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A court de devises, le Venezuela privilégie ses créanciers extérieurs

A court de devises, le Venezuela privilégie ses créanciers extérieurs

Confronté à un manque de devises, le Venezuela a fait le choix de se placer de fait en défaut de paiement sélectif vis-à-vis de ses créanciers locaux, préférant honorer sa dette étrangère, assurent des analystes interrogés par l'AFP.

"Le gouvernement a décidé de se mettre en défaut sélectif sur le marché interne et pas externe", et de donner la priorité au paiement de ses dettes en bons souverains ou émis par la compagnie pétrolière publique PDVSA, afin d'éviter de se voir saisir des actifs à l'étranger, affirme ainsi à l'AFP Luis Oliveros, économiste et professeur à l'Université centrale du Venezuela (UCV).

Les dettes de l'Etat vis-à-vis d'importateurs de pièces automobiles, d'aliments, de fournitures médicales ou des compagnies aériennes dépassent les 14 milliards de dollars, indique José Guerra, ancien membre de la Banque centrale, qui signale que l'on assiste à "un défaut commercial, une suspension de paiement".

Dans le pays disposant des plus importantes réserves de pétrole au monde, mais qui importe quasiment tout ce qu'il consomme, l'Etat a instauré en 2003 un contrôle des changes drastique : tout importateur doit recourir aux autorités pour obtenir des dollars contre ses bolivares, la monnaie locale, dans laquelle sont facturés les échanges dans le pays.

Mais les réserves de change manquant, l'Etat traîne de plus en plus les pieds à l'heure de convertir ces bolivares en billets verts, privant ainsi l'économie des importations nécessaires à son fonctionnement.

Conséquence pratique, les pénuries de biens et d'aliments se multiplient, les queues s'allongent dans les commerces, l'inflation s'envole (plus de 60% annuellement) et au marché noir, le dollar s'échange 10 fois son taux officiel.

Dans le domaine industriel, cinq constructeurs automobiles ont par exemple stoppé leurs usines d'assemblages, faute de pièces détachées, et de nombreuses compagnies aériennes limitent ou suspendent leurs vols vers le Venezuela.

"Il est pertinent de se demander s'il y a un défaut partiel", renchérit Francisco Ibarra, économiste à l'institut Econométrica.

Le défunt président Hugo Chavez (1998-2013) avait décidé de mener le pays sur la voie du "socialisme du 21e siècle", avec une économie centralisée sous forte ingérence de l'Etat, via notamment des expropriations d'entreprises, des contrôles de prix et des changes.

Héritier politique de M. Chavez, le président Nicolas Maduro a poursuivi ce "nouvel ordre économique de transition vers le socialisme", comme le définit le gouvernement, mais affronte depuis début février un vaste mouvement de protestation d'étudiants et d'opposants qui a fait 42 morts et 800 blessées.

Depuis son accession au pouvoir en avril 2013, M. Maduro a évité de prendre des mesures impopulaires, comme la réduction des dépenses de l'Etat, alors que le déficit public est estimé à 15% du Produit intérieur but.

Des dévaluations plus ou moins déguisées ont bien été opérées, mais le président clame désormais qu'il n'en prévoit aucune autre.

Les analystes doutent que le gouvernement, où cohabitent radicaux marxistes, militaires nationalistes de gauche et quelques pragmatiques discrets, soit en mesure de lancer les réformes structurelles qu'ils jugent indispensables.

"Ce déséquilibre est intenable. Il faut une transition dans le +chavisme+ sur le modèle politique et économique", plaide M. Ibarra, qui appelle à des ajustements "drastiques" mais "très difficiles à adopter par des gens qui ne se mettent pas d'accord entre eux".

Alors que les commerçants, soumis de plus à une loi limitant leurs marges, ont averti ne pas être en mesure de renouveler leurs stocks faute de devises, le gouvernement a promis un budget de 42 milliards de dollars pour "garantir 80% des demandes" de billets verts.

Mais "le pays est limité au niveau de ses devises depuis longtemps. Les fonds dont le gouvernement disait qu'ils existaient (pour garantir les importations, NDLR) ne sont pas là", selon Francisco Ibarra.

Ceci "est l'un des graves problèmes" qui paralysent la production locale, avec "des dollars qui semblent ne pas exister", confirme Richard Obuchi, économiste et professeur à l'Institut d'études supérieures d'administration (IESA).

Si l'on estime à 100 milliards de dollars par an les exportations de PDVSA, principale manne de l'Etat, ce chiffre reste soumis à caution, les comptes 2013 de l'entreprise publique n'ayant pas été publiés.

En revanche, les réserves de la Banque centrale ont officiellement fondu d'un tiers en 2013, passant de 30 à 20 milliards de dollars.

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