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Mauvaise année Daech!

2016 dépend déjà d'une guerre contre l'horreur et d'une guerre contre la montre.
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2015 a été notre année tragique. Nous avons perdu beaucoup. Des êtres irremplaçables. Et quelques illusions. L'innocence d'un pays qui croyait pouvoir vivre en paix au milieu d'un monde en feu. Ces flammes vont continuer à rougir nos vies en 2016. L'année sera rythmée par le risque d'attentats, parfois déjoués, parfois meurtriers. Mais Daech (État islamique) connaîtra lui aussi une année bien plus difficile en tout cas qu'en 2015.

Les premières années du califat étaient forcément les meilleures. Obnubilés par Al Qaïda, peu d'adversaires et d'observateurs y ont prêté attention aux combattants de Daech infiltrant la rébellion syrienne. Barack Obama lui-même a longtemps confié ne pas avoir de stratégie en Syrie.

Al Baghdadi en a profité, et doublé Al Qaïda grâce à une simple idée: s'autoproclamer calife et non simple chef terroriste comme Ben Laden. La restauration du califat aboli en 1923 par Ataturk est un fantasme qui excite tous les islamistes. Qu'ils soient frères musulmans, wahhabites ou autres.

Les premières années de Daech ont été idylliques. Aidées par Bachar El Assad qui a concentré sa rage sur les mouvements syriens plus modérés ou concurrents, les troupes de Daech ont conquis des zones désertiques et parfois, dès 2014, de vrais lieux stratégiques, riches en ressources pétrolières, comme Mossoul en Irak.

Un symbole et des ressources

C'est avant tout la propagande du califat qui séduit ses partisans. Mais le recrutement est d'autant plus facile que le groupe promet à ses recrues des primes, des esclaves sexuelles yazédies et des maisons spoliées aux Irakiens. Parfois au prix de quelques désillusions une fois sur place. Des jeunes femmes attirées par le jihad sexuel ont tourné de combattant en combattant une fois leur premier mari tué.

Les hommes, eux, sont vite envoyés se faire trouer la peau ou commettre des attentats chez eux pour payer le loyer. Daech exécutant lui-même beaucoup de ses partisans. Pour un oui ou pour un non. Comme tous les États totalitaires.

Nous ne sommes pas les seuls à avoir perdu nos illusions en 2015. Certains jihadistes les perdent si vite une fois sur place qu'ils se trancheraient volontiers les deux mains pour être rapatriés, même pour dormir en prison, plutôt que subir la terreur quotidienne de l'État islamique.

Le flux des volontaires semble s'être ralenti depuis que le groupe part dans tous les sens et choisit ses cibles d'attentats à l'aveuglette. Comme le stade de France à Saint Denis. Ceux qu'on nous présente comme des cerveaux n'étant bien souvent que des petites frappes à qui on a lavé les neurones.

Mais surtout les vrais cerveaux, les commanditaires qu'on ne trouve sur aucune carte de banlieue défavorisée européenne puisqu'ils ont grandi au Moyen-Orient, commencent à manquer. Beaucoup de ceux qui ont pensé et conçu les attentats de Paris et de St Denis ont trouvé la mort depuis. Al Baghdadi a failli être abattu. Même si c'est difficile à évaluer, on en serait à plus de 10 000 combattants tués sur 30 ou 40 000. Dont certains militants clés. Comptables, hackers, recruteurs, formateurs... Battus grâce aux combattants Kurdes, aux drones américains, aux tireurs d'élite anglais, aux frappes françaises et plus rarement grâce aux Russes, dont les bombes tombent bien souvent sur des militants syriens modérés voire sur de simples habitants.

Le monde contre Daech

Reste que Daech a réussi à faire l'unanimité mondiale contre lui. Y compris dans le monde musulman. Al Baghdadi le sent. Dans son dernier discours, il se préoccupe subitement beaucoup d'Israël dans l'espoir de ressouder les rangs, mais sa rage vise surtout l'Arabie Saoudite, qui vient de prendre la tête d'une coalition sunnite contre Daech.

C'est un signe, et pas le seul. Quelque chose bouge dans le monde musulman. Si l'Arabie Saoudite a beaucoup financé des mouvements salafistes et continue à financer d'autres groupes islamistes en Syrie, Daech est devenu son ennemi numéro deux, juste après l'Iran. Et quand le ton monte dangereusement avec son grand rival iranien proche de Bachar El Assad, comme en ce moment, le guide suprême iranien compare l'Arabie Saoudite à Daech. Un mot devenu une insulte dans le monde musulman. Même aux yeux des pires théocraties au monde, après Daech bien sûr.

Cela ne veut pas dire qu'il faut s'attendre à voir l'État islamique s'éteindre facilement. La partie du groupe terroriste est facile. Il suffit de quelques armes et de quelques fous pour marquer des points dans sa sale guerre. Mais surtout, nous gardons une longueur de retard.

Traumatisée par la guerre en Irak, l'Amérique d'Obama ne veut plus s'engager au sol. Nous non plus. Et le temps que les frappes ciblées portent leurs fruits en Irak et en Syrie, le mouvement terroriste sera peut-être installé en Libye... Où les ressources énergétiques, le contrôle de frontières migratoires clés pour l'Europe et le chaos sur place risquent de lui offrir un second souffle. Pendant ce temps, nos démocraties, elles, s'essoufflent.

Autant dire que 2016 dépend déjà d'une guerre contre l'horreur et d'une guerre contre la montre. Même s'il n'est pas encore trop tard pour nous souhaiter une meilleure année et pour souhaiter une mauvaise année à Daech.

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