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Débarquement: les Amérindiens en première ligne pour le renseignement

Débarquement: les Amérindiens en première ligne pour le renseignement

Les Américains avaient une arme secrète lors du Débarquement allié en Normandie: leurs messages codés étaient envoyés en langues amérindiennes, notamment par les Comanches auxquels il a été rendu hommage samedi en France à l'occasion du 70e anniversaire du 6 juin 1944.

Il y a eu des dizaines de milliers d'Amérindiens servant dans les forces américaines pendant la Seconde Guerre mondiale, sur tous les théâtres d'opération et en particulier la bataille de Normandie.

Parmi eux certains étaient utilisés comme "code talkers", c'est-à-dire agents de transmissions utilisant leur langue pour que les Allemands -ou les Japonais dans la guerre du Pacifique-, ne puissent les comprendre.

Le code resta classifié jusque dans les années 1980, l'armée américaine ayant longtemps pensé qu'il pourrait toujours être utile en cas de nouveau conflit.

Les "code talkers" de la nation amérindienne des Comanches étaient au nombre de 14 au moment du Débarquement.

"Mon père m'a expliqué qu'en langue comanche, +homme blanc fou+ signifiait Hitler", explique à l'AFP John Parker, 59 ans, fils de Simmons Parker. Phonétiquement, cela donne "Boh-Sah, Die-Vaw", écrit-il.

La langue comanche ne pouvant la plupart du temps traduire des termes techniques, en particulier les armes, des images étaient utilisées.

Ainsi une mitrailleuse de calibre 30 était traduite par "machine à coudre à feu". Celle de calibre 50 était une "grosse machine à coudre à feu".

Un avion bombardier était qualifié de "oiseau enceinte", un mortier de "fourneau à eau". "C'est sous la terre et ça tuera" signifiait un champ de mine.

Les Comanches chargés des transmissions ont débarqué à Utah Beach, une des deux plages du secteur américain, avec leur émetteur sur le ventre, l'utilisant d'abord comme bouclier. Ces transmetteurs fonctionnaient avec des générateurs très bruyants.

Langues orales, les langues amérindiennes n'étaient compréhensibles que par leurs locuteurs.

L'armée américaine avait commencé à utiliser ce stratagème pendant la Première guerre mondiale.

"En 1918, en France, deux officiers américains s'étaient aperçus que des soldats amérindiens combattant à leurs côtés conversaient dans leur langue natale, le Choctaw. Ils décidèrent d'utiliser cette langue à la place des codes traditionnels", explique Stéphane Jacquet, juriste et responsable du musée mémoriel de la petite ville normande de Tilly-sur-Seulles.

Constatant l'efficacité de ce codage, l'US Army a décidé d'étendre cette pratique à d'autres langues, notamment la langue navajo contre les Japonais et d'autres langues dont le comanche, le cherokee, le cheyenne, ou encore le dakota sur le front allemand.

Tous les "code talkers" amérindiens sont morts désormais. Le dernier, Chester Nez, un Navajo, est décédé mercredi à l'âge de 93 ans.

Le film de John Woo "windtalkers, les messagers du vent", avec Nicolas Cage, et qui se déroule sur le front du Pacifique en 1944, leur a rendu hommage en 2002.

"Le rôle très important des Amérindiens pour la victoire des Alliés a longtemps été méconnu", explique M. Jacquet.

Celui-ci a pris l'initiative de faire venir à Tilly sept descendants des agents de transmission comanches, dont le neveu de Johnnie M. Rivas, seul Comanche tombé lors de la première vague du Débarquement, et inhumé au cimetière de Colleville-sur-Mer, parmi près de 10.000 soldats américains.

Une cérémonie amérindienne d'hommage doit lui être consacrée le 9 juin.

Samedi l'ambassadeur des Etats-Unis en France David Taplin est venu à Tilly. "Dans la délégation américaine, lors de la cérémonie de Ouistreham, quand j'ai dit que j'allais m'informer sur le rôle des Amérindiens, tout le monde était intéressé et voulait être briefé", a-t-il dit. "Le rôle qu'ils ont joué est encore très méconnu", a-t-il reconnu.

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