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Mexique: les portes du foyer de "Mama Rosa" s'ouvrent sur un monde de peur et de châtiments

Mexique: les portes du foyer de "Mama Rosa" s'ouvrent sur un monde de peur et de châtiments

Jusqu'à la vaste entrée colorée, tout semble normal dans le foyer pour jeunes "La Grande Famille": des peintures murales égaient le terrain de basket donnant sur une porte métallique jusqu'alors infranchissable et qui cachait un monde de peur et de châtiments décrit par des internes.

Une odeur fétide, mélange de nourriture pourrie, de défécations et d'urine, prend à la gorge les journalistes qui entrent dans cet internat de Zamora, à l'ouest du Mexique, que le gouvernement a placé sous son contrôle après des dénonciations de mauvais traitement et de rétention forcée d'enfants.

L'odeur n'était apparemment qu'un moindre mal par rapport aux souffrances rapportés par certains des 600 internes, dont plus de 400 mineurs, vivant dans cette institution jusque là à la réputation prestigieuse.

Certains des enfants affirment que la directrice et fondatrice de l'internat, Rosa del Carmen Verduzco -connue comme "Mamá Rosa"-, aujourd'hui âgée de 80 ans, et plusieurs employés infligeaient des coups et des semaines sans nourriture aux enfants qui cachaient de l'argent envoyé par leurs proches ou tentaient de s'échapper.

Ramon, un adolescent orphelin de 15 ans, raconte que l'un des pires châtiments de "La chef" était "d'enfermer les enfants sans nourriture dans le Pinocchio", une minuscule pièce obscure de moins de deux mètres carrés, ainsi nommée en raison de la fresque de l'enfant marionnette peinte sur le mur.

Les coups et les menaces de Mama Rosa, une femme au fort caractère, à la voix rauque et au langage rude, créaient un climat de peur parmi les jeunes qui décrivent un monde de calamités, dont rien n'a percé pendant des années.

"Quand je suis tombée enceinte, on m'a envoyé nettoyer les toilette, on m'a battue. Et une de mes camarades a été violentée par un des employés. Il y a eu beaucoup d'injustice ici", dit à l'AFP Cecilia Vázquez, une jeune de la région du Chiapas (sud-est), âgée de 19 ans et qui tient dans ses bras un bébé né au sein du foyer.

Maintenant sous la garde de dizaines de policiers et de militaires, la cour centrale crasseuse fait aussi office de décharge des produits périmés et d'objets hors d'usage. Cela n'empêche pas des enfants de tous âges d'y courir, de jouer au football et de jouer des instruments de musique auxquels ils ont été formés au foyer.

Filles et garçons dorment séparément dans des chambres collectives, sur des couchettes sales séparées par des barreaux. Les téléphones cellulaires étaient interdits et les visites des parents et des proches réduites à une tous les quatre mois.

"Comment vous traitait Mama Rosa?, demande aux enfants le fonctionnaire judiciaire chargée de la visite guidée des journalistes. "Mal!", répondent en choeur les enfants présents.

Certaines fillettes, comme Teresita del Niño Jesus Verduzco -le nom de famille de la directrice imposé dans le foyer aux orphelins et aux nouveaux nés-, n'ont pas eu d'autre contact avec l'extérieur que la dizaine de sorties effectuées dans le pays pour des concerts du groupe musical constitué dans le centre.

"Je ne sais rien du dehors, mais je voudrais sortir parce que je veux apprendre plus sur la vie et qu'on peut avancer en étudiant", explique Teresita, les larmes aux yeux. Cette belle adolescente est née dans le foyer il y a seize ans, d'une mère sourde et muette.

Il y a aussi ceux qui défendent la directrice. Sandra, une femme de 43 ans abandonnée quand elle étaient bébé à la porte d'une boulangerie à Mexico et qui a passé 27 ans au foyer, dit qu'elle sera éternellement reconnaissante à "Mama Rosa", parce qu'elle lui a "donné la vie".

"Mama Rosa m'a donné ce que la mère qui m'a engendrée n'a jamais fait. Sans elle je n'ai pas où aller, ni famille, ni rien".

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