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USA: la Cour suprême préserve l'héritage des prières en politique

USA: la Cour suprême préserve l'héritage des prières en politique

Après son habituelle incantation d'ouverture, la Cour suprême des Etats-Unis, soucieuse de préserver l'héritage et la tradition du pays, a confirmé lundi le droit de réciter des prières au conseil municipal tant qu'elles ne font pas de prosélytisme.

"Que Dieu préserve les Etats-Unis et cette honorable Cour". Comme chaque fois avant de siéger, les neuf juges de la plus haute juridiction du pays ont entendu cette incantation lundi, mais c'est profondément divisés, selon un clivage politique très marqué, qu'ils ont rendu leur décision attendue depuis six mois.

La majorité des cinq juges conservateurs --tous catholiques-- a refusé de chambouler la tradition américaine qui autorise, "depuis les premiers jours de cette Nation", les incantations ou les prières aussi bien dans une petite assemblée locale que dans les hémicycles du Congrès.

Elle a confirmé une "pratique acceptée par les pères fondateurs" de la Constitution américaine, estimant que "l'histoire et la tradition du pays" montrent que les prières peuvent "cohabiter avec les principes de liberté de religion", selon la décision rendue.

A Greece, une ville de 96.000 âmes dans l'Etat de New York, le clergé local est invité à dire une prière tous les mois, au début de chaque conseil municipal.

Pendant huit ans, ces prières étaient exclusivement chrétiennes.

Mais deux habitantes --une athée et une juive-- ont porté l'affaire devant la Cour suprême, considérant que cette pratique était inconstitutionnelle devant une assemblée législative, en particulier pour son prosélytisme chrétien.

Linda Stephens et Susan Galloway ont argué que ces prières devaient être clairement séparées des débats politiques et être au minimum non confessionnelles.

Les cinq juges conservateurs n'ont pas trouvé leurs arguments "convaincants", tandis que les quatre progressistes --trois de confession juive et une catholique-- ont voté pour l'interdiction de ces prières.

Pour la minorité, Elena Kagan a souligné que "les prières de la ville de Greece violaient la règle d'égalité religieuse -- l'idée constitutionnelle extraordinairement généreuse que nos institutions publiques n'appartiennent pas plus aux Bouddhistes ou aux Hindous qu'aux Méthodistes ou aux Episcopaliens".

A l'audience de novembre 2013, la ville de Greece, alors soutenue par le gouvernement américain, estimait que l'histoire montrait au contraire qu'il n'y avait "pas d'impact" sur la Constitution et son Premier Amendement qui interdit le prosélytisme.

"Il n'y a aucune indication que la possibilité de prier ait été exploitée en vue d'un (quelconque) prosélytisme ou d'arguments favorisant une foi ou une croyance" plutôt qu'une autre, ont conclu les cinq juges conservateurs.

Si "les prières invoquent le nom de Jésus, elles invoquent aussi des thèmes universels comme +l'esprit de coopération+" et aucune d'entre elles "ne dénigre, ne fait du prosélytisme ou ne trahit un principe du gouvernement", ajoute la décision, rédigée et lue par le juge Anthony Kennedy.

En conséquence, la majorité a estimé que ces prières ne violaient pas le Premier Amendement de la Constitution, qui stipule que "le Congrès ne fera aucune loi pour conférer un statut institutionnel à une religion".

Au nom des quatre juges progressistes, Elena Kagan a elle avancé qu'à la différence du Congrès ou de la haute Cour, le conseil municipal de Greece s'adressait directement à des "citoyens ordinaires" et que "les incantations avaient un contenu à dominante sectaire".

Le juge Kennedy a estimé au contraire que "le principal auditoire de ces prières n'était pas le public mais les législateurs eux-mêmes".

"La décision d'aujourd'hui est un recul décevant pour le droit des citoyens de toutes les confessions à être traités avec égalité par leur gouvernement", a fustigé la puissante Union de défense des libertés civiles ACLU.

Elle donne "assurément plus de latitude aux conseils locaux pour imposer une religion majoritaire", a renchéri l'organisation des Américains unis pour la séparation de l'Eglise et de l'Etat.

Le sénateur ultraconservateur Ted Cruz a salué de son côté sur Twitter une "grande victoire pour la liberté de religion et le rappel que la Constitution ne retire pas la religion de la sphère publique".

"Les discours honorant Dieu et invoquant ses bienfaits pour notre pays doivent être bienvenus et non pas traités avec hostilité", s'est aussi félicitée la coalition Foi et liberté.

chv/sam

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