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Maria la députée martyre

J'ai été choquée d'apprendre l'exclusion de Maria Mourani. Cependant, même en reconnaissant les torts de la direction du Bloc, quand on prend le temps de remettre les choses en perspective, on se rend compte que Maria n'est pas la martyre que l'on croit.
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C'est le cas de le dire, le Bloc Québécois a été de toutes les tribunes ces derniers jours. Presque autant que la question de la Charte des valeurs québécoises elle-même, et sinon plus. Vendredi matin, la nouvelle trônait toujours au sommet des nouvelles les plus médiatisées non seulement au Québec, mais dans tout le Canada, selon le palmarès quotidien dressé par la firme Influence communication. On voulait de la visibilité au Bloc? En voilà! Évidemment, si je me trouvais personnellement aux communications d'un parti politique, ce n'est pas ce genre de visibilité que je rechercherais, surtout dans une perspective de réunion des forces indépendantistes, mais passons.

J'ai eu l'occasion d'entendre Maria Mourani en conférence à quelques reprises. C'est une femme des plus brillantes. D'autant plus qu'elle est l'une des rares femmes à briller en politique au Québec, un domaine encore trop exclusif aux hommes. Son départ du caucus du Bloc Québécois est donc sans conteste une grande perte non seulement pour le parti, mais pour le mouvement indépendantiste dans son ensemble.

C'est un fait que notre système parlementaire favorise la ligne de parti et empêche du même coup les dissensions publiques au sein des partis politiques. On peut certes s'en désoler, et j'en suis. Toutefois, c'est dans cette réalité que les partis politiques, qu'ils soient provinciaux ou fédéraux, ainsi que leurs députés respectifs, doivent présentement évoluer. Sans quoi, le leadership du chef est invariablement contesté. Avec pour résultat que ceux-ci se succéderaient à un rythme plus rapide que les élections elles-mêmes.

La direction du Bloc Québécois a certes ses torts dans cette histoire. On peut notamment lui reprocher son changement de discours, lorsque du jour au lendemain, on l'a vu demeurer neutre, puis conférer « 100% d'appui au Parti québécois » dans sa démarche. Il faut toutefois savoir que ce titre de communiqué - lui aussi assez trompeur lorsque le texte était lu en entier - était émis en réaction au titre tendancieux d'article de La Presse la veille, selon lequel le Bloc n'appuyait pas la Charte, alors que dans les faits, le chef Daniel Paillé invitait les Québécois à débattre de cette question, sans réellement prendre position. Bref, à mon sens, la plus grande erreur du Bloc est de ne pas avoir su rester neutre sur cette question de politique provinciale.

Malgré tout, pour en revenir à Mourani, il reste qu'en accolant son titre de députée du Bloc Québécois à un groupe dénonçant la Charte, et refusant obstinément quelconque compromis soumis par Daniel Paillé - notamment celui de signer ledit manifeste à titre de citoyenne - Maria a forcé son exclusion. Une décision qui, aux dires des autres membres du caucus bloquiste, a été prise en groupe, avec la présence de la principale intéressée, contrairement à ce que cette dernière affirme à tous crins dans les médias.

Analysons la situation du point de vue d'un calcul politique simple. Il était d'ores et déjà connu, à l'interne comme à l'externe du parti, que Maria Mourani lorgnait du côté de Québec solidaire au niveau provincial. Les rumeurs voulaient même qu'elle fasse partie des candidats solidaires aux prochaines élections québécoises. Cela est, bien sûr, son droit le plus entier. L'ordre des choses dans lesquels se sont précipités les évènements des derniers jours nous montre en ce sens qu'il est fort possible que le scénario de madame Mourani ait été prévu à l'avance. Je l'ai dit plus haut, c'est une femme brillante. Ce qui est important de souligner, comme le rapportait un article du journal Le Devoir, c'est qu'avec la refonte de la carte électorale fédérale, la composition de sa circonscription ne l'avantagera plus dans l'avenir. Au contraire, avec les résultats de 2011, elle perdrait désormais par 4000 ou 5000 voix. Sans compter qu'elle ne l'a jamais remporté facilement par le passé. Sentait-elle la soupe chaude en vue des élections de 2015? S'est-elle dit qu'elle aurait davantage de chances de réélection si elle joignait les rangs de Québec Solidaire, assorti de la promesse d'une circonscription prenable? Tout porte à le croire.

J'ai été choquée d'apprendre l'exclusion de Maria Mourani lorsque la nouvelle a commencé à faire le tour des médias, jeudi en fin d'avant-midi. Et c'est peu dire. Cependant, même en reconnaissant les torts de la direction du Bloc, quand on prend le temps de remettre les choses en perspective, on se rend compte que Maria n'est pas la martyre que l'on croit. Encore moins celle qu'elle voudrait bien nous faire croire. Ne sous-estimons pas son intelligence.

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