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Irak: face à l'avancée des insurgés, les Turkmènes prennent les armes

Irak: face à l'avancée des insurgés, les Turkmènes prennent les armes

Dans la ville irakienne de Taza Khourmatou, des hommes, jeunes et moins jeunes, ajustent leurs armes et keffiehs: ces Turkmènes chiites ont pour mission de défendre leurs foyers face à l'avancée des insurgés sunnites.

Adolescents, adultes, et même des vieux forment cette brigade armée de fusils d'assaut, mitrailleuses et quelques lance-roquettes, dans cette région au nord de Bagdad.

Ils se présentent comme des combattants des Sahwa ou "Réveil", en référence à ces milices recrutées dans les tribus à partir de 2006 pour soutenir la lutte contre le réseau extrémiste Al-Qaïda après l'invasion américaine du pays (2003-2011).

"Pendant la présence américaine, les Sahwa combattaient les terroristes, et nos hommes ici ont participé à cette lutte", explique le commandant local de la brigade, Issam Abbas.

Agé de 45 ans, ce dernier travaillait dans le commerce, mais s'est depuis un an totalement consacré à la force locale des Sahwa à Taza Khourmatou, à 20 km au sud de la ville pétrolière de Kirkouk actuellement aux mains des forces de sécurité kurdes (peshmergas).

La force locale des Sahwa s'est constituée en 2009 après un attentat au camion piégé ayant fait des dizaines de morts. Après une baisse des violences, ses membres sont retournés à la vie civile mais durant l'année écoulée la force a été remise sur pied face à l'intensification des activités des insurgés sunnites dans la région.

Et le 9 juin à la faveur d'une offensive fulgurante, les insurgés, menés par les jihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL), se sont emparés de larges pans de territoires dans cinq provinces au nord et à l'ouest de Bagdad.

Ils ont attaqué la zone autour de Taza Khourmatou, s'emparant de Bachir, un village turkmène chiite situé à 5 km plus loin. Depuis les rangs de la Sahwa locale gonflent.

"Nous voulons nous protéger face à la recrudescence du terrorisme", explique Amer Abou Qarar, 45 ans, qui dit "combattre pour notre pays et notre religion". Il se trouve sur la ligne de défense, à moins d'un km des patrouilles des insurgés.

Il n'existe pas de statistiques claires sur la population turkmène en Irak, qui se concentre essentiellement au nord de Bagdad et comprend des musulmans sunnites et chiites.

A Taza Khourmatou, le profession de foi chiite et des images de figures vénérées par les chiites sont aussi nombreuses que les drapeaux turkmènes. Les chefs religieux chiites, dont le grand ayatollah Ali Sistani, ont appelé les citoyens à prendre les armes pour combattre les jihadistes.

"J'ai décidé de rejoindre la Sahwa pour défendre la nation, mes principes et ma religion", explique Ahmad, un autre membre de la brigade disant répondre à un appel du grand ayatollah Sistani.

Sur le front entre Taza Khourmatou et Bachir, les Turkmènes patrouillent conjointement avec les peshmergas.

Publiquement, les deux camps proclament "une coopération à 100%" mais leur alliance est précaire en raison des tensions de longue date entre kurdes et turkmènes.

"Les peshmergas disent qu'ils nous protègent mais nous savons qu'ils veulent s'approprier cette région", affirme un combattant turkmène qui préfère ne pas dire son nom.

Cette méfiance est réciproque. "Ces combattants ne font rien. Ils mentent tout le temps", dit un combattant kurde à propos des turkmènes. "Quand il y a des bombardements ou des combats, ils prennent la fuite. Ils disent qu'ils combattent car ils ne veulent pas que les Kurdes prennent le contrôle".

Quoiqu'il en soit, les Turkmènes veulent l'aide des kurdes, conscients des conséquences d'un assaut des insurgés à Taza Khourmatou, les chiites étant considérés par ces extrémistes sunnites comme des apostats.

Non loin de là, une porte recouverte de sang gît au sol. Elle avait servi à transporter les corps de 15 habitants de Bachir tués dans la progression des insurgés.

Abbas a même envoyé son fils de 16 ans rejoindre le combat: "Il a été au front et s'est retrouvé face à face avec les terroriste à Bachir", dit-il tout fier. "C'est sa première guerre, mais je ne suis pas sûre que ce sera sa dernière."

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