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Addiction au sucre : comment le sucré s'est imposé dans nos assiettes et met en péril notre santé

Êtes-vous accro au sucre? Faites le test
Elena Schweitzer via Getty Images

Savez-vous résister à ce délicieux gâteau au chocolat en vitrine de la pâtisserie au coin de votre rue? Et à ce paquet de bonbons qu'un collègue de bureau a ramené? Ou cette glace/tarte/biscuit/tartine de confiture qui vous tend les bras? Une bouchée. Une deuxième. Vos papilles s'emballent. C'est tellement bon! D'ailleurs, vous ne passez pas une journée sans vous gratifier d'une petite sucrerie. Et si vous étiez accro au sucre?

Dans "Décrochez du sucre", paru le 20 août 2014 en France quatre ans après une première parution en anglais, un médecin américain, Jacob Teitelbaum dénonce "la dépendance aux sucres". "À l’instar de nombreuses autres substances addictives, écrit-il, le sucre vous apporte une sensation de bien-être durant quelques heures, mais ensuite, il fait des ravages dans votre organisme".

Vous limitez vos verres d'alcool et vos bouffées de cigarette, pourquoi n'en feriez pas de même pour le sucre? Parce que le sucre n'est pas une drogue? Détrompez-vous, le sucre a envahi nos assiettes au fil des années, ses conséquences sur la santé sont multiples.

Le sucre, une drogue dure? Difficile à dire

Ce n'est plus en ces termes qu'il faut raisonner. "Drogue dure, drogue douce, le problème ne se pose plus ainsi aujourd'hui", affirme Jean-Pierre Couteron, addictologue et président de Fédération Addiction contacté par Le HuffPost. "Aujourd'hui on ne parle plus de drogue mais d'addiction", nuance-t-il "et plus précisément de comportement addictif". Il s'agit d'étudier les impacts de la consommation d'une substance, d'une technologie, d'une activité sur le psychique, le physique et le degré de dépendance qu'elle entraîne. Ainsi donc, le sucre entre parfaitement dans cette définition. "Si le sucre perturbe assez peu le psychique, les conséquences d'une consommation régulière sur le physique sont importantes," conclut-il.

À première vue, la consommation excessive de sucre semble bien éloignée de la prise de cocaïne. "Le sucre est lié au plaisir gustatif, la cocaïne, elle, n'a pas de goût, elle va directement se fixer sur une partie du cerveau. D'autre part, la prise de sucre n'entraîne pas une modification de la conscience comme le fait la cocaïne", constate Jean-Pierre Couteron. Si les effets ne sont pas les mêmes, le sucre peut néanmoins entraîner des comportements addictifs. "Il est assez courant de perdre le contrôle sur la quantité de sucre que nous mangeons lorsque nous avons besoin de nous consoler par exemple sur une courte période. Perdre le contrôle tout le temps, cela reste plus rare, mais ça existe", affirme-t-il encore.

Des études controversées sur le sujet

La comparaison sucre et cocaïne a beaucoup intéressée la science. Vous avez peut-être entendu parler de ces rats plus accros aux biscuits Oreo qu'à la cocaïne? Les conclusions d'une étude avaient fait les gros titres de la presse en janvier dernier après qu'une équipe de l'Université du Connecticut eut mené une série d'expériences sur des rats. Le professeur Joseph Schroder avait alors constaté que les rats préféraient les célèbres biscuits bicolores à un shot de morphine ou de cocaïne. Ce travail a ensuite été vivement critiqué par la communauté scientifique non pas vraiment sur les conclusions de l'étude mais sur la façon dont l'étude avait été menée (l'addiction aux biscuits et à l'Oréo n'a jamais été frontalement comparée).

En 2007, une autre étude s'était aussi intéressée à l'addiction au sucre et à la cocaïne. Une équipe bordelaise avait laissé le choix à des rats accros à la cocaïne de s’auto-administrer un shot de cette drogue par voie intraveineuse ou d'avoir accès pendant 20 secondes à une solution de saccharine à 0,2 %. Même en augmentant la quantité de cocaïne, les rats avaient en majorité préféré la solution de saccharine. Preuve que le sucre semble avoir un potentiel addictif bien plus important que la cocaïne.

Le sucre nous est indispensable...

