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L'avenir politique du président nigérian pourrait dépendre du destin des lycéennes enlevées

L'avenir politique du président nigérian pourrait dépendre du destin des lycéennes enlevées

Le président nigérian Goodluck Jonathan, très critiqué pour n'être pas intervenu dans les jours qui ont suivi l'enlèvement de plus de 200 lycéennes par Boko Haram, se retrouve politiquement en difficulté, à moins d'un an des élections générales.

S'il n'a pas encore annoncé sa candidature à sa propre succession, tout le monde s'attend à ce que M. Jonathan, âgé de 56 ans, brigue un autre mandat le 14 février 2015, malgré les nombreuses voix, au sein de son propre camps qui lui demandent de laisser la place à un autre candidat.

Le chef de l'Etat était déjà en difficulté avant que 276 adolescentes ne soient enlevées par le groupe islamiste Boko Haram dans leur lycée de Chibok, une ville reculée du Nord-Est. Un enlèvement qui a suscité un immense élan de mobilisation à travers le monde en faveur des captives.

Le parti démocratique populaire (PDP) de M. Jonathan a déjà perdu sa majorité parlementaire, suite à de nombreuses défections de députés ces derniers mois au profit du Congrès progressiste (APC), la principale formation d'opposition.

La profonde indignation provoquée par le manque de réactivité du gouvernement au lendemain du rapt massif de Chibok a sans doute causé au président des dommages politiques difficilement réparables, estiment des experts.

Pour l'éditorialiste Olatunji Dare, du quotidien indépendant The Nation, M. Jonathan "a apporté la preuve qu'il n'est pas à la hauteur de ses fonctions".

"Quelle que soit l'issue de cette crise, M. Jonathan aura du mal à apparaître comme un président digne de confiance pour diriger le Nigeria et relever les défis à venir" écrit-t-il.

Le fait de se présenter à la présidentielle de 2015 serait très "égoïste et dénué de patriotisme", poursuit M. Dare.

Selon une règle tacite, les candidats à la présidentielle au sein du PDP doivent être tour à tour originaires du Nord, à majorité musulmane, puis du Sud, principalement chrétien.

M. Jonathan, un chrétien originaire du Sud, a succédé au président musulman Umaru Yar'Adua en mai 2010, dont il était le vice-président, à la mort de celui-ci dans l'exercice de ses fonctions. Il aurait promis en privé de ne servir qu'un mandat, lors de son élection en 2011.

Ses détracteurs l'accusent de n'avoir rien fait pour développer le nord du pays, où le fort taux de chômage et la pauvreté n'ont fait qu'alimenter l'insurrection menée par les islamistes de Boko Haram, qui a fait des milliers de morts en cinq ans.

Certains disent même que si M. Jonathan s'est montré si indifférent au sort des jeunes filles de Chibok, c'est justement parce qu'il ne se sent pas concerné par le sort de la population du nord.

Le professeur Dapo Thomas pense que le président devrait s'inspirer de l'exemple récent du Premier ministre sud-coréen, "qui a démissionné suite à l'accident de ferry qui a fait des centaines de victimes".

"Mais au Nigeria, où les politiciens manquent de moralité et d'intégrité, plus de 200 filles ont été enlevées et le président fait comme si de rien était" regrette-t-il.

Pour M. Thomas, le fait que M. Jonathan a dû accepter l'aide internationale pour tenter de retrouver les 223 jeunes filles toujours recherchées, dont 130 sont apparues dans une nouvelle vidéo de Boko Haram, est "une honte pour le Nigeria, qui se dit le géant de l'Afrique".

"S'il décide de briguer un second mandat, (Jonathan) n'obtiendra même pas 20% des voix", pronostique-t-il.

Pour d'autres, M. Jonathan a bien fait d'accepter l'aide des Etats-Unis, de la Grande Bretagne, de la France et d'Israël et de tenter de dialoguer avec Boko Haram.

Certains experts pensent même que M. Jonathan peut encore sortir vainqueur de cette crise, en tirant la couverture à lui si les adolescentes sont libérées saines et sauves et en accusant l'aide étrangère si on ne les retrouve pas.

Pour l'éditorialiste du journal Punch, Niyi Akinasso, l'inaction de M. Jonathan au lendemain du rapt de Chibok est très choquante, mais l'heure doit être à l'unité.

Pour l'instant, dit-il, "nous devons nous rassembler autour de notre président et nous joindre aux efforts internationaux pour retrouver et secourir les jeunes filles".

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