Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Guerre de Gaza: deux ennemis, un seul Mondial

Guerre de Gaza: deux ennemis, un seul Mondial

Un cri de désespoir monte du kibboutz Mefalsim, tout près de la bande de Gaza. Ce n'est pas une roquette, non, c'est l'Allemagne qui vient de marquer.

Jusqu'à cette 113e minute fatale, plusieurs dizaines d'habitants de Mefalsim ont fait la fête dimanche soir pour encourager l'équipe d'Argentine, pays d'où viennent la majorité de ces kibboutzniks.

Sur la pelouse de la famille Schwartzberg, un écran géant avait été installé pour permettre de regarder ensemble la finale du Mondial.

Saucisses chorizo, maïs grillés, bières et fruits frais avaient été préparés pour ce moment de pause entre les nombreuses sirènes d'alerte qui retentissent quotidiennement depuis des jours.

Cacho Schwartzberg, 64 ans, voulait voir l'Argentine gagner car s'il est Israélien depuis 1986 -- l'année où l'Argentine a gagné la coupe du Monde --, ce natif d'Argentine se dit "argentin ce soir".

"Le foot coule dans mes veines et ce soir, je veux voir la victoire comme au temps de Maradona", s'enthousiasme-t-il.

Autour de lui, des jeunes nés au kibboutz de parents argentins chantent en espagnol pour soutenir leur équipe.

"Ce soir, on ne pense pas aux roquettes, on fait la fête", se réjouit Gilad, 23 ans, qui se dit "totalement dingue de foot".

Il porte un maillot bleu et blanc argentin, comme la plupart des convives.

En dehors des habitants du kibboutz, quelques soldats venus suivre le match sont invités à partager le barbecue.

Dans le ciel, résonnent des bruits d'explosion: ce sont les raids israéliens sur la bande de Gaza, qui ne semblent pas déranger les supporters.

"C'est une tragédie ce qui se passe à Gaza mais ce soir on ne veut pas y penser", reconnaît Cacho.

"Ca fait 7 ans (2007, la prise du pouvoir du Hamas à Gaza) qu'on vit sous la menace des roquettes alors on s'habitue", lâche-t-il sans quitter du regard l'écran.

"Vamos Argentina", le cri des fans couvre celui des bombes tombant sur Gaza.

Un responsable de la sécurité du kibboutz a rappelé aux hôtes où se trouvent les abris anti-aériens les plus proches. Mais les regards sont rivés sur l'écran et sur Messi, la vedette incontestée de la soirée.

Les joueurs allemands sont maudits en espagnol dès qu'ils s'approchent de la surface argentine et quand Messi touche la balle, tout le monde se lève attendant le but qui va donner à l'Argentine la victoire qu'elle attend depuis 28 ans. Et qui ne viendra pas...

A moins de 10 km de là, à Gaza, les rues sont désertes. Rien n'est ouvert. Les gens sont peur.

"On a décidé d'organiser une soirée +Mondial+ dans la cage d'escalier de notre immeuble, comme çà on n'aura pas besoin de partir s'ils (les Israéliens) recommencent à bombarder", explique Mohamed Akila, 26 ans, un supporter de l'Allemagne.

Normalement, il serait allé avec ses amis voir la finale dans un des cafés le long de la plage. Mais le soir de la demi-finale Argentine-Pays-Bas, mercredi, l'armée de l'air israélienne a bombardé le "Fun Time Beach", un café au bord de la mer à Khan Younès, dans le sud du territoire palestinien, faisant neuf morts.

"Oui, c'est vrai, la situation est dangereuse mais bon, nos vies sont dangereuses", philosophe Mohamed.

Mohamed Masbah, 26 ans, est venu regarder le match en voisin chez Mohamed, avec une dizaine de copains qui grignotent des amuse-gueules. Lui voulait trop voir l'Argentine et Messi triompher. Evidemment, il a fallu prévoir un générateur à cause de la pénurie d'électricité.

Fadi Zayed, 36 ans, avait choisi de suivre Argentine-Allemagne chez lui, à Beit Lahiya, dans le nord de la bande de Gaza. A ses yeux, sa maison est l'endroit le plus sûr même si les Israéliens ont demandé aux habitants de Beit Lahiya d'évacuer leur domicile en prévision de bombardements massifs.

"Notre destin est entre les mains de Dieu", dit ce père de six enfants, fataliste.

Et puis il y a ceux, comme Akram Hamoudeh, 25 ans, qui ont décidé de ne pas regarder la finale à cause de la guerre en cours. De toute façon, Akram était pour le Brésil, balayé par l'Allemagne au moment où Israël s'apprêtait à frapper Gaza. mib-sah-agr/jeb

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.