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Face à ce terrorisme identitaire, les musulmans du Québec se sentent délaissés par des autorités politiques et policières qui ne font rien de sérieux pour éradiquer cette grave menace terroriste.
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Ces indifférents sont donc les complices de tous ces nouveaux fous de l'identité québécoise qui se multiplient sur les réseaux sociaux et au sein de groupuscules inquiétants d'obédience extrême droitière, voire néonazie.
Stringer . / Reuters
Ces indifférents sont donc les complices de tous ces nouveaux fous de l'identité québécoise qui se multiplient sur les réseaux sociaux et au sein de groupuscules inquiétants d'obédience extrême droitière, voire néonazie.

Dans la nuit du 5 avril 2004, au nom d'un groupe islamique fabulé (les « Brigades du Cheik Ahmed Yasine [sic] »), un jeune montréalais incendie la bibliothèque d'une école juive d'Outremont. Comme pour expliquer son horrible crime, l'incendiaire laisse sur place un tract qui dit ceci :

« Voilà la conséquence de vos crimes et de votre occupation. Voilà la riposte à vos assassinats. Voilà où que vous mène le terroriste, Ariel Sharon. Nous ne visons pas le Québec: on vous vise à vous: Israéliens et sionists. La prochaine fois, nous frapperons de plus forts [sic] » (Le Devoir du 19 janvier 2005).

Le « vous », auquel s'adresse le jeune, ce sont bien sûr ses paisibles concitoyens juifs d'Outremont. Il les tenait pour responsables des agissements d'Ariel Sharon, le chef d'un gouvernement étranger. Non parce qu'ils étaient réellement complices de ce dernier, mais plus simplement en raison du fait qu'ils partageaient avec lui le marqueur identitaire de la confession juive. C'était suffisant pour s'en prendre à eux violemment, car, pour le jeune, ils étaient en fait coupables d'être ce qu'ils étaient, des Juifs.

À cause de l'identité religieuse qu'ils partagent avec des groupes violents qui sévissent ailleurs dans le monde, des extrémistes de l'identité québécoise les condamnent et se croient justifiés de chercher à les intimider.

Il en est ces jours-ci de même avec les musulmans du Québec. À cause de l'identité religieuse qu'ils partagent avec des groupes violents qui sévissent ailleurs dans le monde, des extrémistes de l'identité québécoise les condamnent et se croient justifiés de chercher à les intimider. Ils les insultent, ils les menacent, ils profanent leurs lieux de culte et ils brûlent leurs voitures non pour ce qu'ils auraient fait ou pourraient faire, mais pour ce qu'ils sont. Ils sont à leurs yeux coupables d'être musulmans.

On le voit donc bien. Le regard identitaire exacerbé sur soi et sur autrui étouffe l'intelligence et l'empathie, c'est-à-dire qu'il rend bête et méchant. Il amène à ne plus voir son prochain qu'à travers la lorgnette de l'identité et empêche, ce faisant, de reconnaître en lui un humain et un citoyen digne de respect. Il en fait dès lors un ennemi qui mérite haine et mépris, et, dans les cas extrêmes, il pousse son porteur à l'incivilité et au crime.

Il y a aussi le regard indifférent de ceux qui ne haïssent peut-être pas assez pour passer eux-mêmes à l'action, mais qui demeurent de glace devant le terrorisme antimusulman qui se manifeste désormais à répétition.

Mais il n'y a pas que ce regard identitaire intolérant qui fait aujourd'hui mal aux musulmans du Québec. Il y a aussi le regard indifférent de ceux qui ne haïssent peut-être pas assez pour passer eux-mêmes à l'action, mais qui demeurent de glace devant le terrorisme antimusulman qui se manifeste désormais à répétition. Ces indifférents sont donc les complices de tous ces nouveaux fous de l'identité québécoise qui se multiplient sur les réseaux sociaux et au sein de groupuscules inquiétants d'obédience extrême droitière, voire néonazie.

En fait, lors du procès du jeune incendiaire d'Outremont – qui fut très rapidement arrêté à la suite de son crime - la juge qui l'a condamné a qualifié son geste de terrorisme. Elle a expliqué sa décision en soulignant qu'il y avait une distinction importante à faire entre vandalisme et terrorisme, à savoir que le premier vise « à détruire stupidement », tandis que le second cherche « à intimider et à semer la terreur dans un but politique ».

En vertu de cette définition, on peut facilement comprendre que les actes qui ont ciblé ces derniers mois les Québec de confession musulmane sont bel et bien des actes terroristes. Ils ne visent pas « à détruire stupidement », bien au contraire. Ils cherchent plutôt « à intimider et à semer la terreur » parmi les membres d'une minorité religieuse. De plus, cette intimidation possède certainement une finalité politique puisqu'elle prétend défendre une identité québécoise mythifiée en réservant les droits citoyens aux seuls membres de la majorité ethnique de la Nation québécoise.

Enfin, face à ce terrorisme identitaire, les musulmans du Québec se sentent délaissés par des autorités politiques et policières qui ne font rien de sérieux pour éradiquer cette grave menace terroriste. Du point de vue du simple citoyen musulman, c'est là où le bât blesse le plus, car cet immobilisme complaisant n'augure rien de bon pour son avenir dans son pays.

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