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Sérieux et revendications pour la première Gay Pride à Chypre

Sérieux et revendications pour la première Gay Pride à Chypre

Plus de 3.000 personnes ont participé samedi dans la bonne humeur mais sous escorte policière à la première Gay Pride à Chypre, dépassant les attentes des organisateurs satisfaits d'avoir renvoyé une image "positive et sérieuse" malgré la farouche opposition de l'Eglise.

"La marche d'aujourd'hui montre que la société a évolué plus que ne le pensent les politiciens", s'est félicité Costas Gavrielides, président d'Accept-LGBT Cyprus, qui milite pour une union civile.

Arborant un sobre t-shirt noir siglé d'une carte de l'île aux couleurs du drapeau arc-en-ciel, il ajoute que la marche "a permis d'ouvrir une discussion", 16 ans après la dépénalisation de l'homosexualité dans la partie chypriote-grecque de l'île.

Dans la foule bigarrée se trouvaient surtout des jeunes, mais aussi des familles avec enfants. Pas de tenues dénudées ni de musique à tue-tête, les organisateurs ayant mis un point d'honneur à faire du rassemblement un acte plus politique que festif.

Le début de la marche a été marqué par les craintes de débordements d'une contre-manifestation ayant rassemblé une centaine de personnes, dont des prêtres et des moines, bloqués par la police alors qu'ils se dirigeaient vers le lieu de démarrage de la Gay pride.

"Les homosexuels peuvent faire ce qu'ils veulent, mais cela doit rester dans le cercle privé", a réclamé Euthimios Panteli, venu de Larnaca, à 50 km au sud de la capitale, pour dénoncer le défilé.

"L'homosexualité est un péché qui doit et peut être combattu", a poursuivi ce manifestant de 32 ans en écho aux propos de la puissante Eglise orthodoxe de Chypre, qui avait protesté contre la Gay Pride en assurant que les relations homosexuelles ne constituaient "pas un choix de vie normal".

Dans une société conservatrice, où les solidarités familiales sont très fortes, "les autorités n'ont jamais accordé de visibilité aux homosexuels, ni éduquée la population, laissant libre cours au discours alarmiste de l'Eglise", explique Joanna Constantinou, porte-parole d'Accept-LGBT.

L'année dernière, un scénariste a d'ailleurs dû présenter des excuses après avoir brièvement introduit un jeune couple gay dans une série populaire chypriote.

"Le rassemblement est sérieux, il n'y a pas trop d'extravagance et c'est quelque chose de très positif", commente Kyriakos, 23 ans, observant en retrait les manifestants.

Lui est venu "voir comment les choses se passent", mais ne veut pas prendre pas part à la marche.

"C'est un tout petit pays, tout le monde se connaît et si vous êtes vu ici, vous êtes catalogué pour toujours", explique ce jeune homme encore réticent à révéler son homosexualité à ses proches.

L'homosexualité reste un tabou à Chypre, mais "il y a quelques années encore, les gens se cachaient et n'auraient jamais osé se rassembler ainsi", note Yoryis Reginos, un des fondateurs d'Accept-LGBT Cyprus, dénonçant "une homophobie institutionnalisée, plus forte encore que le dénigrement".

Selon lui, la dépénalisation de l'homosexualité n'a été votée que parce que l'Union européenne le réclamait avant l'adhésion en 2004.

Désormais, deux projets de loi, promis par le président Nicos Anastasiades (centre-droit), sont en cours de préparation pour créer une forme d'union civile et pour pénaliser les propos homophobes. Mais leurs échéances sont sans cesse repoussées.

La mairie de Nicosie et une quinzaine de représentations diplomatiques, dont celles des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de l'Union européenne, sont venues samedi faire flotter leur bannière au millier des drapeaux arc-en-ciel en signe de soutien.

L'ambassadeur autrichien et son épouse sont venus maquillés d'une barbe, en clin d'oeil à Conchita Wurst, qui a permis à leur pays de remporter l'Eurovision.

"Le message de Conchita est que chacun puisse vivre librement son choix de vie et cela prend tout son sens à Chypre, un pays en voie de réconciliation", assure l'ambassadeur Karl Mueller, en référence au dialogue en cours pour tenter de réunifier l'île divisée depuis 1974.

Dans le Nord, l'homosexualité n'a été dépénalisée qu'en janvier. Et après avoir organisé le 17 mai une "Marche de l'arc-en-ciel" dans l'autre partie de la capitale divisée, plusieurs Chypriotes-turcs ont défilé samedi avec leurs cousins du Sud.

faa/fcc

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