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Prônant le dialogue, l'Allemagne à la manoeuvre dans la crise ukranienne

Prônant le dialogue, l'Allemagne à la manoeuvre dans la crise ukranienne

L'Allemagne apparaissait une nouvelle fois à la manoeuvre lundi dans la crise ukrainienne, Moscou et les Européens incitant au dialogue entre pro-Européens et pro-Russes que préconise Berlin de longue date.

Le chef de la diplomatie allemande, Frank-Walter Steinmeier, sera en Ukraine mardi pour soutenir un "dialogue national" entre le gouvernement à Kiev et les séparatistes pro-Russes de l'Est du pays.

Il doit se rendre non seulement à Kiev, mais aussi dans l'est pro-russe du pays. Et le lendemain il rendra compte de sa mission en participant à Paris au Conseil des ministres du gouvernement français.

"L'objectif de ce voyage est de soutenir les efforts de l'OSCE, les efforts en vue d'un dialogue national, en vue d'une entrée dans une véritable discussion sur un avenir satisfaisant pour l'Ukraine, les efforts pour qu'on ait une élection (présidentielle) le 25 mai" en Ukraine, a expliqué son porte-parole, Martin Schäfer.

Dans le même temps, comme pour faciliter le dialogue, un haut responsable allemand a exprimé la réticence de Berlin envers des sanctions économiques visant Moscou. Dans une interview lundi au quotidien Handelsblatt, le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Michael Roth, a déclaré : "on doit admettre que des sanctions économiques seules, aussi sévères soient-elles, ne conduisent pas forcément au résultat escompté".

Les efforts de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) doivent notamment prendre la forme d'une table ronde entre toutes les parties impliquées dans la crise à partir de mercredi à Kiev.

Une solution que Berlin souhaitait depuis plus d'une semaine et qui serait plus "européenne" qu'une éventuelle conférence Genève 2, à laquelle participeraient les Etats-unis, soulignait un diplomate européen en poste à Berlin.

Et le modérateur de cette table ronde sera... un Allemand, Wolfgang Ischinger, a annoncé l'OSCE lundi. Cet ancien diplomate de carrière préside actuellement la Conférence de Munich sur la sécurité, qui réunit en début d'année depuis 1963 l'élite du monde de la défense et du renseignement. Il a été ambassadeur aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, a participé aux négociations sur la Bosnie de Dayton et sur l'élargissement de l'Otan en Europe de l'Est.

Berlin aura donc une ligne directe avec les discussions. C'était déjà presque le cas : M. Steinmeier avait ainsi fait un saut à Vienne mardi pour "briefer" le président de l'OSCE, le Suisse Didier Burkhalter, avant sa rencontre avec le président russe Vladimir Poutine à Moscou, selon une source proche du dossier.

Un Vladimir Poutine dont M. Steinmeier avait salué le "ton constructif" après la rencontre avec M. Burkhalter, car le président russe avait demandé aux pro-Russes de reporter leur référendum d'autodétermination, qui a finalement eu lieu dimanche. Il fut le seul Occidental à risquer un tel commentaire.

L'Allemagne pèse de tout son poids en faveur d'un dialogue avec Moscou. La chancelière Angela Merkel a multiplié les entretiens téléphoniques avec M. Poutine, appuyée par M. Steinmeier. Ce dernier est membre d'un Parti social-démocrate dont une des caractéristiques historiques est l'"Ostpolitik", l'ouverture vers l'Est à l'époque du Rideau de fer.

L'ancien chancelier Gerhard Schröder, avec la liberté de ton qui lui est coutumière depuis qu'il a quitté la chancellerie, a dit tout haut ce que des responsables allemands disent tout bas. "L'erreur fondamentale vient de la politique de l'UE en faveur d'un traité d'association" que Bruxelles voulait signer avec l'Ukraine, a expliqué dans la presse allemande cet ami de M. Poutine.

"Entre une opinion publique qui a peur de la guerre, comme le montrent les sondages, un lobby des affaires qui veut travailler avec la Russie, et la volonté de maintenir la cohésion de l'UE, Mme Merkel fait un numéro d'équilibriste", selon Liana Fix, de la Société allemande de politique étrangère (DGAP).

"La chancelière ne souhaite pas forcément jouer les entremetteurs, elle ne peut pas supporter Poutine", a estimé pour sa part le diplomate occidental. En outre "elle n'a pas besoin de cela pour gagner en popularité", caracolant autour de 60% d'opinions favorables. "Mais elle a le sens des responsabilités."

Pour Stefan Meister, du Conseil européen des relations étrangères (ECFR), la modération de Berlin est en phase avec ce que veulent ses alliés européens. "A part les pays baltes ou la Pologne qui pour des raisons historiques et géographiques font davantage de tapage, la plupart des Etats membres (de l'Union européenne) sont favorables à une approche plus coopérative", assure-t-il.

fjb/aro/sym

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