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Ukraine: sans eau ni électricité, la vie au son des tirs à Slaviansk

Ukraine: sans eau ni électricité, la vie au son des tirs à Slaviansk

"Il n'y a plus d'eau, plus d'électricité, plus rien", déplore, le visage usé, Alexandra. Assise sur un banc sur la place Lénine de Slaviansk, bastion prorusse de l'Est de l'Ukraine, cette octogénaire vient de remplir son bidon avec de l'eau croupie puisée à la fontaine.

"C'est pour les toilettes d'abord, mais il m'arrive d'en boire. Je la fais bouillir", dit-elle.

Alexandra, n'est pas la seule à aller puiser de l'eau dans la grande fontaine de la place Lénine dont les jets sont arrêtés. Plusieurs autres habitants l'accompagnent et font des provisions depuis que l'eau a été coupée il y a près d'une semaine après des tirs à l'arme lourde ayant endommagé le système d'approvisionnement.

Depuis le mois d'avril, la ville de Slaviansk, environ 110.000 habitants, est devenue le bastion des séparatistes prorusses. Les combats entre forces loyalistes ukrainiennes et rebelles y sont quasi-quotidiens.

Les habitants doivent redoubler d'efforts pour survivre dans ces conditions.

Outre l'eau et l'électricité, les communications sont quasiment toutes coupées. Internet ne fonctionne plus dans la ville et seuls quelques opérateurs téléphoniques émettent encore.

"Au moins, il y a une rivière à côté où on peut se laver", lance Pacha, la cinquantaine.

A l'entrée de la ville, des dizaines de personnes font la queue, attendant une distribution d'eau minérale en bouteille. Se fournir en produits de première nécessité se fait de plus en plus difficile.

La grande majorité des commerces ont fermé. "Fermé pour toujours", est-il écrit devant une boutique du centre-ville, "Fermé pour travaux" indique une autre.

Seul un petit supermarché et un café restent encore ouverts, mais ferment à 18H, contre 23H il y a encore quelques semaines.

"Nous sommes sans doute les plus courageux. Un jour ça tirait juste à côté, mais on était quand même au travail", explique une serveuse du café, qui faute d'eau et d'électricité ne propose sur sa carte qu'une salade et de la viande cuite au gaz.

"C'est Tchernobyl. Il y a des câbles qui pendent partout, des maisons détruites. Avant les gens vivaient ici, travaillaient ici", lance Svetlana.

En plein centre-ville, les impacts des combats sont visibles partout. Des immeubles ont été soufflés par les explosions et des débris de verre jonchent le sol de quasiment toutes les rues.

Celles-ci sont de plus désertes. Quelques habitants s'aventurent parfois à bicyclette. Mais sinon, seuls des insurgés prorusses circulent en voiture dans les rues, armes à la main.

Comment Slaviansk en est arrivée là?

"Avant tout était calme. Ils sont venus et ils nous ont dit qu'ils nous défendaient. Mais de quoi? Je n'ai toujours pas compris", lance une habitante d'un immeuble ayant été soufflé par des tirs à l'arme lourde, en faisant allusion aux rebelles.

Cette vielle dame, qui vit à Slaviansk depuis 45 ans, ne souhaite aujourd'hui qu'une seule chose: fuir comme de nombreux autres l'ont déjà fait, dont ses enfants et son petit-fils, partis se réfugier chez des amis en Russie.

Mais "mon mari est malade et je ne peux pas l'abandonner ici. Sinon ça ferait belle lurette que je serais partie d'ici", explique-t-elle.

L'armée ukrainienne, qui encercle la ville, n'est pas en reste, à ses yeux. Nombreux sont les habitants à l'accuser d'être à l'origine des récentes violentes explosions dans la ville.

Cette armée effectue par ailleurs un contrôle draconien des journalistes autorisés à pénétrer dans la ville. Le passage n'est cédé qu'après de longues vérifications des accréditations demandées auprès des autorités de Kiev. L'équipe de l'AFP a du attendre le feu vert pendant deux heures au poste de contrôle.

"Tous les hommes armés doivent partir et c'est seulement comme ça que le calme reviendra", résume la vieille dame, avant de s'alarmer au bruit d'un avion dans les airs.

"Voila ça recommence! Ils vont encore nous tirer dessus!", lance t-elle, résignée.

lap/gmo/ros

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