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Mondial-2014 - Tatouages rituels et peinture auriverde pour les indiens d'Amazonie

Mondial-2014 - Tatouages rituels et peinture auriverde pour les indiens d'Amazonie

Entre modernité et mode de vie ancestral, les indiens du village de Tupé, au coeur de la forêt amazonienne, saluent chaque match du Brésil dans le Mondial-2014 avec leurs tatouages rituels sur une joue, un maquillage aux couleurs auriverde sur l'autre.

En ce jour de match de la Seleçao contre le Cameroun, c'est aussi "jour de touristes", comme toujours pendant le Mondial. Habituellement 2-3 par semaine, ils déferlent en continu depuis le début de la Coupe du monde.

Au milieu des singes et des vautours, ceux-ci sont accueillis dans un lieu de culte traditionnel fait de bois et de feuilles de palme.

Située à quelques kilomètres de la mégapole Manaus, la communauté de 25 habitants issus de cinq tribus différentes s'est établie ici en 2002, sur un bras de la rivière Taruma Mirim qui se jette dans le Rio Negro.

Pendant qu'un groupe de touristes attend dehors, devant des stands de bijoux artisanaux, les autres assistent à un "show" mécanique et parfaitement rodé qui se répète inlassablement.

Les "visiteurs" ont droit à la totale: plumes, tenues traditionnelles, pagnes, feuilles, tatouages, grelots en noyaux de fruits aux pieds.

Puis les femmes invitent l'assistance pour la danse, et tout le monde prend la pose, sans oublier de verser son obole dans le panier. Traditionnel bien sûr.

Seul détail troublant, l'un des danseurs porte un slip de marque occidentale.

"Nous agissons comme intermédiaire entre les villages et les agences de tourisme, explique un représentant de l'Etat. On essaie d'intégrer les habitants dans le monde environnant. Quand on n'a jamais été confronté à l'argent ou à l'alcool, on ne sait pas ce que cela peut produire. Souvent, ils ne connaissent pas non plus la richesse de leur environnement et ne savent pas comment attirer les touristes".

La communauté est gérée par Raimundo Veloso Vaz, chaman de 78 ans qui s'octroie le titre "d'ambassadeur des Indiens" depuis des visites en Europe pour défendre sa culture.

"Un hôtel flottant venait de s'installer à côté et on a pensé que c'était une bonne occasion de faire découvrir nos traditions, explique-t-il. Peu à peu d'autres Indiens nous ont rejoints et se sont mélangés".

Le village comprend désormais une école qui dispense de l'enseignement à distance, via internet, et deux générateurs qui se relaient jusqu'à la nuit pour apporter l'électricité.

"Les gens vivent ici selon le mode de vie traditionnel, cela nous permet de garder intacte notre culture. Tout ce que je sais est dans ma tête et j'essaie de le transmettre. Certains y sont sensibles, d'autres moins. On n'a jamais forcé personne", poursuit-il, clope au bec, quand les touristes sont partis.

"Les revenus du tourisme nous permettent de vivre. Pour certains groupes, c'est juste une animation, d'autres ont un vrai intérêt. On voudrait faire plus pour restaurer notre habitat, mais on ne peut pas toucher à la forêt. Donc on doit acheter la nourriture. J'aime ce que je fais, mais je sais que ça participe aussi d'un système", reconnaît-il, lucide.

Mais vite, il est déjà l'heure de se précipiter sur les écrans plats pour suivre la Seleçao.

"On la supporte encore plus car on est plus Brésilien que les autres vu que l'on était là les premiers, rigole encore Raimundo. Ce Mondial est une bonne chose pour le pays. Nous, cela va juste nous faire plus d'argent, et j'espère que les gens connaîtront mieux notre culture, la respecteront plus".

Devant lui, sa fille efface les dessins rituels sur son visage, enlève son pagne, enfile un soutien-gorge puis la tenue du Brésil et dessine un drapeau national sur ses joues.

Les buts sont salués avec une corne de brume et des pétards qui ressemblent à des fusée de secours. Au sol, des canettes de bière et des emballages de sucettes.

"Tous les samedis, on fait des matchs dans la communauté et les filles font des séances de penalties car c'est ça qui est excitant, explique Umussi, Giseli pour l'état civil brésilien.

La jeune femme de 25 ans, la plus virulente, qui crie sans cesse pendant le match, apprécie cette vie simple.

"Ici, c'est très bien pour nous, on peut facilement acheter la nourriture à Manaus et il y a l'hôpital pour les enfants. Là où on était avant, c'était moins aéré aussi avec la forêt. Si on ne travaillait pas avec les touristes, on ne pourrait pas vivre", reconnaît-elle avant de donner son compte Facebook...

Son mari est allemand. La femme d'un autre est italienne.

La vie des indiens n'est pourtant pas facile et, en raison de leur mode de vie atypique, ils sont victimes d'une réputation de fainéants et d'assistés auprès de leurs compatriotes .

"A l'époque, les missionnaires disaient que nos villages étaient de mauvais endroits, qu'on était sataniques. Aujourd'hui, le musée de Manaus prend l'argent des touristes et nous on ne voit rien", râle, quand même un peu amer contre les autorités, le doyen du village.

cd/ol/jcp

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