articuler correctement, d'autres restent longtemps maladroits, ou développent un bégaiement ou des tics.

On apprend les bienfaits des relations sociales, à distinguer sur le visage des autres leur intention et le degré de confiance qu'on peut leur accorder. Mais plusieurs d'entre nous gardent une peur excessive des étrangers ou sont plus à l'aise avec les jouets qu'avec les autres humains. On apprend à surmonter nos peurs, mais plusieurs développeront des phobies des hauteurs, de l'eau ou de la toilette. On apprend la confiance en soi et les bienfaits de nos attaches affectives, mais plusieurs d'entre nous développeront des troubles de l'attachement ou une anxiété de séparation (peur d'être seuls, peur pour la santé de nos proches). On apprend à tempérer nos désirs et nos impulsions, mais plusieurs feront les 400 coups pour impressionner la galerie ou pour satisfaire des désirs irrésistibles. Certaines de ces difficultés peuvent s'estomper surtout après la puberté (tics, hyperactivité, phobies ...), mais d'autres peuvent augmenter (obsessions, troubles alimentaires, impulsivité, prise de risques, délinquance, méfiance, hallucinations...)

La fragilité n'est pas exceptionnelle, c'est la norme

Au moins 20% des jeunes ont des difficultés psychologiques au cours de leur développement (anxiété, dépression, stress post-traumatique, troubles d'attachement, hyperactivité, autisme, troubles d'apprentissage...) Une donnée encore plus importante est que 100% des jeunes (et des moins jeunes) ont des fragilités ou des sensibilités qui touchent la santé, les émotions, la confiance en soi, les amis ou la famille.

Ces sensibilités apparaissent dans les périodes de stress ou de manque de sommeil. Elles apparaissent aussi quand on subit plus de défis d'adaptation (maladies, handicaps, déménagements, séparation des parents, drames) qui mettent à l'épreuve nos besoins de prévisibilité ou quand on est exposé à plus de provocations de nos proches. Se faire rappeler nos propres fragilités est un bon moyen d'augmenter notre tolérance des fragilités des autres.

Un enfant grognon mérite notre attention

La mauvaise humeur de l'enfant est un bel exemple de comportement pour lequel la tolérance et la compréhension peuvent faire beaucoup plus de bien que les réactions naturelles d'escalade ou de rejet.

La mauvaise humeur (l'irritabilité) est un des principaux baromètres de la détresse chez l'enfant. L'enfant grognon de 3 ans qui est fatigué démontre par ses plaintes, ses pleurs ou ses cris que les centres supérieurs de son cerveau ont perdu quelque peu le contrôle sur ses émotions.

Chez les plus vieux, l'irritabilité peut être un signe d'anxiété, de dépression ou un besoin d'affirmation-opposition. Même si un enfant semble grognon à propos d'une requête ou d'une situation spécifique (ex: j'aime pas les légumes), les sources réelles de son irritation peuvent être moins immédiates (ex: les commentaires d'une copine, sa performance scolaire, la dynamique familiale).

On peut être irritable parce qu'on n'a pas ce qu'on veut et dans ce cas, faire réaliser à l'enfant que ses attentes sont trop élevées peut favoriser le contrôle émotionnel. Mais parfois, l'enfant devient plus exigeant, plus critique ou plus argumentatif qu'à la normale à propos de tout et de rien. Cette irritabilité est un signal que son cerveau envoie à ses proches et à lui-même que son niveau de détresse est trop élevé et qu'une attention particulière doit être portée à ses inquiétudes, à sa fierté ou à ses attaches affectives.

Et ces besoins doivent être pris au sérieux. Classer ses réactions comme exagérées ne fait qu'entretenir le problème. Ceci ne veut pas dire qu'il faut plier à chaque plainte ou à chaque caprice. Il faut apporter un soutien et une reconnaissance tout en traçant des limites sur les attentes et les excès émotionnels.

La série sur la Santé mentale des enfants (Young Minds Matter) est une nouvelle initiative du Huffington Post destinée à ouvrir un débat sur la santé mentale et émotionnelle des enfants, de sorte que les plus jeunes se sentent aimés, appréciés et compris.

À cette occasion, son Altesse Royale la duchesse de Cambridge est rédactrice en chef invitée. Nous allons discuter des problèmes, des causes et surtout des solutions face à la stigmatisation entourant la santé mentale chez les enfants.

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Mai 2017

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