Amateur de sucré ou non, tous les êtres humains ont besoin du sucre pour vivre. Impossible de s'en passer, le glucose est indispensable au bon fonctionnement de notre organisme, il est le carburant de nos cellules. Lorsque l'on consomme du sucre, en mangeant un gâteau par exemple, on ingère du saccharose (une alliance de glucose et de fructose). Dans notre organisme, le glucose et le fructose se séparent. Le premier va alimenter nos cellules, comme celles d'un muscle par exemple. Ce qui n'est pas consommé par les cellules est stocké dans le foie. Une partie du fructose répond aussi aux besoins en énergie, le reste est stocké dans l'organisme sous forme de graisse. Sans sucre donc, pas d'énergie. Mais comme le montre l'exemple du fructose et du glucose, tous les sucres n'ont pas le même effet sur l'organisme.

... Mais on ne se rend pas compte de la quantité de sucre que l'on mange

Le problème comme souvent dans notre alimentation n'est pas le sucre en lui-même mais la quantité que l'on ingère. Sur ce point, Français et Américains ne sont pas sur un pied d'égalité. Jacob Teitelbaum, lorsqu'il écrit son livre, s'adresse à un public d'Américains dans une nation où le sucre règne en maître. Ces derniers en consomment en effet bien plus que les Français. Mais ne crions pas victoire trop vite, nous mangeons, nous aussi, de plus en plus de sucre (deux fois plus de sucre qu’il y a quinze ans). Et surtout, 80% de ce sucre se trouve dans les produits préparés que nous achetons dans les supermarchés comme les biscuits, les yaourts ou encore la charcuterie.

L'article se poursuit sous le diaporama :

La charcuterie

Ces produits salés (mais aussi sucrés)

Pourquoi? Le sucre c'est le goût. Voilà une maxime que les industriels ont bien compris. Un produit sucré aura plus de goût qu'un produit non sucré. L'exemple de l'alcool est évident : "L'alcool a besoin de sucre pour être consommé, cela le rend plus agréable en particulier chez les personnes comme les jeunes qui n'aimeront pas son amertume", affirme Jean-Pierre Couteron.

Pour accentuer le goût sucré, le fructose (le sucre contenu dans les fruits) sous forme de sirop de maïs est souvent utilisé. "Les fruits ne nous fournissent pas plus de 20 à 30 grammes de fructose par jour, expliquait en 2012 au Monde Serge Halimi, le chef du service de diabétologie, endocrinologie et nutrition du CHU de Grenoble. Mais les sirops utilisés dans l'industrie peuvent en apporter jusqu'à 150 grammes au quotidien. Cet apport massif provoque le syndrome métabolique qui associe stockage de graisse dans le foie, hypertension artérielle, diabète et risque cardio-vasculaire, surtout chez des individus prédisposés."

Autre bon point pour le sucre du point de vue de l'industrie, il conserve les aliments et son coût est assez modéré.

On a chassé le gras et laissé le sucre prendre de la place

Aussi sucré et agréable soit-il, le sucre en trop grande quantité peut donc avoir de graves conséquences sur la santé. En février 2012, trois scientifiques de l'Université de Californie ont publié dans la prestigieuse revue Natureune mise en garde contre la consommation excessive de sucre la comparant à l'alcool et au tabac. Robert Lustig, Laura Schmidt et Claire Brindis affirmaient alors que "le fructose exerce sur le foie des effets toxiques similaires à ceux de l'alcool". Ils faisaient le lien entre le sucre et le développement de maladies comme le diabète, l'obésité, les maladies cardio-vasculaires et mêmes certains cancers.

Jacob Teitelbaum va plus loin. Fatigue chronique, sinusite chronique, syndrome de l'intestin irritable ou encore trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité sont à mettre au crédit d'un excès de sucre selon lui. Lui-même a souffert du syndrome de fatigue chronique pendant ses études de médecine. Ses recherches sur cette maladie l'ont conduit à s'intéresser au sucre et à se définir comme un "sugar-addict".

Les recherches sur le sucre sont à rapprocher de celles sur les matières grasses. Depuis quelques années, des voix s'élèvent pour contester un des principes fondateurs de la nutrition moderne. Non, le gras n'est pas aussi néfaste qu'on voudrait nous le faire croire. À trop vouloir le limiter, voire l'exclure de notre alimentation, nous avons oublié de faire attention aux sucres, voire nous avons remplacé le gras par le sucre. Une étude publiée en avril 2014 montre que les sucres ajoutés (dans les boissons, dans les gâteaux, dans les produits laitiers etc) augmentent les chances de développer une maladie cardio-vasculaire, un risque supérieur à celui dû à une consommation de matières grasses.

Une solution? Limiter sa consommation évidemment mais aussi savoir apprécier les "sucres-sucrés" et les garder pour le dessert. Apprenez aussi à scruter les étiquettes, les produits où le sucre apparaît dans les trois premiers ingrédients sont évidemment à éviter.

