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Tu sais, je t'aime bien, Denis. Malgré nos divergences politiques, je trouve que ta personnalité ressemble à la mienne. Tu as le mérite d'avoir compris, même si tu en abuses parfois, que la politique traditionnelle, fade et ennuyeuse, avec la langue de bois et la ligne de parti, s'en va tranquillement dans un mur.
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Mon cher Denis...

Denis, je peux t'appeler ainsi? Je veux dire, tu es un homme du peuple Denis, tout le monde le dit. Tu souris à toutes et à tous, tu serres d'innombrables mains lorsque tu vas faire ton épicerie ou ton magasinage, tu es direct et tu ne mâches pas tes mots. J'ai moi-même été l'une de ces mains serrées, Denis, lors de l'ouverture de l'organisme Les Fourchettes de l'Espoir, qui est aussi une entreprise de réinsertion sociale, dans ton ex-circonscription de Bourassa-Sauvé, à Montréal-Nord. Tu ne t'en rappelles pas Denis, mais je ne t'en veux pas. Je n'aurai été qu'une main sillonnant dans un océan de poignées serrées dans ta longue carrière.

Mais voilà Denis, je viens de revenir de voyage, et j'apprends que tu es maintenant officiellement maire de Montréal. Ce n'est pas une surprise, j'en parlais justement dans mon dernier article, mais c'est devenu un fait. Félicitations Denis!

Lorsque tu as décidé de te lancer dans la course, je t'avais écrit un courriel (eh oui, je fais ça, écrire à des politiciens qui se lancent pour leur suggérer des choses, ça a ben l'air que je dois être soit désœuvré, soit je pense que mon opinion est potentiellement valable) dans lequel je te félicitais pour ta décision de te lancer en politique municipale, et où je te faisais certaines suggestions pour éviter de trop t'embourber dans ce guêpier que peut facilement devenir l'Hôtel de Ville. Évidemment, comme c'était prévisible, tu n'en as pas tenu compte. Encore une fois, je ne t'en veux pas, je ne suis personne, comparé à tes stratèges politiques!

Et donc, te voici devenu maire de Montréal. Par contre, ta majorité est relative. La balance du pouvoir appartient aux indépendant(e)s, et l'opposition officielle est forte. Il te faudra être rassembleur, Denis, car après une décennie assez troublante au niveau de la corruption, du copinage politique et de la proximité des élu(e)s avec des personnalités douteuses, il te faudra montrer patte blanche.

Je crois que tu peux le faire. Par contre, si je regarde les élu(e)s qui composent ta formation politique, force est de constater que sur les 22 ex-élu(e)s d'Union Montréal que tu as recrutés, 19 sont de retour. En fait, seules Mesdames Ana Nunes et Helen Fotopoulos ont perdu, tandis que tu as montré la porte à Robert Zambito lorsque l'UPAC s'est penché sur son cas. Si ces personnes ont été réélues, il ne faut pas oublier que plusieurs d'entre elles pourraient être l'objet d'une enquête dans les mois, voire les années à venir, et que ce ne sera pas bon pour ton image et ta formation politique.

Je vais te poser une question, Denis : à partir de combien d'ex-élu(e)s d'Union Montréal faisant l'objet d'une enquête par l'UPAC, mais siégeant sous ta bannière, te faudrait-il pour demander à ce que toute la lumière soit faite, et ce jusqu'au bout, sur les agissements de l'ancien Parti de Gérald Tremblay? Je vais y répondre pour toi, Denis: 4. Et sache que si ce chiffre a l'air aléatoire, il n'en est rien. Le premier est déjà connu et, même si tu l'as expulsé, il compte. Il s'agit de Robert Zambito. Il te reste donc trois prises. À la première, on pourrait toujours se dire que c'est un cas isolé, encore. À la seconde, des doutes profonds ressurgiront sur l'implication des anciens de l'Union dans les scandales encore chauds, et te mettront dans l'eau bouillante. À la troisième, il te faudra demander publiquement à l'UPAC de venir enquêter sur tes propres alliés, sinon cela deviendra vite ingérable. Et cela mènera possiblement à l'éclatement de ta formation à peine née...

Tu sais, je t'aime bien, Denis. Malgré nos confessions politiques aux antipodes l'une de l'autre, je trouve que ta personnalité ressemble à la mienne. Tu as le mérite d'avoir compris, même si tu en abuses parfois, que la politique traditionnelle, fade et ennuyeuse, avec la langue de bois et la ligne de parti, s'en va tranquillement dans un mur où elle finira par s'écraser. Le futur alliera une politique de contenu et une politique dite de spectacle, où les politiciens seront plus glamour, plus drôles, plus directs, bref, plus people.

Pour celles et ceux qui considèrent cela comme une aberration, je vous dirais que vous n'avez pas tout à fait tort, mais que c'est ce que veut une majorité de la population. Pour que les gens votent, il faut les intéresser, il faut les convaincre d'aller voter. Il faut qu'ils soient séduits par les candidat(e)s, et pour cela, il faut qu'ils les voient beaucoup, et pas seulement dans un contexte d'antichambre à l'Hôtel de Ville, mais, disons, à un match de hockey, à Tout le monde en parle, à une partie locale de football ou au spectacle de Garou, pourquoi pas! C'est le concept du « parlez-en en bien, parlez-en en mal, mais parlez-en », abusivement mis de l'avant par cet incroyable Rob Ford, maire de Toronto, ces derniers temps. C'est évidemment l'exemple à ne pas suivre, Denis, mais un maire qui défonce des portes, fermées ou ouvertes, ça nous fera du changement...

Le travail commence, Denis. La ville tombe en ruine. Nos infrastructures sont en piètre état et la gouvernance, dans sa forme actuelle, est un échec programmé. La ville est devenue un cauchemar pour les automobilistes. Le transport en commun s'épuise et ne s'autofinancera jamais. Le pont Champlain, avec un péage, fera refouler la cuvette de la Rive-Sud sur tous les autres ponts, et nous devrons les reconstruire plus vite. Aussi, disons-le franchement, nous avons besoin de plus de wow dans cette ville pour nous remettre sur la carte.

Tu as quatre ans pour prouver à la population que tu n'es pas seulement un bouillant député extrêmement aimé dans une circonscription fédérale, mais un maire consciencieux, à l'écoute de la population, qui a une vision et un projet pour Montréal. 40% de participation aux dernières élections, c'est encore très peu. Il faudrait remonter en haut de 50% pour la prochaine, Denis. C'est un objectif réaliste. Tu peux y arriver, j'y crois. Il faudra pour cela allier spectacle et contenu. Comme disait Pink Floyd: « The show must go on».

J'espère de tout cœur que l'UPAC ne te volera pas la vedette, Denis. Ce spectacle-là, on en a soupé...

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