L'affaire des appareils de chirurgie cardiaque possiblement contaminés par une bactérie prend de l'ampleur dans les établissements de santé du Québec.
Un texte de Bruno Coulombe
Après l'Institut de cardiologie de Montréal la semaine dernière, six autres hôpitaux de la province ont annoncé l'envoi d'une lettre aux patients opérés à cœur ouvert depuis novembre 2011 pour les informer du risque d'infection. Au total, plus de 23 000 patients, dont des enfants, sont maintenant visés.
L'appareil en cause est un générateur thermique conçu en Allemagne utilisé lors d'opérations à cœur ouvert et qui pourrait avoir été contaminé par la bactérie Mycobacterium chimæra lors de sa fabrication.
L'Institut de cardiologie, qui a été le premier à aviser le public de la situation, a recensé 2 cas d'infection sur près de 8500 patients. Le ministère québécois de la Santé et des Services sociaux assure d'ailleurs que le risque d'infection demeure très faible, variant entre 0,1 et 1 %, selon les Centers for Disease Control et Prevention (CDC) aux États-Unis.
Des appareils toujours utilisés
Le hic, c'est qu'à court terme, les appareils visés continuent d'être utilisés, en raison de problèmes d'approvisionnement.
En effet, le fabricant occupant environ 60 % du marché nord-américain, la situation touche un très grand nombre d'hôpitaux aux États-Unis et au Canada, ce qui retardera le remplacement des appareils.
Pour le docteur Jean Longtin, microbiologiste en chef du Laboratoire de santé publique du Québec et microbiologiste-infectiologue au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Québec, il s'agit d'un moindre mal puisque les risques associés au fait de ne pas être opéré sont nettement plus élevés que le risque d'être infecté par la bactérie, selon lui.
Actuellement, le danger, ce serait effectivement de céder un peu à la panique et de ne plus faire ces chirurgies cardiaques qui sauvent des vies.
Dr Jean Longtin
Le docteur Longtin affirme aussi que, depuis l'été dernier, les hôpitaux québécois ont mis en place une série de mesures pour atténuer le risque de contamination lié à l'utilisation de ces générateurs thermiques, à la suite de directives du fabricant quant à l'entretien et au nettoyage des appareils.
Une affaire qui soulève des inquiétudes
Mais le Conseil pour la protection des malades est loin d'être rassuré et reproche à Québec de ne pas avoir prévu de solution de rechange pour remplacer rapidement les appareils possiblement contaminés.
Le président-directeur général du Conseil, Paul Brunet, souligne aussi le défi de retracer plus de 23 000 patients, dont certains ont été opérés il y a cinq ans déjà.
Pour nous, qui avons tenté de retracer des patients 15 ans après un recours collectif qu'on a pris contre les médecins, on en a retracé à peine 1 %, même pas. [...] Alors peut-être que pour 5 ans, on va monter un peu le pourcentage, mais les gens circulent, les gens déménagent.
Paul Brunet
Outre l'Institut de cardiologie de Montréal, les autres établissements visés sont le Centre hospitalier universitaire de Montréal (CHUM), le Centre universitaire de santé McGill (CUSM), le Centre hospitalier universitaire de Sainte-Justine à Montréal, le CHU de Québec - Université Laval, l'Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec et l'Hôpital de Chicoutimi.
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