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Présidentielle française : six scénarios pour un premier tour

Présidentielle française : six scénarios pour un premier tour

Présidentielle historique en France. L'élection du jamais vu, avec un sortant (François Hollande) qui ne se représente pas. Avec un « jeunot » de 39 ans, presque sans expérience politique, devenu favori par accident. Avec des partis longtemps dominants (à gauche, à droite) menacés d'élimination dès le premier tour. L'élection de tous les possibles... y compris – en poussant à peine – une finale entre les deux extrêmes!

Une analyse de François Brousseau

Officiellement, onze candidats. Mais réellement, quatre. Les deux dernières semaines menant au vote du 23 avril auront vu Marine Le Pen, Emmanuel Macron, François Fillon et Jean-Luc Mélenchon (pour schématiser : l’extrême droite, l’extrême centre, la droite classique et l’extrême gauche), se battre dans un peloton de plus en plus serré, où les deux premiers se sont relativement tassés, tandis que les deux derniers remontaient imperceptiblement.

Le grand sondage – plus de dix mille personnes interrogées – publié par le journal Le Monde daté du 20 avril, exécuté par le CEVIPOF (lié à l’école de Sciences Po de Paris; un des meilleurs instituts de sondages en France) donne un gros quart d’indécis, ce qui est énorme.

Et pour les votes décidés, en arrondissant au point près, le CEVIPOF accorde 23 %, 22 %, 20 % et 19 % à Macron-Le Pen-Fillon-Mélenchon, dans cet ordre. Autrement dit, un « mouchoir de poche » de quatre fois 20 %, grosso modo.

Le grand mystère

Ce qui fait que les noms des deux premiers de dimanche – qui dans le système français vont se retrouver au second tour deux semaines plus tard (le 7 mai) – eh bien! les noms de ces deux-là restent un mystère.

Avec quatre semi-finalistes, il y a donc mathématiquement six possibilités de duel au second tour. Reprenons-les rapidement, par ordre croissant de probabilité.

Même si les six combinaisons ne sont pas toutes également probables, on exagère à peine en affirmant, à 48 heures du vote, que tout est possible. Après un bref sommaire de chaque scénario, je note une évaluation – personnelle et subjective – des probabilités de chacune en termes de pourcentage.

1- Fillon-Mélenchon

Improbable, puisqu’il faudrait (1) que Marine Le Pen – qui, il est vrai, a mené une campagne assez faible, étonnamment peu agressive – glisse in extremis au troisième ou au quatrième rang, sous les 20 %. Il faudrait aussi (2) que le rescapé de la droite classique (du parti Les Républicains), l’homme qu’on croyait fini après les scandales d’emplois fictifs et la révélation d’un personnage « à double fond », soit revenu ayant mis en avant son programme (tout en faisant oublier sa personnalité). Et (3) que le phénomène Jean-Luc Mélenchon grimpe jusqu’à la dernière minute, siphonnant des voix au centriste (faussement de gauche) Emmanuel Macron, qui trébucherait gravement. 5 % de probabilités.

2- Macron-Mélenchon

Cela signifierait que Fillon (la droite) et Le Pen (l’extrême droite) seraient tous deux éliminés, dans un pays où la majorité sociologique penche nettement à droite, et où le conservatisme (notamment sur des questions comme l’immigration, le multiculturalisme, la lutte à l’islamisme) a le haut du pavé. Ce serait une espèce d’accident de l’arithmétique électorale, où des pro-Fillon seraient restés chez eux ou seraient passés à Macron. Et où des pro-Le Pen seraient passés (pour des raisons surtout économiques) chez Mélenchon. Lequel a lui-même admis qu’« il y a certains pro-Le Pen qui viennent maintenant chez nous ». Cela dit, pas plus de 10 % de probabilités.

3- Le Pen-Fillon.

Là, on entre dans le vif. Avant le scandale Fillon qui a ouvert un boulevard à la candidature Macron, c’était le scénario le plus probable, et peut-être le plus conforme à l’état sociologique et idéologique de la France en 2017. Il faudrait cependant que François Fillon, opérant une remontée improbable (fin janvier, début février, il a chuté brutalement de 27 % à 17 %, au profit surtout de Macron, lorsque le Canard enchaîné a commencé sa série d’enquêtes catastrophiques pour lui), double au « finish » Emmanuel Macron. 15 % de probabilités.

4- Le Pen-Mélenchon

C’est la victoire et le choc des deux populismes. Les bourses, la monnaie, les marchés financiers seraient durement touchés. Au programme : sortie possible de l’OTAN, de la monnaie commune voire de l’Europe. Ces deux candidats ont parlé fréquemment et durement de l’Alliance atlantique et de « l’impérialisme américain », mais gentiment de la bonne Russie de Vladimir (Mme Le Pen a même eu les honneurs du Kremlin). Les deux ont des programmes économiques (protectionnisme, dépenses sociales) et un positionnement géopolitique (retrait possible de l’Union européenne) étonnamment similaires même si la première est une xénophobe, et le second un internationaliste pacifiste et promigrants. 15 % de probabilités.

5- Macron-Fillon

Ce serait l’élimination des extrêmes, le duel de l’« establishment » et la joie des milieux financiers. Le représentant de la droite classique (Fillon) contre l’héritier malgré lui du gouvernement sortant, même si M. Macron s’en défend toujours. Cela signifierait que les deux campagnes des extrêmes (Le Pen-Mélenchon), qui à un certain moment frisaient les 50 % d’appuis combinés, se seraient affaissées en faveur d’un vote « réaliste » et plus conventionnel. 20 % de probabilités.

6- Macron-Le Pen

C’est le scénario qui, tout de même, a le plus de chances de sortir des urnes, dimanche à 20 h (14 h, heure de Montréal) lorsque les chaînes de télévision lanceront leurs projections (le plus souvent très justes, au point d’enlever tout suspense à la soirée électorale). Macron remontant in extremis. Le socle de Marine Le Pen lui permettant de traverser, malgré tout, l’épreuve du premier tour. Fillon coulé par sa personnalité…complexe, malgré l’importance de son « peuple de droite ». Quant à Mélenchon, il y a tout de même des limites au potentiel d’un programme d’extrême gauche : plutôt « voter utile », pour Macron! 35 % de probabilités.

À dimanche!

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