Les quatre types d'addiction au sucre selon le docteur Teitelbaum

Dans son livre Jacob Teitelbaum distingue quatre types d'addiction au sucre. Pour chacun d'entre eux il a imaginé un questionnaire. Nous reproduisons ci-dessous quelques unes des questions de ces tests pour les trois premiers, le quatrième et dernier type d'addiction étant plus compliqué à déterminer :

Type 1 - Les sucres, usuriers de l’énergie : vous êtes épuisé de façon chronique et accro aux recharges instantanées de caféine et de sucre

Quand la fatigue quotidienne engendre des envies compulsives de caféine et de sucres, il suffit parfois d’améliorer son alimentation, son sommeil et l’exercice physique pour en venir à bout. Lorsque votre énergie augmentera, vous n’aurez plus besoin de ces coups de fouet énergétiques qu’apportent sucres et caféine.

Vous sentez-vous fatigué la majeure partie du temps?

Avez-vous impérativement besoin de café pour commencer votre journée?

Avez-vous des chutes brutales de tonus en milieu d'après-midi?

Vous arrive-t-il de souffrir d'insomnie?

Souffrez-vous d'indigestion?

Type 2 - "Nourris-moi tout de suite, ou je te mords" : Lorsque le stress quotidien a épuisé vos glandes surrénales

Ceux d’entre vous qui sont irritables ou qui s’écroulent sous la pression du stress doivent traiter l’épuisement de leurs surrénales.

Avez-vous souvent soif ou besoin d'uriner?

Avez-vous souvent la gorge irritée ou des ganglions enflés?

Avez-vous le sentiment que la vie est une crise permanente?

Appréciez-vous cette vague d'énergie que vous ressentez lorsque vous êtes dans une situation tendue?

Avez-vous parfois la tête qui tourne lorsque vous vous levez?

Type 3 : Le chasseur chevronné de génoises au chocolat : des compulsions pour les sucres provoquées par des proliférations de levures (Candida)

Ceux d’entre vous qui souffrent de congestion nasale chronique, de sinusites, d’un syndrome de l’intestin irritable, devront impérativement traiter les proliférations de levures.

Souffrez-vous de sinusite ou de congestion nasale chronique?

Souffrez-vous du syndrome de l'intestin irritable (gaz, ballonnement, diarrhée et/ou constipation)?

Avez-vous reçu un traitement antiacnéique à base de téracycline, érythromycine ou autres antibiotiques durant un mois ou plus?

Avez-vous reçu un traitement antibiotique (quel qu’il soit) de plus de deux mois consécutifs, ou plus court mais plus de trois fois dans l’année?

Souffrez-vous du syndrome de fatigue chronique ou de fibromyalgie ?

Type 4 : Déprimé et éprouvant des envies compulsives de sucres : les compulsions engendrées par les règles,

la ménopause, l’andropause

Pour les femmes qui se sentent moins bien au moment de leurs règles ou dont les problèmes se sont aggravés lorsqu’elles sont entrées dans la période de la périménopause une fois la quarantaine arrivée, la déficience en oestrogènes ou en progestérone peut être à l’origine de leurs compulsions pour les sucres. On peut en trouver un signe évocateur dans le syndrome prémenstruel (SPM, associé à une carence en progestérone) de la femme plus jeune, avec des manifestations de grande irritabilité au moment des règles. Parvenue à 45 ans environ, une carence en oestrogène ou en progestérone engendre très souvent des envies compulsives de sucres, de la fatigue, des sautes d’humeur, des insomnies au moment des règles, en plus d’une lubrification vaginale insuffisante.

Dans le cas des hommes, une baisse de la production de testostérone au moment de l’andropause peut également se solder par des envies compulsives de sucres, ou d’autres problèmes sérieux. La dépression, une baisse de la libido et de la fonction érectile, l’hypertension, une prise de poids, le diabète ou l’hypercholestérolémie peuvent laisser soupçonner une déficience en testostérone. De façon très intéressante, une supplémentation par de la testostérone bio-identique (sur ordonnance) a prouvé son utilité vis-à-vis de tous ces problèmes.

Les dosages standards de laboratoire utilisés pour évaluer ces déficiences hormonales ne révéleront les problèmes que lorsqu’ils deviendront sévères, laissant parfois des gens en situation de déficience durant des décennies. Éliminer l’addiction aux sucres et les autres problèmes générés par une baisse des différentes hormones sexuelles est essentiel.

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