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«Le journal d'Aurélie Laflamme»: India Desjardins s'adresse désormais à ses «lecteurs et lectrices»

«On tient pour acquis qu’une histoire dont le personnage principal est une fille n’intéressera pas les garçons...»
Courtoisie

C'est une jeune fille prénommée Camille - ainsi que son groupe de petites amies - qu'il faut remercier pour la sortie de ce neuvième tome des aventures d'Aurélie Laflamme. Sa pétition comprenant une centaine de noms, présentée à India Desjardins lors d'une conférence dans une bibliothèque de Boucherville, a fait naître l'étincelle, l'idée inattendue dans l'esprit et le cœur de son auteure favorite.

Jamais sans Aurélie

Cela s'est déroulé en 2016, soit cinq ans après la sortie du dernier tome d'Aurélie Laflamme. «J'ai été super touchée de cette attention, explique India Desjardins. C'est dans l'auto au retour que j'ai eu cette idée inattendue et que j'ai trouvé le titre de ce neuvième tome, Voler de ses propres ailes. J'ai eu envie d'aborder cette période de vie du début de la vingtaine, du début d'un travail et de cette nouvelle vie en appartement.»

On retrouve donc une Aurélie de 22 ans fraîchement sortie de l'université, travaillant au Miss magazine et amorçant sa nouvelle vie de journaliste-pigiste. «Une vie qui n'est pas exactement comme celle qu'elle imaginait dans sa tête, ajoute l'écrivaine. Je voulais parler du fait que même si tu travailles dans ta passion, dans ce que tu aimes, cela peut t'arriver de te sentir ''pas dans la gang'' comme lorsque tu étais au secondaire; ce fait d'être confronté à la réalité versus le rêve de comment tu imagines la vie d'adulte quand tu es adolescent.»

Son défi créatif lors de l'écriture de ce nouveau tome? Livrer l'histoire d'une fille de 22 ans qui pourrait être lue par des jeunes lecteurs âgés de onze ou douze ans. «C'était un beau défi et non une contrainte, le fait de me demander de livrer un roman portant sur une fille de 22 ans qu'une fille de onze ans pourrait aussi apprécier. Je l'ai fait notamment dans le choix de mots. Ultimement, je voulais que ce soit possible à lire pour des jeunes.»

Si India Desjardins remercie Camille et ses amies de lui avoir fait retrouver son personnage «plus tôt que prévu», c'est qu'elle explique que son idée de départ a toujours été celle de livrer une série composée de 8 tomes.

«Dans ma tête, cela commençait au tome 1 intitulé Extra-terrestre ou presque, où Aurélie se sentait comme une extra-terrestre et cela se terminait au tome 8 lors du bal de finissants avec Les pieds sur Terre. Pour moi, cela faisait une boucle, l'histoire avait un début et une fin.»

Ils sont nombreux (son éditeur, ses lecteurs), après la sortie du tome 8, à l'avoir sommée de poursuivre l'écriture de l'histoire d'Aurélie. Pour l'auteure, cependant, il était primordial de respecter l'histoire qu'elle avait en tête dès le départ.

Mais cela, c'était avant de faire la rencontre de l'audacieuse Camille et de ses amies (à qui l'auteure a d'ailleurs dédié Voler de ses propres ailes en plus de la faire participer à la lecture du premier chapitre et au choix des couleurs de la couverture).

«Je suis contente de cela, car je tripe à retrouver Aurélie, explique celle qui dit avoir vécu un deuil inattendu en 2011 après la sortie du tome 8. Ce fut un vertige, car j'aime tellement ce personnage-là. Par contre, heureusement, c'est un peu comme si tout cela n'avait jamais arrêté pour moi, car les lecteurs n'ont jamais cessé de venir me voir dans les salons pour me parler d'Aurélie. »

Elle insiste pourtant sur le fait qu'elle ne veut pas «reprendre la série d'Aurélie» et que poursuivre à l'infini avec ce personnage ne fait pas partie de sa démarche artistique.

«Pour moi, il est important d'avoir quelque chose à dire, de raconter une histoire. Par contre, je ne veux pas dire que c'est le dernier non plus, car ce personnage-là, je l'aime tellement que si j'ai une autre idée dans quelques années, oui je vais la reprendre. Je ne peux pas dire quand, ni comment, mais je reste ouverte à la reprendre un jour si je trouve une idée qui va de pair avec mon thème qui est toujours ce personnage d'Aurélie qui se sent extraterrestre et qui cherche sa place dans l'univers.»

«Le journal d'Aurélie Laflamme, Tome 9 : Voler de ses propres ailes».
Les Éditions de l'Homme
«Le journal d'Aurélie Laflamme, Tome 9 : Voler de ses propres ailes».

Les gars, les filles

On peut dire que le personnage d'Aurélie Laflamme fait partie intégrante de la vie d'India Desjardins, qui s'applique à écrire ses aventures depuis 12 ans déjà.

«Aurélie fait partie de moi, dit-elle. En fait, ce personnage m'a vraiment dépassée. C'est à la fois une grosse responsabilité, une pression et une grande fierté. C'est un mélange d'émotions; de belles émotions. Cela vient aussi avec la peur de décevoir ces gens qui se sont appropriés ce personnage, tout en restant intègre à mon histoire et en restant réaliste avec l'évolution du personnage. Il fallait que je trouve une sorte d'équilibre dans tout cela.»

L'auteure, qui explique recevoir des messages de lecteurs provenant de partout à travers le monde, avoue que ce qui lui fait le plus plaisir est lorsqu'on lui dit que lire Aurélie a aidé quelqu'un dans une période plus difficile de sa vie.

«J'ai l'impression qu'il y a dans Aurélie les outils permettant de trouver la force de traverser les obstacles de la vie, car les gens ne m'écrivent pas pour me demander ce qu'ils devraient faire, mais plutôt pour me dire qu'ils ont trouvé les réponses à leurs questions dans mes livres.»

Si la maman d'Aurélie se fait un point d'honneur d'utiliser le terme «lecteurs et lectrices» désormais, c'est qu'un jeune admirateur l'a bien fait réfléchir lorsqu'il lui a expliqué adorer les aventures d'Aurélie et ne pas aimer ne l'entendre utiliser que le mot «lectrices».

«Il a raison, ajoute-t-elle. Aurélie n'est pas seulement une série pour les filles. D'ailleurs, nous, les filles, on lit des livres avec des personnages féminins et masculins, on peut s'identifier à tout, alors qu'une histoire dont le personnage principal est une fille, on tient pour acquis que cela n'intéressera pas les garçons. Pourquoi a-t-on cette pensée-là? C'est fou! C'est pourtant un personnage humain qui vit des choses d'humain. Je me dis qu'il faut qu'on souligne que même s'il s'agit d'une couverture un peu plus féminine, les gars peuvent le lire et peuvent s'y intéresser.»

«Je trouve cela merveilleux de voir un garçon dans le métro lisant son Aurélie à la couverture rose. Tout comme on voit des filles lisant des livres de super-héros qui sont souvent associés aux gars. J'aimerais que ça devienne cela un jour; qu'on voit un gars lisant un livre avec une couverture plus féminine et qu'on ne se pose plus de questions. Il faut que ça change et je sais que cela peut changer, car je le vois avec Aurélie.»

Voler de ses propres ailes est disponible depuis le 24 octobre dans toutes les bonnes librairies. India Desjardins sera présente au Salon du livre de Montréal en novembre prochain.

L'auteure est aussi en nomination pour le prix du Gouverneur général pour son livre Une histoire de cancer qui finit bien (annonce le 30 octobre).

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