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Felipe VI, un roi moderne et une lourde mission: rénover la monarchie espagnole

Felipe VI, un roi moderne et une lourde mission: rénover la monarchie espagnole

Le nouveau roi d'Espagne, Felipe VI de Bourbon, prête serment jeudi lors d'une sobre cérémonie, avec pour mission délicate de rénover une monarchie discréditée et préserver une unité nationale malmenée par la poussée séparatiste en Catalogne.

En grand uniforme militaire, portant la ceinture de soie rouge de capitaine général des Armées, qu'il aura reçue le matin des mains de son père, Felipe montera sur le trône à 46 ans, après l'abdication de Juan Carlos, en jurant fidélité à la Constitution de 1978, socle fondateur de la démocratie espagnole.

Une cérémonie devant les députés et sénateurs réunis, en l'absence d'invités étrangers, conciliant la tradition espagnole - une investiture devant les représentants du peuple - la sobriété requise en temps de crise et la proximité avec les Madrilènes. Rompant avec la tradition catholique, la journée sera exclusivement laïque.

La Maison royale explique avoir opté pour un modèle semblable à la prestation de serment de Philippe de Belgique, le 21 juillet 2013, après l'abdication du roi Albert II, dans la simplicité "mais avec une plus grande participation de la rue".

Après avoir prêté serment sur une estrade drapée d'une tenture bordeaux et prononcé son premier discours de roi, Felipe présidera un défilé militaire aux portes du Congrès des députés. Puis il traversera en voiture le centre de Madrid, accompagné de la reine Letizia, 41 ans, première souveraine espagnole à n'être pas issue de la noblesse.

Le couple, accompagné de Juan Carlos et de son épouse Sofia, sortira alors sur le balcon central du Palais royal pour saluer les Madrilènes.

Mais tout au long de cette journée, la haute silhouette du jeune roi, longuement préparé à son nouveau rôle, sorti au fil des années de l'ombre de son père, éclipsera celle de Juan Carlos, le grand absent de la cérémonie au Congrès.

Une "décision personnelle", assure la Maison royale, prise par le roi lui-même afin "de donner un plus grand rôle" à Felipe.

A 76 ans, après presque 39 ans d'un règne dont les dernières années ont été marquées par les scandales, c'est un roi usé, marchant avec hésitation, appuyé sur des béquilles, qui a annoncé le 2 juin son abdication.

Un souverain, monté sur le trône le 22 novembre 1975, deux jours après la mort du dictateur Francisco Franco, longtemps très aimé pour avoir mené l'Espagne vers la démocratie et resté l'interlocuteur respecté de nombreuses capitales étrangères, malgré la chute de popularité qui le frappe dans son pays.

En annonçant sa décision, mûrie depuis des mois, Juan Carlos a transmis à son fils la lourde tâche de rénover la monarchie, sous l'impulsion d'une "nouvelle génération".

Espoir d'une monarchie désormais contestée par environ un Espagnol sur deux, selon les sondages, Felipe reste populaire mais dispose d'une marge de manoeuvre étroite, dans un pays où la crise économique a engendré une perte de confiance dans les institutions.

"Ce pays a besoin d'air frais, d'une énergie nouvelle. Le roi n'a pas le pouvoir de changer quoi que ce soit, mais il peut rassembler, accompagner, stimuler", analyse José Apezarena, auteur d'un livre récent sur le nouveau couple royal, rappelant que la monarchie parlementaire espagnole ne laisse au roi qu'un rôle de représentation.

"Croire que tout va s'arranger comme l'économie ou la question indépendantiste, parce que le nouveau roi est monté sur le trône, c'est faux", remarque l'écrivain, à propos de la Catalogne et du Pays basque.

Sans doute son premier dossier brûlant, la poussée séparatiste en Catalogne, à quelques mois du référendum d'autodétermination prévu par les nationalistes en novembre, mettra à l'épreuve les talents de diplomate de Felipe, qui parle catalan et entretient des liens privilégiés avec la région.

Mais toute décision finale, dans le bras de fer qui oppose Madrid à la région rebelle, reviendra aux politiques. "Le nouveau roi aura des possibilités très limitées, parce que son rôle selon la Constitution est très strict, un rôle de modérateur et d'arbitre", rappelait le philosophe et politologue Josep Ramoneda.

Parmi les embûches attendues sur son chemin, Felipe devra aussi composer avec les retombées du scandale judiciaire qui frappe sa soeur Cristina, inculpée de fraude fiscale dans l'enquête pour corruption visant son époux Iñaki Urdangarin.

Avec Juan Carlos, Cristina sera l'autre grande absente de la cérémonie jeudi.

sg/elc/mf

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