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Ukraine: un gîte et des prières offerts par les insurgés aux familles apeurées

Ukraine: un gîte et des prières offerts par les insurgés aux familles apeurées

Les yeux rougis, Valentina Chebanova vient s'asseoir près de sa petite-fille de sept ans. Avec un groupe de femmes et d'enfants, elles attendent d'être envoyées en Russie par des séparatistes à Donestk, dans l'est de l'Ukraine en proie aux violences.

"J'ai passé toute ma vie ici. Je ne veux pas aller en Russie pour toujours", dit Valentina Chebanova en sanglotant. "Je ne veux pas partir loin, juste partir quelque temps et puis c'est tout".

Leur première étape sera la ville russe de Rostov-sur-le-Don, juste de l'autre côté de la frontière, mais elle ignore où elles seront ensuite envoyées.

Une trentaine de femmes et d'enfants attendent au rez-de-chaussée du quartier général des séparatistes de la république autoproclamée de Donestk. Les insurgés ont pris voici deux mois le contrôle du siège de l'administration régionale de la ville, un immeuble grisâtre de l'ère soviétique.

Des enfants jouent sous une table, des familles terminent précipitamment un plat de pommes de terre bouillies et une salade de choux.

Certaines femmes confient, elles, leur joie de quitter leurs maisons entourées de checkpoints d'où elles entendent les tirs.

Ioulia, qui court derrière son fils d'un an autour de la pièce, explique être venue de la ville portuaire de Marioupol, théâtre d'intenses affrontements.

"On habite à côté d'un checkpoint et ils tirent toutes les nuit", raconte-t-elle. "On est assuré d'être bien accueilli en Russie. On pense que tout ira bien là bas".

"Ils nous ont promis du travail et un logement", renchérit Anjela, 33 ans, originaire de Kostiantynivka, dans la région de Donestk, venue avec ses quatre enfants de 2 à 12 ans.

Interrogé par l'AFP au centre de presse de la "république de Donesk", un séparatiste en tenue de camouflage affirme que le but est de faire partir ces femmes dans les plus brefs délais.

"Ce n'est pas sûr ici... On s'attend à des opérations militaires ici (à Donestk)", glisse-t-il.

Quelques heures plus tard, une voiture piégée explosait devant le bâtiment, tuant trois insurgés.

Dans ce bâtiment de onze étages, qui abritait auparavant des bureaux, le chaos règne en maître, conséquence de la mise à sac et des pillages après la prise de contrôle du bâtiment. Certains étages, plongés dans l'obscurité, sentent l'urine.

Plusieurs pièces ont cependant été aménagées en chambres de fortune pour les insurgés. Un centre de premier secours et même une salle de prière orthodoxe ornée d'icônes ont aussi été installés.

Dans la salle de prière, des bougies ont été allumées sous les icônes. Trois vieilles femmes portant le foulard discutent par terre, en attendant de rejoindre une procession de croyants brandissant une icône, organisée chaque jour à 19H00 autour du bâtiment.

Les séparatistes ont accroché des mots rappelant à leurs troupes de surveiller leurs manières.

"Ne soyez pas un cochon, nettoyez derrière vous", dit l'une des consignes. D'autres prient les troupes d'"ôter les cagoules et les masques en dehors du périmètre -- Cessez d'effrayer la population!".

"Nous sommes en train de nettoyer pour mettre de l'ordre", dit Anatoli Ivanovitch en maniant le balai. "Les autorités devraient protéger la population, pas la combattre. Ce qui se passe en Ukraine est incroyable, terrible", ajoute ce chauffeur de bus, qui a rejoint les rangs séparatistes en avril.

Une femme en charge du 9e étage, qui se présente sous son patronyme de "Petrovna", montre fièrement ses pots de fleurs et un bureau transformé en chambre pour deux insurgés, où sont installés des lits parfaitement bordés.

"Rien n'a été détruit à mon étage, tous les papiers sont là", se félicite-t-elle, disant attendre "seulement la victoire".

Mikhaïl, un comptable, chargé des finances des rebelles, dit qu'il "veut l'ordre et la stabilité".

"Il y a un seul mot pour décrire ce qui se passe: le chaos", juge-t-il, en tirant une bouffée de sa cigarette dans son bureau.

"J'essaie de changer cette situation, seul le temps nous dira si j'ai réussi ou pas".

am-blb/neo/jh

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