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La percée jihadiste contraint les Etats africains à repenser leur sécurité

La percée jihadiste contraint les Etats africains à repenser leur sécurité

Face à la multiplication des attaques des jihadistes sur le continent africain, nombre de dirigeants prônent une plus grande coopération en matière de renseignement et une refonte des appareils sécuritaires inadaptés à ce type de menace.

Que ce soit au Kenya, confronté aux attaques des shebab somaliens, ou encore au Nigeria, où Boko Haram enchaîne les attentats sanglants, comme mercredi encore dans un centre commercial d'Abuja, de plus en plus de voix s'élèvent pour dénoncer l'impuissance des forces de sécurité à juguler les islamistes armés.

S'exprimant jeudi à la tribune du sommet de de l'Union africaine à Malabo, en Guinée équatoriale, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, a jugé que l'Afrique est désormais "menacée par le terrorisme transfrontalier" et invité les dirigeants du continent à prendre la mesure de ce "fléau", qui "impose de renforcer la coopération sécuritaire" entre Etats.

"Ces menaces sont nouvelles. Avant, les crises africaines étaient liées à des coups d'Etat, des rébellions auxquelles pouvaient faire face les armées conventionnelles. Les appareils sécuritaires ne sont pas assez complexes pour faire face au terrorisme", souligne une source diplomatique française en marge du sommet.

Même si, tempère ce diplomate, "depuis 10 ans, les Etats ont mis beaucoup plus de moyens dans la lutte anti-terroriste".

Les contingents africains impliqués dans les forces internationales pour la résolution des conflits sont de plus en plus nombreux, en Somalie par exemple avec l'Amisom (22.000 soldats).

Mais face à des mouvements qui ignorent les frontières, la coopération entre les Etats reste souvent embryonnaire, déplore de son côté un diplomate africain.

"La coordination entre Etats est lente car ils ne sont pas tous sur la même longueur d'onde", explique-t-il. "Certains pays ne réalisent pas encore que la question de la sécurité les concerne aussi, ou veulent éviter de se mettre à dos les jihadistes".

Ainsi, le Cameroun a longtemps été critiqué par ses voisins pour sa passivité dans la lutte contre Boko Haram sur son propre territoire - le Nigeria, premier concerné, coopérant déjà avec le Niger et le Tchad -, avant de se décider à déployer des troupes d'élite dans la zone frontalière du nord.

C'est aussi le cas pour la Libye, source d'un intense trafic d'armes alimentant groupes armés et jihadistes jusqu'au coeur de l'Afrique.

"L'objectif principal est d'obtenir le soutien de tous les pays voisins pour coopérer dans le domaine de la sécurisation des frontières", assure le chef de la diplomatie libyenne, Mohamed Abdelaziz.

Car en Afrique aussi, "c'est une guerre globale", plaide la ministre kényane des Affaires étrangères, Amina Mohamed, qui préconise un "renforcement des capacités" permettant l'échange de renseignements et "des interventions communes quand un pays est attaqué".

Mais le projet de Force africaine d'intervention rapide reste en attente depuis des années. Elle devrait certes voir le jour en 2015, mais sa mise en oeuvre reste chaotique, notamment pour des motifs financiers: elle repose sur les contributions volontaires des Etats, aux capacités financières très inégales.

Pour le chef de la commission économique des Nations Unies pour l'Afrique, Carlos Lopez, l'aspect sécuritaire est certes primordial à court terme, mais l'un des principaux enjeux à long terme est la "gestion de la diversité" et le respect des minorités - religieuses, ethniques, etc - souvent marginalisées par les pouvoirs en place.

"Au Nigeria par exemple, il y a un problème de distribution des richesses entre le Nord (pauvre) et le Sud (pétrolier), (...) il y a aussi le système politique de rotation (de la présidence) entre le Nord et le Sud... S'il n'est pas très respecté, il y a toutes sortes de frustrations, donc on crée les ingrédients pour faire prospérer ces mouvements" jihadistes, relève-t-il.

A la tribune du Conseil de paix et de sécurité de l'UA, le président ougandais Yoweri Museveni n'a pas dit autre chose mercredi. Il a dénoncé le fait que "certaines armées ne sont pas basées sur le mérite ou la compétence, mais sur des considérations sectaires", et qu'il faut "+détribaliser+ les armées nationales" sous peine d'échouer à ramener la paix.

cl/mc/mba

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