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De Singapour à Pékin, armagnac et calvados cèdent à la tentation de l'Orient

De Singapour à Pékin, armagnac et calvados cèdent à la tentation de l'Orient

Il s'en boit beaucoup en France (de moins en moins), peu en Asie (de plus en plus): en quête de terra incognita, l'armagnac et le calvados ont cédé à la tentation de l'Orient, dans l'ombre du cognac.

"Ce qu'on a à vendre, c'est le romantisme, la France, le terroir et l'authenticité", s'enflamme Didier Bedu, producteur au Château du Breuil (Calvados) et président de l'Interprofession des appellations cidricoles (IDAC).

"Aux Chinois, on parle chevaux de courses et casino, la Normandie, tout ce qu'on retrouve dans le parfum du calvados", dit-il au salon Vinexpo de Hong Kong, grand-messe biannuelle des vins et spiritueux en Asie.

Le calvados (eau-de-vie de cidre ou poiré) et l'armagnac (eau-de-vie de vin blanc) représentaient chacun 1% des exportations de spiritueux français en valeur en 2013 (autant que le rhum), soit près de 45 millions d'euros au total pour les deux AOC, contre 67% pour le cognac, 10% pour la vodka.

Catherine Bouteloup, directrice commerciale des bas-armagnacs J. Goudoulin à Courrensan (Gers), s'est lancée il y a quatre ans en Asie.

Aujourd'hui, elle exporte en Malaisie, au Japon, à Singapour, en Chine et à Hong Kong. Sur 800.000 euros de chiffre d'affaires annuel, la petite exploitation créée en 1935 dans un joli vallon de Gascogne en réalise désormais 40% à l'étranger, dont 10% en Asie.

"La consommation (de spiritueux) s'éteint en France. La volonté de partir à l'export, c'était pour répondre à la crise en profitant de l'énergie du marché du cognac", explique-t-elle.

Et le marché progresse, bien que ni l'armagnac, ni le calvados ne disposent de budget marketing pour se faire connaître des distributeurs, moins encore des consommateurs.

"Les armagnacs restent méconnus du grand public même si nous notons une évolution positive", confirme Cyril Pilard, directeur de la société Vins Sélections qui représente les bas-armagnacs Francis Darroze en Chine.

Les perspectives de croissance sont immenses: la production de cognac est vendue à 97% à l'étranger, celle d'armagnac et de calvados à 57%.

Mais tandis que les plus grandes maisons représentent l'élixir des Charentes, l'armagnac et le calvados sont majoritairement fabriqués dans des domaines aux capacités de production limitées: il se produit annuellement 160 millions de bouteilles de cognac, contre 6 millions environ pour chacun des deux autres spiritueux.

L'armagnac bénéficie depuis 2013 de la création en Chine de "Maisons et comptoirs Sud-Ouest".

Dans des parfums de foie gras et d'huile de noix, ces vitrines de l'art de vivre des régions Aquitaine et Midi-Pyrénées doivent "permettre aux producteurs d'aller directement à la rencontre des nouveaux consommateurs chinois", "faciliter et accompagner" la prise de contact des producteurs avec des acheteurs potentiels et, in fine, "améliorer leurs marges à l'export".

Une "maison" a ouvert le 12 juillet 2013 à Wuhan et d'autres vont ouvrir à Wuhan et Chengdu en 2014 et 2015, puis Pékin et Shanghaï à moyen terme, selon Julien Layrisse, le responsable opérationnel Chine du projet.

Les Chinois viennent aussi en France afin de constater "le savoir-faire et le patrimoine traditionnel intimement lié au produit armagnac", confie Jacques Hauller du domaine de Gensac, à Condom (Gers).

Depuis quelques mois, une responsable export pour l'Asie de nationalité chinoise est installée au château. "Ce qui nous permet d'aborder le marché avec une bonne approche quant aux problèmes des spécificités culturelles, la langue, les traditions, le marketing", explique-t-il.

La Chine est désormais le premier pays importateur d'armagnac, devant le Royaume-Uni. Le calvados, lui, reste très apprécié des Allemands, des Belges et des Scandinaves.

"Les Chinois le trouvent pourtant très bon, presque doux", assure Didier Bedu.

En 2013, certains producteurs d'armagnac ont tiré la langue. La Chine a renforcé ses contrôles sanitaires et exigé des analyses très onéreuses pour détecter la présence de phtalates (plastifiant présent dans les tuyauteries anciennes). Résultat: des stocks bloqués en France ou en cours d'acheminement et 150 euros d'analyse par produit.

gab/fmp/mpd

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