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Pakistan: les manifestants bloquent l'accès au parlement

Pakistan: les manifestants bloquent l'accès au parlement

Des milliers de partisans des opposants pakistanais Imran Khan et Tahir ul-Qadri bloquaient mercredi l'accès au parlement pour exiger la démission du Premier ministre Nawaz Sharif, plongé dans une crise sans précédent depuis son retour au pouvoir.

Les manifestants, réunis depuis vendredi soir près du centre de la capitale, ont pénétré sur le coup de minuit mercredi dans la "zone rouge", secteur stratégique qui abrite le Parlement, la résidence du Premier ministre et les principales ambassades.

Le gouvernement avait pourtant barricadé le secteur à l'aide de conteneurs géants et transféré le contrôlé de cette zone à l'armée.

Mais Imran Khan, ex-star du cricket au look de playboy rebelle reconverti dans la politique, et son acolyte Tahir ul-Qadri, chef politico-religieux qui compte un noyau durs de dévots, ont loué deux grues mobiles pour déplacer les conteneurs. Et les autorités ont joué l'apaisement.

Résultat, les manifestants ont glissé dans la "zone rouge" comme un couteau dans du beurre. Sans heurts, sans violence, sans résistance aucune des forces de sécurité.

Mercredi en fin de journée, des milliers d'entre eux bloquaient les principaux points d'entrée au Parlement, après une courte session en chambre au cours de laquelle le Premier ministre Sharif a fait une apparition sans prendre la parole.

Dans un coup de poker pour prendre le pouvoir, l'opposant Imran Khan a appelé à marcher sur la résidence du Premier ministre Sharif si ce dernier ne démissionnait pas d'ici la fin de la journée.

"La pression publique est très forte. Si dieu le veut, le chef de l'armée va dire à Nawaz et son frère Shahbaz (ministre en chef de la province du Penjab) de dégager", lance Basharat, 35 ans, partisan du Parti de la Justice (PTI) d'Imran Khan.

Hors le sit-in devant le parlement, les appuis politiques de MM. Khan et Qadri demeurent limités, l'ensemble de la classe politique et les milieux d'affaire ayant pris leur distance avec la contestation.

Et la Cour suprême a ordonné mercredi aux deux opposants de comparaître afin de s'expliquer sur leur démarche.

Pour l'instant, la puissante armée a appelé au dialogue afin de dénouer la crise qui paralyse la capitale depuis près d'une semaine.

"La situation nécessite de la patience, de la sagesse, et de la sagacité de la part de toutes les parties pour mettre un terme à l'impasse actuelle via un dialogue profond qui est dans l'intérêt de la nation", a ainsi déclaré mercredi son porte-parole, le général Asim Bajwa.

Mais dans un pays qui a connu trois coups d'Etat depuis son indépendance en 1947, où l'équilibre entre le pouvoir civil et la puissante armée demeure encore source de conjectures constantes, les doutes persistent sur le rôle de l'armée dans cette crise.

"Les militaires ont testé Nawaz Sharif à trois reprises et ils sont déçus. Alors pourquoi, le laisseraient-ils exister cette fois", s'interroge l'analyste militaire Ayesha Siddiqua.

Nawaz Sharif a été élu Premier ministre pour la troisième fois de sa vie lors des élections législatives de mai 2013 que ces rivaux Khan et Qadri estiment être truffées de fraudes malgré la validation des résultats par des observateurs internationaux.

En 1999, lors de son deuxième mandat, Sharif avait été renversé par Pervez Musharraf, aujourd'hui accusé de "haute trahison" par un tribunal mis sur pied par son gouvernement, une première dans l'histoire du pays pour un ex-général.

Outre l'affaire Musharraf, l'armée demeure réticente à un rapprochement avec l'Inde voisine et reprocherait à Nawaz Sharif d'avoir trop attendu pour lancer, à la mi-juin, une offensive contre les fiefs talibans dans la zone tribale du Waziristan du Nord, frontalière de l'Afghanistan.

Selon certains commentateurs, Imran Khan et Tahir ul-Qadri jouent ainsi le jeu de l'armée, ou du moins d'une partie des services de renseignement, afin d'accroître la pression sur le pouvoir civil.

En laissant les manifestants entrer dans la zone rouge, l'armée a-t-elle simplement voulu accroître la pression sur Sharif et forcer le dialogue à son avantage? Ou concocte-t-elle un autre plan?

"Ils (Khan et Qadri) tentent de pousser l'armée à intervenir mais elle est très réticente malgré ses désaccords avec Nawaz Sharif", soutient auprès de l'AFP Hamid Gul, ancien chef des services de renseignement pakistanais (ISI).

Mais à la fois si Nawaz Sharif veut rester au pouvoir "il n'a pas d'autres choix" que d'écouter l'armée pour sortir de la crise, dit-il.

gl-sjd/fw

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