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En Corée du Nord, les catholiques muselés dans "l'Eglise du silence"

En Corée du Nord, les catholiques muselés dans "l'Eglise du silence"

Le pape doit célébrer à Séoul une messe pour la réconciliation intercoréenne, mais son message devrait laisser froide la Corée du Nord, où la religion et le catholicisme en particulier sont soumis à des contrôles draconiens et à des persécutions

François célèbrera une "messe pour la paix et la réconciliation" sur la péninsule coréenne en la cathédrale de Myeong-dong à Séoul, le 18 août, au cinquième et dernier jour de sa visite en Corée du Sud.

Certains avaient espéré qu'il fasse un geste spectaculaire en se rendant à la frontière avec la Corée du Nord, comme il l'avait fait à Bethléem fin mai en se recueillant devant le mur de séparation.

Mais selon son entourage un tel projet n'est pas prévu.

Les autorités de Pyongyang ont par ailleurs refusé que des catholiques nord-coréens viennent rencontrer le pape, même s'ils restent invités par l'Eglise sud-coréenne.

Si le catholicisme a prospéré au Sud depuis la fin de la guerre de Corée (1950-53), il reste confidentiel au Nord.

La liberté de religion est inscrite dans la Constitution nord-coréenne mais elle n'est que théorique, et la pratique religieuse ne peut s'effectuer qu'au sein de la très officielle Association des catholiques (nord-)coréens (KCA), qui revendique 3.000 membres. L'ONU les estime à 800.

Selon un récent rapport de la Commission de l'ONU sur la situation des droits de l'Homme dans l'Etat communiste, les chrétiens pratiquant leur foi en dehors de l'association officielle s'exposent à des persécutions pour "crime politique".

"Un semblant de tolérance religieuse est maintenu pour faire bonne figure à l'international alors que, à l'intérieur des frontières, les activités religieuses sont réprimées", notait le document.

Le séjour papal devrait coïncider avec une inflation d'invectives du Nord vers le Sud, Séoul refusant -- comme toujours -- d'annuler des manoeuvres militaires annuelles avec les Etats-Unis.

Surnommée "l'Eglise du silence" par les catholiques sud-coréens, la KCA n'entretient aucune relation avec le Vatican.

"Il n'y a pas un seul prêtre exerçant son ministère dans toute la Corée du Nord, pas même au sein de l'Eglise officielle", affirme Gerard Hammond, un prêtre américain résidant en Corée du Sud et actif dans des projets avec le Nord depuis plus de 15 ans.

La capitale Pyongyang possède une église catholique, "mais il ne s'y tient ni confession, ni baptêmes, ni sacrements", selon lui.

Un laïc nord-coréen s'occupe de l'église, avec quelques anciens, et les bancs sont majoritairement fréquentés par des "femmes à crêpe noir", probablement recrutées par les autorités.

"Nul ne sait qui est catholique et qui ne l'est pas. Il est improbable que les Nord-Coréens qui assistent aux offices soient de vrais catholiques", estime le prêtre, ajoutant que contrairement à ce qui se passe en Chine, il n'existe pas d'Eglise clandestine en Corée du Nord.

"Tout le monde dénonce tout le monde, les risques seraient très importants", rappelle Gerard Hammond.

Au début du 20e siècle, Pyongyang était pourtant un haut-lieu de mission et la communauté chrétienne florissante valait à la ville le nom de "Jérusalem de l'Est".

"Les Nord-Coréens l'ignorent, mais la plupart des fondateurs du mouvement communiste nord-coréen comme Kim Il-Sung (fondateur de la République populaire démocratique de Corée, NDLR) étaient les fils et filles de fidèles protestants ou catholiques", souligne Andrei Lankov, spécialiste de la Corée du Nord.

Le régime communiste "est très conscient de l'influence de la religion et du rôle de l'Eglise, en Pologne, dans la chute du communiste", relève Gerard Hammond.

Peu d'experts prédisent des changements significatifs à court terme pour la liberté de culte en Corée du Nord, à moins d'une implosion du régime.

jhw-ms/gh/gab/mf

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