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Iran: le président Rohani enregistre son premier revers politique

Iran: le président Rohani enregistre son premier revers politique

Le président iranien Hassan Rohani a subi cette semaine son premier revers politique huit mois après sa prise de fonctions, les catégories les plus aisées ayant ignoré ses appels à renoncer à leurs aides publiques au profit des plus défavorisés.

Ce programme d'aide --14 dollars par mois et par personne-- avait été instauré en décembre 2010 par l'ex-président conservateur Mahmoud Ahmadinejad, pour compenser les baisses des subventions publiques massives à l'énergie (gaz, électricité, carburant) et à l'alimentation.

Le salaire minimum mensuel est de 185 dollars pour les ouvriers, et l'aide directe constitue une importante part du budget des familles les plus modestes, alors que pour les plus aisés, son impact est très modeste.

Alors que le gouvernement de M. Rohani vient d'annoncer une nouvelle hausse des prix des carburants, il avait demandé ces dernières semaines aux Iraniens aisés de renoncer au dispositif d'aide, afin que l'Etat puisse dégager des ressources et investir dans les infrastructures, la production industrielle et les transports publics.

Pour ce faire, les autorités ont organisé une campagne télévisée offensive, mettant en scène des célébrités, sportifs, hommes politiques et même personnalités religieuses lançant des appels aux familles riches.

Le gouvernement espérait que 10 millions de personnes renoncent à demander à bénéficier de l'aide directe.

Mais les résultats, rendus publics mercredi, montrent que la vaste majorité est restée sourde à ces appels. Près de 95% des Iraniens --73 sur 77 millions-- ont réclamé leur argent, ce qui représente un coût d'un milliard de dollars par mois pour les autorités.

Les conservateurs se sont empressés de railler le gouvernement. Mais la campagne médiatique a également été critiquée dans les milieux réformateurs et modérés, qui avaient soutenu M. Rohani lors de son élection en juin 2013.

"Cette campagne inefficace s'est retournée contre ses organisateurs et aura des effets négatifs", a estimé le quotidien Farhikhtegan.

Pour le quotidien réformateur Mardomsalari, cette campagne est "un échec évident" pour le gouvernement. "Bombarder les gens d'appels était plus fatiguant que convaincant. C'est un flop", affirme l'éditorial du journal.

M. Rohani, un religieux modéré, avait largement utilisé les réseaux sociaux et les médias réformateurs lors de la campagne présidentielle.

Mais cette fois, le gouvernement a favorisé la télévision d'Etat, dominée par les conservateurs et regardée pour l'essentiel par les classes défavorisées, une erreur stratégique, selon certains observateurs.

"Au lieu de se concentrer sur les médias sociaux, où il pouvait convaincre ses partisans, le gouvernement s'est focalisé sur le mauvais public à travers la télévision", a ainsi affirmé à l'AFP un militant pro-Rohani ayant requis l'anonymat.

"Ils se sont aliénés les partisans de Rohani", ajoute-t-il, en rappelant que mi-avril, le ministre de l'Economie Ali Tayyebnia avait affirmé aux députés avoir "identifié les 10 millions de riches Iraniens" qui seraient rayés des listes des personnes aptes à recevoir l'aide directe.

Bien que d'autres membres du gouvernement soient ensuite revenus sur ces déclarations, le mal était fait.

Pour d'autres analystes, notamment conservateurs, cet échec traduit aussi une perte de confiance dans la politique du président Rohani et du gouvernement dont les résultats, notamment la baisse de l'inflation, ne sont pas ressentis au quotidien par la population.

Les mois à venir seront cruciaux pour M. Rohani, alors que le gouvernement a annoncé jeudi soir une nouvelle augmentation massive du prix de l'essence et du gazole dans le cadre de la deuxième phase de son programme visant à supprimer les subventions.

Le prix d'un litre d'essence semi-subventionné est par exemple passé de 4.000 rials (0,12 dollar au taux du marché libre) à 7.000 rials (0,22 USD), soit une hausse de 75%.

Depuis un mois, le prix de l'électricité et du gaz ont également été relevés d'environ 25%.

Ces mesures permettront d'économiser 18 milliards de dollars dans le budget de l'Etat.

Plusieurs institutions internationales, dont le FMI, ont encouragé le gouvernement à poursuivre sur cette voie afin d'aider à réguler l'économie, plongée dans la récession à cause des sanctions occidentales, décidées en raison du programme nucléaire controversé de Téhéran, et de la mauvaise gestion attribuée à l'ancienne administration.

Afin d'obtenir la levée complète des sanctions, l'équipe de négociateurs iraniens est par ailleurs engagée dans de difficiles pourparlers avec les grandes puissances pour finaliser un accord définitif sur le nucléaire.

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