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A Rome, les détenus sont "serrés comme des sardines" et "se battent pour aller pisser"

A Rome, les détenus sont "serrés comme des sardines" et "se battent pour aller pisser"

Entassés dans d'étroites cellules, "serrés comme des sardines" et se battant "pour aller pisser", les détenus de la prison Regina Coeli à Rome estiment que l'Italie a encore beaucoup à faire pour résoudre le problème du surpeuplement carcéral qui lui a valu plusieurs condamnations de l'Europe.

"Six personnes dans une cellule, c'est beaucoup trop. Et avec une seule toilette et une toute petite cuisine, imaginez les tensions", explique à l'AFP Antonio, un Espagnol de 35 ans arrêté alors qu'il tentait de faire entrer clandestinement du haschisch dans la péninsule. Antonio est l'un des 920 prisonniers de cet établissement construit au XIXe siècle et d'une capacité de 643 places.

En janvier 2013, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) avait condamné Rome à payer 100.000 euros d'indemnités à sept détenus se plaignant de leurs conditions de détention. La CEDH a reçu en tout 6.829 plaintes.

A l'automne dernier, c'était le comité antitorture (CPT) du Conseil de l'Europe qui s'était dit préoccupé par la surpopulation carcérale observée en Italie, une situation dénoncée régulièrement par le président de la République, Giorgio Napolitano.

En 2013, on comptait 64.000 détenus dans les prisons italiennes pour une capacité de 47.000 places, soit une surpopulation de 136%.

Le gouvernement gauche-droite d'Enrico Letta avait par conséquent adopté en décembre une série de mesures afin de les désengorger et améliorer les conditions des détenus. Selon les derniers chiffres, 59.000 personnes sont actuellement emprisonnées en Italie.

Parmi les mesures de désengorgement, la décision de procéder à la libération anticipée de quelque 1.700 détenus.

Les syndicats de gardiens mettent la surpopulation sur le compte d'une législation trop sévère (40% des prisonniers italiens le sont pour des délits liés aux stupéfiants) et estiment que 10.000 petits trafiquants devraient être libérés.

"Nous sommes serrés comme des sardines. L'air ne circule pas, et tu dois te battre pour aller pisser", déplore Marco, 38 ans, en regardant ses codétenus jouer au baby-foot dans la petite salle commune de la prison.

Pour Luigi Manconi, président de la commission du Sénat pour les droits de l'homme, en plus d'être surpeuplées, les prisons italiennes ne respectent pas la règle selon laquelle les détenus doivent passer au moins 8 heures hors de leurs cellules.

Dans la prison napolitaine de Poggioreale, par exemple, où 2.000 personnes s'entassent pour 1.400 places, environ 80% d'entre eux sont contraints de rester dans leurs cellules 23 heures sur 24.

Et quand la règle des 3 mètres carrés par personne est respectée, ce sont les espaces communs qui sont sacrifiés, déplore l'association en faveur des droits des prisonniers Antigone.

"On assiste à la transformation en cellules de nombreux lieux de vie, et comme rien n'est fait pour financer des salles ou des terrains de sport, les détenus passent leur temps à arpenter les couloirs", dénonce Alessio Scandurra, un responsable d'Antigone.

L'association réclame également que davantage de temps et d'argent soit accordé à la formation en prison afin d'aider à la réinsertion, "plus de la moitié des détenus en Italie étant récidivistes".

Ainsi, Nicola, 26 ans, qui a déjà purgé trois de ses dix ans de prison, confie avoir réussi à "s'échapper du chaos" en passant la quasi-totalité de sa journée à la lingerie, "étant l'un des rares à avoir un boulot".

Selon Mauro Palma, conseiller du ministère de la Justice à la surpopulation carcérale, la CEDH a donné une année supplémentaire à l'Italie pour se conformer à ses observations. Sinon, elle verra le montant de son amende augmenter sensiblement.

"Imaginez quel type de cohabitation peut exister entre des êtres humains et d'autres inhumains, dans des espaces aussi petits", explique Giuseppe, 64 ans, qui purge une peine de 14 ans de réclusion pour avoir aidé sa femme, malade en phase terminale, à mourir.

Avant d'ajouter: "il y a de quoi devenir fous".

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