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A la gare routière de Donetsk, les civils fuient les combats

A la gare routière de Donetsk, les civils fuient les combats

"Que tous ces gens qui disent être venus nous sauver s'en aillent !". Très en colère, Svetlana fuit les bombardements, comme de nombreux autres civils qui se pressaient mercredi à la gare routière de Donetsk, un bastion de l'insurrection prorusse cerné par l'armée ukrainienne.

Celui qui reste, c'est Andreï, un rebelle de 46 ans, kalachnikov en bandoulière, qui se dit tsariste et affiche sur son uniforme fatigué les couleurs jaune et noire du drapeau impérial.

S'il s'est aussi rendu à la gare routière Pivdenny d'où partent des minibus Etalon à bout de course et bondés, c'est pour envoyer de l'insuline à sa belle-mère à Kostiantynivka, sa ville, plus au nord, sous le contrôle des forces loyalistes. "Nous les avons tués à Snijné (à l'est de Donetsk, où d'intenses combats ont eu lieu), nous les tuerons ici aussi", s'exclame, sans donner son nom de famille, cet ouvrier du bâtiment, certain de la victoire face à l'"occupant".

Donetsk, symbole avec Lougansk de la rébellion prorusse, comptait un million d'habitants avant le conflit. Impossible de dire combien ils sont aujourd'hui. Beaucoup se terrent, d'autres fuient. Les rues du centre sont désertes.

Si la municipalité a annoncé le rétablissement de la ligne électrique alimentant l'usine de traitement, l'eau manque toujours dans certains secteurs. Mais surtout, les affrontements ne faiblissent pas, comme en témoignent les éclats de balles autour d'une fenêtre à deux pas de la place Lénine et de l'avenue principale de la ville, la rue Artema, où les commerces ont rideaux tirés.

Les bombardements au mortier et au lance-roquettes multiple Grad, touchent des zones d'habitation, sans qu'il soit toujours possible d'établir avec certitude d'où partent les tirs. Depuis leur intensification il y a quelques jours, les combats ont fait plus de trente morts en 24 heures dans la région de Donetsk, selon l'administration locale.

"Ca bombarde, ça tire. Cette nuit, on n'a vraiment pas dormi. C'était insupportable, terrible. Juste derrière nous, une maison a été détruite. On a décidé de partir une semaine pour s'éloigner de tout ça", raconte à la gare routière Natacha, 50 ans, qui ne donne pas non plus son nom de famille, aux côtés de sa fille en larmes.

Depuis mardi, la ville industrielle de Makiïvka, à une vingtaine de kilomètres à l'est de Donetsk, est particulièrement touchée. Sa chute équivaudrait à l'encerclement total de Donetsk par l'armée loyaliste.

"Il y a des combats, beaucoup de tirs, très près", raconte Maxime, un ouvrier d'une trentaine d'années présent à la gare routière pour y accompagner sa femme Kateryna et leur fille Sofia qui partent se mettre à l'abri à Artemivsk, une centaine de kilomètres au nord. Lui retourne à Makiïvka : "Je dois travailler, je dois nourrir ma famille."

Malgré les obus qui tombaient toujours sur la ville mercredi. Dans le quartier de Tcheremouchki, un bruit d'explosion proche entraîne une nouvelle ruée vers les caves d'immeubles transformées en abris où s'entassent des dizaines d'habitants, sans eau, sans électricité ni gaz.

Une femme montre un obus n'ayant pas explosé tombé au milieu des immeubles, une autre présente les éclats de shrapnel qu'elle a ramassés, une troisième désigne un cratère à quelques mètres d'une aire de jeux d'enfants et d'une conduite de gaz, tandis que les vitres des immeubles sont brisées.

"Ce sont des salauds. Nous sommes chez nous et ils nous bombardent. Quand cela va-t-il s'arrêter ? Et où pouvons-nous aller ?", dit Maria Semionovna, 81 ans, qui ne touche plus sa pension de retraite de 1.100 hryvnias (65 euros) et rend Kiev responsable de ses maux.

A la gare routière Pivdenny, la quinquagénaire Svetlana a un message à adresser à Moscou. "Nous demandons ceci à la Russie : ce n'est pas la peine de venir ici les gars. On se débrouille seuls".

A quelques mètres, Andreï, le rebelle tsariste de Kostiantynivka, s'engouffre avec deux de ses camarades dans une Lada bleue hors d'âge pour une destination qu'il ne précisera pas : "Je me suis battu et je continuerai à le faire."

ng/neo/bds

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