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L'Afrique de la défense, un serpent de mer

L'Afrique de la défense, un serpent de mer

Comme en Europe, l'Afrique de la défense peine depuis des années à voir le jour, sur fonds de querelles financières et de rivalités entre puissances continentales, malgré la nécessité reconnue par nombre d'Etats africains d'une force de réaction rapide.

Le projet de doter l'Afrique d'une architecture de défense n'est pas nouveau: lancé il y a plus de 10 ans, il ne s'est jamais concrétisé, même si l'Union africaine (UA) a annoncé qu'elle serait opérationnelle en 2015.

Le principal projet, la Force africaine en attente (FAA), porte très bien son nom. Depuis des années, tout le monde attend qu'elle voie le jour. La FAA doit être composée de cinq brigades - disposant de chacune son propre commandement - dites "sous-régionales", c'est-à-dire correspondant aux cinq blocs politico-économiques du continent: Afrique du Nord, de l'Ouest, centrale, australe et de l'Est.

Elle-même lassée d'attendre la FAA, l'UA a opté en mai 2013 pour une solution transitoire. Cette fois, la force ne sera plus en attente mais immédiate. Le projet est baptisé "Capacité africaine de réponse immédiate aux crises" (Caric), qui fonctionne sur la base du volontariat, tant en termes d'effectifs que de finances, ce qui suscite des réticences de certains pays, peu soucieux de mettre la main à la poche pour certains, sans le sou pour beaucoup.

Les deux forces sont censées être complémentaires: la Caric, provisoire, sera centralisée par l'UA avec un état-major à Addis Abeba, en Ethiopie, la FAA relevant des organisations sous-régionales.

Mais, selon des sources diplomatiques, les Etats sont divisés sur cette question, ce qui expliquerait le succès relatif de la Caric, qui rassemble seulement 13 Etats africains sur 54.

Ainsi le Nigeria, qui dispute le leadership continental à l'Afrique du Sud, "préfère régler ses problèmes avec ses voisins dans un cadre sous-régional, quitte à accepter l'aide de pays extérieurs comme la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne", qui le soutiennent actuellement dans sa lutte contre les islamistes armés de Boko Haram, explique une source diplomatique africaine.

D'un autre côté, certains pays insistent pour créer une force continentale sur le modèle de la Caric. Au premier rang se trouve Pretoria, qui a vu d'un mauvais oeil le sommet de Paris consacré mi-mai à la lutte contre Boko Haram et auquel l'UA n'a pas été conviée, selon des sources diplomatiques.

Face à ces blocages permanents et à ces atermoiements, une dizaine de pays ont décidé d'accélérer la création d'une Force africaine de réaction rapide, dont le besoin se fait cruellement sentir depuis des années.

Mercredi, 13 chefs d'Etats et de gouvernement réunis dans le cadre d'un mini-sommet avant le sommet de l'UA de Malabo ont convenu de bâtir une telle force d'ici la fin 2014.

La Force africaine de réaction rapide "est la première étape pour permettre aux Etats d'assurer eux-même leur sécurité individuelle et collective" et de ne pas s'en remettre éternellement aux Occidentaux, a souligné à cette occasion le président tchadien Idriss Déby Itno.

Algérie, Angola, Tchad, Ethiopie, Mauritanie, Niger, Sénégal, Afrique du Sud, Soudan, Tanzanie et Ouganda s'étaient déjà engagés à fournir des troupes.

Ils ont été rejoints par le Burkina Faso et surtout l'Egypte, qui fait son grand retour au sein de l'Union africaine, dont elle avait été suspendue après un coup d'Etat en juillet 2013.

Cette force continentale, chapeautée par l'UA, pourra intervenir sur des opérations ponctuelles, après décision du Conseil de paix et de sécurité, l'organe exécutif de l'Union.

En principe, selon le commissaire de l'UA à la Paix et la Sécurité, Smaïl Chergui, deux "exercices militaires" seront effectués d'ici la fin de l'année - un exercice d'état-major et un exercice de terrain.

Cette force "permettra de faire face aux situations d'urgence en attendant la mise en place de la FAA", précise M. Chergui: "elle pourrait par exemple intervenir demain en Somalie", en proie à une insurrection islamiste, "ou au Soudan du Sud" dévasté par la guerre civile.

Aucun effectif n'a pour l'instant été annoncé officiellement. Selon un diplomate français ayant requis l'anonymat, "qu'il s'agisse de la Force africaine en attente ou de la Force de réaction rapide, une vingtaine de bataillons sont prévus en tout", soit 20.000 hommes.

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