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Chili : les 100 jours de Bachelet, une course aux réformes

Chili : les 100 jours de Bachelet, une course aux réformes

La présidente du Chili Michelle Bachelet a imprimé aux 100 premiers jours de son deuxième mandat un rythme trépidant et multiplié les projets de réformes provoquant un débat sur leur ampleur dans un pays encore marqué par l'héritage de la dictature d'Augusto Pinochet.

Traditionnellement conservatrice, l'Eglise locale parle de "frénésie" législative. Les analystes évoquent eux les réformes "les plus profondes depuis (le retour à) la démocratie", en 1990, pour citer par exemple Max Colodro, professeur de philosophie à l'Université Adolfo Ibañez.

Ce qui est certain, c'est que Mme Bachelet, entrée en fonctions le 11 mars pour un nouveau mandat de quatre ans, est lancée à plein régime, à peine distraite de son objectif réformateur par deux catastrophes naturelles (un séisme et un vaste incendie).

Selon l'institut d'analyse Fundacion 21, celle qui avait déjà gouverné le pays entre 2006 et 2010 a mis en oeuvre 86% des 56 mesures promises pour ses 100 premiers jours à la présidence avant son élection le 15 décembre.

La première - et unique - présidente de gauche depuis le retrait du pouvoir du général Pinochet (1973-1990) a commencé par une réforme fiscale destinée à augmenter les ressources de l'Etat de l'équivalent de 3% du PIB, soit plus de huit milliards de dollars destinés à l'éducation et des projets sociaux.

Elle a ensuite envoyé au Parlement un projet de refonte du système électoral binominal, principal héritage de la dictature, provoquant des poussées d'urticaire dans les partis en ayant profité durant des décennies, particulièrement la droite.

Fidèle à ses promesses de campagne, la présidente a également mis sur les rails une réforme du système éducatif, réclamées depuis plusieurs années par des dizaines de milliers d'étudiants mobilisés dans les rues du pays, pour instaurer notamment la gratuité dans un système essentiellement privé.

Et cerise sur le gâteau, elle a évoqué son intention de permettre l'avortement thérapeutique, sous très strictes conditions, dans un pays où le divorce n'est autorisé que depuis 2004.

Ce débat a toutefois été repoussé au deuxième semestre, afin de ne pas braquer une église catholique qui digère déjà assez mal la réforme éducative. Quant à la discussion sur une refonte de la Constitution, le rendez-vous a été repoussé à 2015.

Mme Bachelet est pressée et dispose de peu de temps.

"Les temps politiques utiles sont les premières années, parce que la troisième année recommence le cycle électoral avec les municipales et la quatrième année ce sont les présidentielles. Elle sait qu'elle doit rapidement décider des réformes et les faire appliquer", explique Max Colodro.

Après un premier mandat loin d'être ce qu'elle espérait faute d'appuis politiques, Michelle Bachelet dispose aujourd'hui d'une majorité parlementaire dont elle compte profiter pour avancer plus aisément.

Le système électoral chilien interdit un troisième mandat présidentiel.

L'opposition, toujours groggy après sa défaite de décembre, critique l'urgence imposée au Parlement et l'indifférence réservée à ses propositions.

"L'empressement du gouvernement porte atteinte à la qualité des réformes qui sont en discussion", ajoute M. Colodro, prenant exemple sur les désaccords sur la réforme fiscale.

Pour l'analyste de l'Université de Valparaiso Guillermo Holzmann, "des changements importants qui vont conditionner l'avenir du pays sont soumis à une vision sur quatre ans" plutôt que sur le long terme.

La droite et le secteur des affaires cherchent à peser sur les changements en cours. "Le dialogue ne signifie pas que je doive faire ce que l'autre me dit", a répondu Mme Bachelet à ses détracteurs.

"Aujourd'hui, on assiste à un dialogue sélectif (de la part du gouvernement), mais pas à une négociation" avec l'ensemble des acteurs, souligne M. Holzmann.

L'opinion soutient toutefois majoritairement l'agenda de la présidente, même si beaucoup doutent qu'elle parvienne à le mettre en oeuvre.

"Elle a été capable de montrer un gouvernement très actif, avec une forte volonté transformatrice. Maintenant, ce qu'il lui manque, c'est de commencer à matérialiser ses réformes en projets politiques qui soient viables d'un point de vue législatif", résume M. Colodro.

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