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«Préfère novembre» : Louis-José Houde place la barre toujours plus haut

«Préfère novembre» : Louis-José Houde place la barre toujours plus haut
Paméla Lajeunesse

Nos attentes étaient élevées. Louis-José Houde ne les a pas déçues. Sans surprise, le quatrième one man show de l'humoriste surdoué, Préfère novembre, est un bijou d'amalgame de tout ce que ce dernier sait faire de mieux : textes parfaitement au point, sens du timing d'une irréprochable précision, livraison juste assez théâtrale et jumelage de sujets d'actualité et intemporels, suffisamment engagés sans que ça ne devienne un pamphlet. Et, ô bonheur, pas de matière à controverse.

Naturellement talentueux, travailleur acharné, intelligent, sensible, observateur et pertinent comme on le connaît, Houde est désormais, comme s'était autoproclamé son collègue Martin Matte à une certaine époque, condamné à l'excellence.

Car il n'additionne que les bons coups : en 12 ans d'animation du Gala de l'ADISQ, l'artiste arrive encore à se surpasser dans son monologue d'ouverture, qui est généralement le moment le plus attendu de la soirée. Ses trois années à la barre du spectacle de la Fête nationale, à Montréal, entre 2014 et 2016, ont été d'excellents crus. Il ne fait que passer à Tout le monde en parle ou dans un autre talk-show et il arrive à se faire remarquer avec la mimique ou la réplique appropriée.

Louis-José Houde présente «Préfère novembre»

Qui plus est, Houde a atteint le statut de la crédibilité établie. Son opinion est précieuse, elle nous intéresse, parce qu'elle se fait rare et pas gueulée sur toutes les tribunes. Elle est songée. Quand il parle, on écoute. Ils ne sont pas légion comme lui.

La preuve qu'on anticipait un événement de qualité? Même le grand Yvon Deschamps s'était déplacé pour la première montréalaise de Préfère novembre, mercredi, à l'Olympia. Dans cette même salle où Louis-José Houde rode son nouveau matériel depuis le début de l'automne, confortablement installé en résidence, une formule qui lui sied bien. Pas de panique en région, toutefois, puisque la tournée en bonne et due forme de Préfère novembre s'amorcera dès janvier.

On vous conseille d'ailleurs vivement, si vous appréciez un tant soit peu le style de Louis-José Houde, de vous déplacer pour aller applaudir Préfère novembre, si ce n'est déjà fait. On aurait beau vous réciter ici ses blagues une à une, vous ne bénéficierez jamais, dans une simple lecture, du ton, du débit, de l'impeccable et hilarante manière de raconter de Louis-José.

Le gaillard n'est pas qu'un auteur brillant, une véritable aura d'acteur vit en lui, et celle-ci irradie constamment sur scène. Pris hors contexte, ses gags sont amusants ; balancés sur les planches, appuyés des facéties et de l'expressivité inénarrable de celui qui les dit, ils deviennent souvent tordants. Une prestation de Louis-José Houde, c'est un tout, et pour l'apprécier, c'est tout ou pas du tout.

Travail d'orfèvre

Préfère novembre s'inscrit donc dans la lignée du travail d'orfèvre entrepris et consacré par Louis-José Houde dans ses trois premiers spectacles - on disait d'ailleurs de lui qu'il était «dans une classe à part» au sujet des Heures verticales, en 2013 - et dans ses autres projets.

Les thématiques de Préfère novembre sont subtilement annoncées dans le titre choisi par Louis-José : sa personnalité, qu'il compare à l'avant-dernier mois de l'année («C'est jamais la tempête, mais c'est toujours un peu gris»), le temps qui passe, la vie qui change, ces valeurs si importantes qu'on malmène souvent aujourd'hui. Ce solide fil conducteur, bien défini, guidé par la maturité de sa récente quarantaine, est minutieusement respecté pendant plus d'une heure (sans entracte et qu'on ne voit pas filer).

Le contenu est teinté de réflexions, de la douce nostalgie qui a toujours animé l'ancien pilier de Dollaraclip, sans par contre s'y fonder totalement.N'empêche, il n'y a que lui pour nous remémorer le «move» à la Beyonce qu'on devait jadis exécuter pour se glisser dans une cabine téléphonique aux pages de l'annuaire arrachées, ou pour déplorer le fait que notre café est maintenant «prisonnier des capsules», à cause des nouveaux modèles de cafetières.

Les ciné-parcs, la «génération de l'orange» (ceux et celles qui recevaient une orange en cadeau à Noël, et qui en sont resté(e)s marqué(e)s), l'omniprésence des écrans («Ça t'arrives-tu d'halluciner une vibration de téléphone dans tes culottes? (...) Penses-tu que c'est santé, ça?»), les vêtements qu'on ne porte plus en ville, mais qui ne sont pas plus utiles au chalet («C'est pas 70 kilomètres dans le nord qui justifient un t-shirt Votez Wilfred), les «lignes dures» de téléphone («C'est quand la dernière fois que tu as parlé de ligne dure à ligne dure? (...) «T'as le goût de dire des vieilles affaires dans ce temps-là (...) En 2017, une ligne fixe qui sonne, c'est un sondage ou un décès!»), l'émoticône du «clin d'œil avec la langue sortie»: on s'y reconnaîtra tous un peu. Ou beaucoup.

Il énonce de grandes vérités avec la candeur d'un enfant. C'est bien vrai, qu'on ne perdrait plus de temps dans des réunions de copropriétaires de condos, si on connaissait à l'avance la date de notre propre mort, et que, tant qu'à avoir un jour le visage sillonné de rides, préférons les rides dues aux rires.

Il aborde par la bande les aléas de la célébrité, les «discussions avec l'au-delà», sa «deuxième» expérience sexuelle, ces grands principes qui cachent souvent quelques complexes, et des notions délicates comme le racisme, l'homophobie et le consentement sexuel, toujours en douceur. Son papa, bien que pas toujours bavard, lui a visiblement donné d'excellentes bases. Puis, son hommage aux mères monoparentales, «les meilleuresdates au monde», est senti et elles seront sans doute nombreuses à l'apprécier!

Percutant sans choquer, drôle sans vacheries, Louis-José Houde donne dans la finesse, dans la beauté, dans le réconfortant et dans le rassembleur, sans que ça ne devienne mièvre ou même bon enfant. Même le thème le plus léger est traité avec panache.

L'élégant Louis-José peut bien affirmer qu'il ressemble au mois de novembre, nous, on le comparerait à un mois d'avril où les rayons de soleil nouvellement chauds commencent à nous chatouiller la peau, ou à un paisible septembre aux journées encore juste assez longues, qu'on voudrait voir s'étirer.

Louis-José Houde retournera présenter Préfère novembre à l'Olympia de Montréal plusieurs soirs en décembre, et en janvier, février et mars 2018. Toutes les dates sont disponibles sur son site web. Simon Gouache assure sa première partie.

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