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Le Portugal s'apprête à faire le grand saut sans filet

Le Portugal s'apprête à faire le grand saut sans filet

Le Portugal est devenu samedi officiellement le deuxième pays sous perfusion de la zone euro à retrouver son autonomie financière et s'apprête, à l'instar de l'Irlande, à faire le grand saut sans filet sur les marchés.

Le gouvernement se garde de tout triomphalisme: "l'heure n'est pas à l'euphorie", a assuré son porte-parole Luis Marques Guedes. Selon lui, "il faut maintenir la rigueur pour éviter de retomber" dans les erreurs du passé.

Très attendu par la population, le départ définitif des inspecteurs de la troïka (UE-FMI-BCE), surnommés les "men in black", est loin de signer la fin de l'austérité.

"Nous avons récupéré la confiance des investisseurs, mais le chemin à parcourir est encore long. La discipline budgétaire continue", a prévenu le Premier ministre Pedro Passos Coelho.

A l'instar de l'Irlande, le Portugal a renoncé à demander à ses partenaires européens une ligne de crédit de précaution, profitant de la brusque baisse de ses taux d'emprunt et de ses confortables réserves financières.

Autre facteur qui a pesé dans sa décision, certains pays comme l'Allemagne ou la Finlande n'ont pas caché leurs réticences vis-à-vis d'une rallonge, d'autant que les élections européennes se profilent à l'horizon.

Au bord de la faillite et incapable de se financer sur les marchés, le Portugal s'était résolu en avril 2011 à appeler à la rescousse la troïka, après la Grèce et l'Irlande.

En contrepartie d'un prêt de 78 milliards d'euros, le gouvernement de centre droit a appliqué une sévère cure d'austérité, taillant dans les retraites, prestations sociales et salaires des fonctionnaires.

A l'issue d'un conseil des ministres extraordinaire programmé samedi matin, le gouvernement comptait donner des gages aux investisseurs sur sa stratégie de croissance à moyen terme, imitant, là aussi, l'exemple de l'Irlande.

Côté croissance, l'annonce jeudi d'une rechute du Produit intérieur brut du Portugal de 0,7% au premier trimestre a fait l'effet d'une douche froide.

Dû à l'essoufflement passager des exportations, ce recul ne devrait pourtant pas compromettre la reprise progressive de l'économie prévue en 2014, selon les analystes.

"La tendance générale n'est pas remise en cause", a estimé Pedro Lino, gérant de Dif Broker. Et pour lui, ce contretemps fâcheux n'empêchera pas le Portugal de retourner la tête haute sur les marchés, "tant que le pays poursuit les réformes".

Scénario encore impensable il y a six mois, les taux d'emprunt du Portugal à dix ans sont descendus jusqu'à 3,5% début mai avant de remonter légèrement, alors qu'ils s'étaient envolés à plus de 18% au plus fort de la crise.

Cette spectaculaire baisse des taux a permis au Portugal de tester à plusieurs reprises avec succès les marchés. Fin avril, le pays a réussi sa première émission régulière de dette à long terme depuis 2011.

Malgré ces avancées, de nombreux économistes ont plaidé pour une rallonge, estimant que l'ancien maillon faible de la zone euro se retrouverait en première ligne en cas de turbulences sur les marchés.

"Sans filet, nous serons seuls face aux marchés, et la moindre erreur peut nous coûter cher. Il va falloir continuer à tailler dans les dépenses publiques", estime Joao Cesar das Neves, professeur d'économie de l'Université catholique de Lisbonne.

L'intervention de la troïka a été efficace dans ce domaine: en trois ans, les déficits publics ont été divisés par deux, à 4,9%. Mais la dette a continué à enfler, passant de 94% à 129% du PIB, et la croissance est encore timide.

"Les politiques de rigueur budgétaire et les réformes visant à soutenir la croissance doivent être maintenues pendant les mois et années à venir", a averti samedi le vice-président de la Commission européenne Siim Kallas.

Le Portugal célèbre la fin de la tutelle, mais les créanciers continueront à surveiller le pays jusqu'au moment où 75% des prêts seront remboursés, ce qui ne devrait pas arriver avant vingt ans.

bh/jh

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