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L'économie de la "Thaïlande Teflon" finalement emportée par la crise politique?

L'économie de la "Thaïlande Teflon" finalement emportée par la crise politique?

L'économie de la Thaïlande, qualifiée de "Teflon" en raison de sa capacité à résister aux troubles politiques, semble finalement rattrapée par une crise de six mois, sans issue en vue, qui fait fuir touristes et investisseurs étrangers.

La deuxième économie d'Asie du Sud-Est après l'Indonésie semble cette fois payer son instabilité au prix fort.

Des statistiques attendues lundi devraient révéler une contraction de l'économie au premier trimestre, après un fort coup de frein de la croissance au quatrième trimestre de 2013 (seulement 0,6% contre 2,7% au troisième trimestre).

"En cas de vacance du pouvoir, les gens manquent de confiance pour dépenser et investir par crainte de chaos politique durable", analyse Thanavath Phonvichai, responsable de la prévision économique à la Chambre de commerce thaïlandaise.

"Et les étrangers n'osent pas venir en Thaïlande" alors que le pays accueille entre 25 et 30 millions de touristes chaque année, ajoute-t-il, en évoquant un risque élevé de contraction économique pour les neuf derniers mois de l'année 2014.

Le bras de fer entre les manifestants d'opposition et le gouvernement a entraîné des violences de rue qui ont fait 28 morts et des centaines de blessés.

Les institutions sont pratiquement paralysées depuis décembre, les grands projets d'infrastructures sont gelés, la dépense publique réduite.

La confiance des consommateurs est à son plus bas en 12 ans, les arrivées de touristes étrangers ont chuté de 8 et 9% en février et mars, avant, semble-t-il, de se stabiliser, selon des chiffres officiels.

Et la crise ne cesse de s'aggraver. L'armée thaïlandaise a menacé cette semaine d'intervenir après la mort de trois manifestants dans une attaque à la grenade en plein Bangkok.

L'hypothèse d'une intervention militaire est parfaitement plausible dans cette monarchie constitutionnelle dont l'Histoire est émaillée de coups d'Etat (18 réussis ou tentés depuis 1932), le dernier remontant à 2006, contre le Premier ministre Thaksin Shinawatra.

La Banque centrale thaïlandaise a abaissé en mars son taux directeur à 2%, son plus bas niveau depuis janvier 2011, pour tenter de soutenir l'économie. Elle a parallèlement revu à la baisse sa prévision de croissance pour 2014, à 2,7% après 2,9% en 2013.

L'agence Fitch a menacé d'abaisser la note de la dette à long terme de la Thaïlande, actuellement à "BBB+", si le pays restait dans l'impasse au second semestre.

"L'échec à établir un gouvernement fonctionnel avant le milieu de l'année aurait un impact majeur sur l'investissement à moyen terme, la confiance des consommateurs et la planification budgétaire", a-t-elle prévenu.

La crise retarde la sortie de la Thaïlande du "piège" des pays à revenu intermédiaire dont le développement et la croissance plafonne faute d'investissements, ce qui est le cas dans le pays depuis la crise financière de 1997 en Asie, souligne Fitch.

Des années d'instabilité politique que sont venues aggraver les inondations destructrices de 2011 font craindre le départ d'investisseurs importants comme les constructeurs automobiles japonais, qui pourraient délocaliser leurs usines.

La production automobile vaut à la Thaïlande le surnom de "Detroit d'Asie du Sud-Est" mais ce statut semble de plus en plus précaire. Selon une étude de Toyota, les ventes de voitures dans le pays se sont effondrées de 46% au premier trimestre, sur un an, à cause de l'atonie générale de l'économie et de la fin d'une prime d'Etat à l'achat.

Les experts pensent que les institutions ne seront pas en état de marche avant plusieurs mois, repoussant d'autant l'élaboration d'un budget pour 2015.

"L'apaisement politique ne se fera pas comme ça. Le pays restera divisé encore un bon moment", pronostique le politologue Somjai Phagaphasvivat.

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