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Conchita Wurst, Laverne Cox... Pendant toute l'année 2014, les transgenres ont occupé le devant de la scène

2014, l'année de consécration des transgenres
Austrian singer Conchita Wurst (Thomas Neuwirth) poses for photographers before receiving 'Madrid Orgullo' Award in Madrid, Spain, on Thursday, July 3, 2014. (AP Photo/Abraham Caro Marin)
ASSOCIATED PRESS
Austrian singer Conchita Wurst (Thomas Neuwirth) poses for photographers before receiving 'Madrid Orgullo' Award in Madrid, Spain, on Thursday, July 3, 2014. (AP Photo/Abraham Caro Marin)

Une barbe noire, de longs cheveux lisses, une robe digne d'une princesse. Impossible, cette année, d'être passé à côté de Conchita Wurst. La drag queen dont la voix de diva a été révélée à l'Eurovision sur le titre Rise like a phoenix était au cœur de l'actualité 2014.

Conchita Wurst n'est pas un cas isolé. Car en 2014, comme elle, de nombreuses personnalités, livres, films, diverses actualités ont questionné le genre. Travestis, transsexuels, transgenres, comme le note le site Rolling Stone, c'est simple: cette année, ils étaient partout. Que ce soit à la télé, au cinéma, à la une des médias, ce fut une année capitale pour les transgenres. D'autant que leurs droits ont également évolué.

Conchita Wurst, Laverne Cox... Elles ont fait la une des médias

Le 10 mai 2014, Conchita Wurst remportait l'Eurovision. Une consécration qui annonçait pour celle qui est née sous le nom de Thomas Neuwirth une suite d'événements médiatisés, bien loin des polémiques autrichiennes lorsqu'elle avait annoncé sa candidature. Celle qui s'était fait connaître via le petit écran, après avoir participé à La Nouvelle Star autrichienne, avait en effet dû faire face à un flot d'insultes et une pétition signée par des milliers de personnes, entre autres. Mais sa performance et sa personnalité ont triomphé.

Deux mois après sa victoire, Conchita Wurst défilait pour Jean-Paul Gaultier. Et le mois suivant, on la retrouvait sur des clichés en noir et blanc signés Karl Lagerfeld. En octobre, la chanteuse prêtait sa voix au Parlement européen pour combattre les discriminations.

Quelques jours après la victoire de Conchita Wurst à l'Eurovision, les mentalités allaient de nouveau être bouleversées par une couverture extraordinaire. Le 29 mai, pour la première fois de son histoire, le magazine Time affichait à sa une une personnalité transgenre. Laverne Cox, l'actrice révélée par la série Orange is The New Black - sur le quotidien de femmes en prison - devenue l'un des symboles de la communauté trans' se retrouvait propulsée à la une de ce média, aux côtés du titre “Le point de bascule pour les transgenres”.

Un honneur qui arrivait à point nommé car quelques semaines auparavant, le top 100 des personnes les plus influentes du monde, selon le Time, paraissait, sans qu'elle ne s'y soit faite une place, alors même qu'elle avait reçu de nombreux votes de la part des internautes. Réalisant peut-être son erreur après-coup, le célèbre magazine introduit son interview vidéo en la décrivant comme une "leader du mouvement trans', utilisant sa popularité de plus en plus importante pour défendre l'égalité des droits". Deux mois plus tard, en juillet, l'actrice devenait la première personne transgenre nominée pour les Emmy Awards pour son rôle de Sophia Burset dans la série de Netflix.

Changement de décor et direction le monde de l'entreprise. Début septembre, nous apprenions que le PDG le mieux payé des Etats-Unis n'est autre que Martine Rothblatt, 59 ans, avec 38 millions de dollars de gains en 2013. Aujourd'hui connue pour ses positions transhumanistes, cette diplômée en business et en droit a annoncé son changement de genre dès 1995, et ajouté une lettre à son prénom de naissance, Martin. Elle a fait la une du New York Magazine.

L'année 2014 a également été une année symbolique pour les top model trans'. Le mannequin d'origine serbo-croate Andrej Pejic a fait son coming out en tant que personne transgenre et est devenu Andreja Pejic. Lea T., auparavant égérie de Givenchy, est devenue le nouveau visage de la marque new-yorkaise Redken. Carmen Carrera a été elle l'objet d'une controverse avec ses photos nues pour le David LaChapelle, dans lesquelles elle apparaît avec des attributs féminins et masculins. Une affiche sur laquelle on peut lire "Je suis Adam. Je suis Ève. Je suis moi."

