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A Donetsk, les mères donnent naissance sous les obus

A Donetsk, les mères donnent naissance sous les obus

Larissa serre contre sa poitrine sa fille Eva, un nourrisson encore enroulé dans un enchevêtrement de couvertures auquel elle a donné naissance en plein bombardement dans une maternité de Donetsk, bastion des insurgés prorusses dans l'est de l'Ukraine.

La fille et sa mère sont assises dimanche parmi les douzaines de femmes sur les bancs disséminés dans les couloirs de la cave de la maternité, alors que les obus pleuvent sur la ville encerclée par l'armée ukrainienne. Certaines sont enceintes, d'autres tiennent dans leurs bras leurs nouveaux-nés.

"J'ai donné naissance le 7 (août) ici même dans ce couloir", raconte Larissa, vêtue d'un pyjama orné de coeurs, tandis que sa mère offre une bouteille de lait au nourrisson assoupi.

"Chaque fois que le bébé se calme, nous devons retourner ici de nouveau. Je n'arrive pas à croire que nous en soyons arrivé là: donner naissance dans une cave", s'emporte sa mère, Ekaterina Petrovna, les larmes aux yeux.

"Pourquoi devons nous subir cela? A attendre notre propre mort? Personne ne nous entend", poursuit-elle, alors que des médecins transportent en hâte un nouveau-né, masque à oxygène sur le visage.

"Nous avons déjà eu trois naissances dans la cave, dont une ce matin même. La mère et le bébé vont bien", raconte pour sa part la vice-directrice générale de l'hôpital dont dépend la maternité, Marina Ovsianik.

L'hôpital utilisait jusqu'ici sa cave pour conserver du matériel médical stérilisé, mais "depuis le début de la guerre, nous l'utilisons comme un endroit où nous pouvons poursuivre notre travail de manière temporaire", ajoute-t-elle en montrant des salles remplies d'équipement moderne.

Les habitants de Donetsk, fief séparatiste dans l'est de l'Ukraine, ont en effet été réveillés dimanche par des vagues régulières de tirs d'artillerie, qui se sont poursuivis toute la matinée, alors que les violents combats se rapprochent chaque jour du coeur de la ville.

Les patients, en état de choc et en colère, expliquent comment ils ont dû descendre sous terre à de nombreuses reprises pour se protéger des chutes permanentes d'obus.

"C'est la quatrième fois que nous descendons ici", raconte Irina, une habitante de la banlieue de Donetsk qui a donné naissance vendredi au cours d'une pause dans les bombardements.

"Je n'étais pas effrayée du tout. Je pensais simplement à la naissance", ajoute-t-elle.

"Aujourd'hui, nous nous en allons, nous allons rester dans la cave à la maison", tranche Lioubov, sa mère, en tenant dans ses bras sa petite-fille Kira, enveloppée dans un vêtement orné de petits hérissons.

Aux étages supérieurs, des obus ont brisé les vitres et plombé de shrapnel les murs de cette maternité, la plus grande de la région de Donetsk, bastion que l'armée ukrainienne tente de reprendre depuis plusieurs semaines aux insurgés prorusses.

"Apparemment, nous sommes dans une maternité pour séparatistes", lance ironiquement l'anesthésiste Dmytro Bessonov.

"Nous sommes des médecins. Nous ne sommes dans aucun camp, nous sommes pour la paix", ajoute-t-il.

La maternité, qui dépend de l'hôpital public Vichnevski, n'est qu'à quelques centaines de mètres du bâtiment du service de chirurgie maxillo-faciale, fortement endommagé par les bombardements.

La pièce centrale apparaît avoir été visée à dessein, étant située non loin du quartier général des services de sécurité ukrainiens, occupé par les rebelles prorusses.

Les femmes sont "dans un esprit de combat" et il n'y a "aucune panique", affirme M. Bessonov, qui en est à sa quatrième journée de travail d'affilée à l'hôpital, alors que de nombreux employés ont fui la région.

L'établissement ne peut désormais plus accueillir qu'une cinquantaine de patients, contre 400 avant le début des affrontements.

L'hôpital est également équipé d'un vaste et profond abri antiaérien datant de l'époque soviétique, qui contient des lits de camp, un générateur électrique et des bidons d'eau potable.

"Si les bombardements s'intensifient, nous serons forcés d'aller y trouver refuge", assure Mme Ovsianik.

am-pop/neo/plh

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