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Inde: avec Modi, les musulmans balancent entre craintes et espoir prudent

Inde: avec Modi, les musulmans balancent entre craintes et espoir prudent

Des millions de musulmans craignent un regain de discrimination et d'intolérance en Inde après le triomphe électoral du nationaliste hindou Narendra Modi mais certains sont prêts à lui donner une chance.

Le dirigeant indien, qui incarne l'aile dure de son parti, le Bharatiya Janata Party (BJP), a balayé le parti du Congrès, marqué à gauche, aux législatives et sa large victoire lui donne toute latitude pour mettre en oeuvre les réformes promises.

Ses opposants s'inquiètent de l'ampleur de cette victoire, estimant qu'elle va permettre à Modi, profondément imprégné de l'idéologie nationaliste hindoue et dont la réputation est entachée par les émeutes antimusulmanes de 2002 dans son Etat du Gujarat, de négliger les minorités religieuses.

A l'inverse, certains veulent croire à son discours consensuel de campagne, fondé sur la promesse de création d'emplois et la relance de l'économie, et espèrent qu'une telle politique bénéficiera à tous sans discrimination.

"J'ai repris espoir et j'attends des jours meilleurs sous son pouvoir", déclare Abdul Salaam, 29 ans, tailleur musulman de Bénarès, la ville sacrée hindoue où vit une importante communauté musulmane.

Salaam se réfère à la prospérité de l'Etat du Gujarat, dirigé par Modi pendant 13 ans, et attend que le dirigeant indien reproduise au niveau national ce qui y a fonctionné.

Pour Parveen Banu, une veuve musulmane dont la famille a été tuée dans les émeutes intercommunautaires du Gujarat, le dirigeant du BJP ne peut se permettre de s'en prendre aux musulmans après avoir promis l'unité du pays pendant toute sa campagne.

Banu se remémore sa course dans les ruelles éclaboussées de sang d'Ahmedabad, principale ville du Gujarat, pour échapper à la violence des hindous qui avaient tué son mari et ses quatre enfants.

Elle a depuis refait sa vie et tient un commerce de mouton dans un bidonville musulman, 12 ans après les émeutes qui ont tué au moins 1.000 personnes, essentiellement des musulmans.

Modi, qui dirigeait alors l'exécutif du Gujarat depuis quelques mois, a été critiqué pour son absence de réaction. Lui réplique qu'il n'a pas été mis en cause par la justice.

"Bien sûr Modi hait les musulmans mais peut-il se permettre de le montrer, en tant que Premier ministre?", s'interroge Banu auprès de l'AFP.

"Ayant parlé d'unité culturelle, il doit être à la hauteur des attentes et je pense qu'il le sera. Il n'est pas fou", ajoute-t-il. "J'espère qu'Allah lui montrera la bonne voie".

La plupart des musulmans s'inquiètent d'un gouvernement conduit par Modi et ont largement voté contre lui. Selon un sondage sortie des urnes, seulement 9% ont voté pour le BJP contre 43% pour le Congrès.

"Les musulmans sont la seule communauté à avoir largement voté pour le Congrès", déclare à l'AFP Sanjay Kumar, du Centre for the Study of Developing Societies qui a organisé le sondage. Le Congrès est sorti laminé de ces élections, avec seulement 44 sièges sur 543.

Modi a obtenu la victoire la plus large pour un parti depuis 30 ans, s'imposant nettement dans certains Etats comme l'Uttar Pradesh ou le Maharashtra à forte composante musulmane.

Selon le Times of India, le nombre de parlementaires musulmans est tombé à son plus bas à 24 sièges, contre 30 pour la précédente législature.

Nazma Begum, qui gère un petit atelier de teinture de vêtements à Bénarès, craint de voir la ligne dure des nationalistes hindous prédominer.

"Je trouve Modi inquiétant. Je n'aurais jamais pensé qu'il l'emporterait avec une telle marge. Je suis triste car il a désormais les mains libres et va faire ce qu'il lui plait. Qui osera le remettre en question?", s'interroge cette veuve musulmane de 40 ans.

Dans le seul Etat à majorité musulmane, le Jammu-Cachemire, où subsiste une rébellion séparatiste, certains veulent accorder crédit à Modi. Ainsi le chef religieux musulman Mirwaiz Umar Farooq dit espérer que le nouvel exécutif prendra "des mesures audacieuses" pour résoudre le différend sur le Cachemire.

Pendant la campagne, Modi a déclaré qu'il suivrait la politique du dernier Premier ministre BJP Atal Behari Vajpayee, qui a tenté à plusieurs reprises de conclure une paix durable avec le Pakistan sur le Cachemire.

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