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La bataille du nord syrien, une question de vie ou de mort pour les rebelles

La bataille du nord syrien, une question de vie ou de mort pour les rebelles

La rébellion syrienne soutenue par les Occidentaux joue sa propre survie face à l'avancée à la fois des jihadistes et des troupes de Bachar al-Assad vers ses bastions dans la région septentrionale d'Alep, selon analystes et opposants.

Devant cette double menace, l'opposition syrienne a tiré la sonnette d'alarme, appelant indirectement la communauté internationale à mener des frappes aériennes contre les jihadistes de l'Etat islamique (EI) comme le fait Washington en Irak.

"Plus que jamais, la rébellion est prise en tenaille entre le régime et l'EI", affirme Karim Bitar, directeur de recherche à l'Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS).

"Il y a aujourd'hui un vrai risque qu'elle vienne rapidement à manquer de l'oxygène nécessaire à sa survie", estime ce spécialiste du Proche et Moyen-Orient.

L'EI, groupe ultra-radical qui sème la terreur en Syrie et en Irak, où il contrôle de larges pans de territoires, mène depuis mercredi une offensive éclair dans la province d'Alep, principal bastion des rebelles, pour couper leur route d'approvisionnement à partir de la Turquie voisine.

Samedi, ces jihadistes impitoyables, qui décapitent, crucifient et lapident leurs ennemis, ont annoncé leur "détermination à libérer la province septentrionale (d'Alep) et à en chasser les rebelles".

En trois jours, ils ont pris une dizaine de villages et localités et menacent maintenant les deux principaux bastions de la rébellion, Marea et Azaz, que les rebelles défendaient toujours dimanche.

Parallèlement, l'armée syrienne resserre son étau sur la périphérie nord de la ville d'Alep, menaçant d'asphyxier les quartiers est tenus par les insurgés.

"La rébellion en Syrie est à un tournant, même si la situation à Alep peut traîner pendant des mois", explique à l'AFP Aron Lund, spécialiste de la rébellion syrienne.

Si les forces loyalistes parviennent à reprendre la ville d'Alep, "Assad contrôlera la grande majorité de ce qu'on appelle la +Syrie utile+", avec "la capitale Damas, Alep, la côte, Homs (centre, ndlr), Hama (centre) ainsi que la frontière libanaise", selon M. Lund.

"La situation est très grave", juge de son côté le colonel rebelle Abdel Jabbar al-Oqaidi, un des principaux officiers ayant lancé à l'été 2012 la bataille d'Alep, divisée depuis entre régime et rebelles.

Une perte de la province "signifierait une perte du principal réservoir humain" de la rébellion, explique cet officier contacté via internet.

"Si l'EI réussit à couper les approvisionnements des rebelles à partir de la Turquie (...), toute la rébellion à l'intérieur de la Syrie sera complètement isolée", renchérit Samir Nachar, membre de la Coalition nationale syrienne, l'opposition en exil.

Celle-ci a appelé samedi les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, à intervenir en Syrie "de la même manière qu'ils le font dans le Kurdistan irakien" contre l'EI, estimant que "l'ennemi est le même".

La guerre en Syrie, qui a tué plus de 170.000 personnes, a commencé avec la répression en 2011 de manifestations pacifiques anti-régime, provoquant une insurrection armée contre le pouvoir de Bachar al-Assad.

Le conflit est ensuite devenu multiforme avec la montée en puissance de groupes étrangers, dont le Front al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, et les ultra-radicaux de l'EI. La rébellion dite modérée a été affaiblie par les querelles intestines et les rivalités entre ses principaux parrains, l'Arabie saoudite et le Qatar.

Malgré leur soutien à la rébellion, les Occidentaux ont refusé de lui fournir des armes, arguant qu'elles pourraient tomber aux mains d'extrémistes.

En voyant les Américains frapper l'EI en Irak depuis une dizaine de jours, rebelles et opposants syriens ne cachent pas leur amertume.

"Il y a un sentiment de colère car, depuis trois ans, le régime syrien massacre le peuple et commet des crimes contre l'humanité. Et le monde est resté les bras croisés", s'indigne le colonel Oqaidi.

"L'hésitation de la communauté internationale à mener des frappes en Syrie va pousser beaucoup d'insurgés à se jeter dans les bras de l'EI", met en garde M. Nachar.

D'après les analystes, un scénario à l'irakienne en Syrie reste incertain.

Washington considère que "la crise syrienne ne fait pas peser de menaces sur les intérêts vitaux des Etats-Unis", selon M. Bitar.

Pour Aron Lund, tout dépendra de ce que veut l'administration Obama: contenir l'EI uniquement en Irak ou détruire complètement le groupe.

M. Nachar signale que Washington a été "informé du danger que représente la situation à Alep". Mais "aucune réponse n'est encore parvenue".

ram/emb

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