Ils ont été les héros de la littérature et du cinéma

Aux côtés des personnalités, les personnages trans' de romans ou de films ont eux aussi accaparé l'attention.

Tout commence en mars, lorsque Jared Leto remporte l'Oscar du meilleur second rôle masculin pour son rôle de femme trans' atteinte du sida dans le film Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée. Si son discours a ému aux quatre coins de la planète, sa consécration fut toutefois critiquée par la communauté trans, reprochant à Leto de ne pas lui avoir adressé un mot lors de son discours, et estimant notamment que le rôle aurait dû être interprété par une personne elle-même transgenre.

D'autres œuvres culturelles ont exploré la thématique de l'ambiguïté du genre sous le prisme de personnages qui se travestissent. Il ne s'agit donc pas à proprement parler de héros transgenres.

En septembre par exemple, on pouvait découvrir le héros de L'auberge espagnole sous un angle nouveau dans le dernier film de François Ozon, Une nouvelle amie. David, interprété par Romain Duris, est surpris par sa meilleure amie habillé en femme, enfermé chez lui.

9 octobre, parution aux éditions Gallimard de Chéri-Chéri de Philippe Djian. Encore une fois, le héros du livre n'est pas une personne transsexuelle mais un travesti. Denis, la quarantaine, mène sa vie d'écrivain le jour et se travestit la nuit pour boucler ses fins de mois.

Pour couronner le tout, Maura Pfefferman, interprété par Jeffrey Tambor dans la série Transparent, a décroché en fin d'année la sixième place dans le classement des personnages les plus influents de l'année selon le Time.

Bande-annonce de Transparent:

Les droits des trans' ont évolué (un peu)

Cette année, on a pu ressentir un frémissement en ce qui concerne les droits des trans'. La question de la binarité des gens (masculin/féminin) a fait son chemin jusque sur les réseaux sociaux. 52 options d'identité de genre, dont 20 dénominations pour les trans'. C'est la liste proposée par Facebook en février pour ceux qui se considèrent autrement que simplement homme ou femme. On y trouve par exemple "Transgenre", "Homme transgenre", "Femme transgenre", "Personne transgenre", "Transsexuel"... Une avancée symbolique, "un pas en avant dans la reconnaissance des personnes transgenres et en leur permettant de raconter leur vraie histoire avec leurs propres mots", pour Sarah Kate Ellis, présidente du GLAAD, une association américaine qui dénonce les discriminations faites aux personnes LGBT.

Le chemin à parcourir reste encore évidemment bien trop long. Nous pensons notamment à l'assassinat présumé de Jennifer Laude, une femme transgenre de 26 ans, par un marine américain, aux Philippines au mois d'octobre. Les manifestants ont beaucoup fait entendre leur voix, réclamant justice.

Mais la révolution semble bien être en marche. Interrogé par Les Inrocks, Vincent Paolo Villano, directeur de la communication de l'association LGBT National Center for Transgender Equality, explique que, plus que cette visibilité, c'est le changement de discours sur les transgenres qui doit être noté: “Le vrai point déterminant est qu’il y a un changement de storytelling dans les médias, où on a modifié nos perceptions de la question trans. Il y a encore quelques années, les seuls transgenres que vous pouviez voir dans les médias étaient des malades, des victimes de violences, des prostitués. On commence enfin à sortir de ce prisme négatif grâce à des personnes comme Laverne Cox, qui sont des femmes plus indépendantes, qui ont du pouvoir.”

2014, c'est aussi l'année qui aura vu s'ajouter deux nouveaux pays dans la très courte liste de ceux chez qui, dans le droit, trois genres existent. Après l'Allemagne, qui reconnaissait l'an dernier un sexe "indéterminé", l'Inde a cette année reconnu un troisième genre, de même que l'Australie.

Au Kenya, la victoire judiciaire d'une transgenre est annoncée comme un "tournant énorme" par la principale concernée, Audrey Mbugua Ithibu. Celle-ci a réussi à obtenir de nouveaux papiers avec le nom qu'elle souhaitait et ce, sans mention de genre. Dans ce pays qui connaît encore trop les discriminations envers les personnes LGBT, c'est une grande avancée.

En France, on attend toujours une loi sur le changement d'état civil des trans'. La proposition existe mais le calendrier, lui, n'est pas encore au goût du jour. En novembre, une étude du Comité Idaho et du think tank République et Diversité remise à la Mairie de Paris rendait compte de la souffrance des trans' avec quelques chiffres accablants. Notamment, 85% des personnes transgenres ont déjà souffert de transphobie, 20% d’entre eux ont tenté de se suicider, 60% ont fait une dépression. 2015, année des transgenres en France?

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