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A Kramatorsk, l'attente impuissante des soldats ukrainiens bloqués sur leurs chars

A Kramatorsk, l'attente impuissante des soldats ukrainiens bloqués sur leurs chars

Massés sur leurs blindés sur le talus de la voie ferrée, les soldats ukrainiens lèvent sans grand espoir les yeux. Dans un bruit assourdissant, un avion de chasse survole, sans les impressionner, les manifestants pro-russes qui les bloquent depuis le début de la journée.

Les quinze petits tanks aux chenilles fatiguées stationnent de part et d'autre de la ligne de chemin de fer parcourue régulièrement par des trains de banlieue au pas, à Ptchiolkino, en périphérie de Kramatorsk, à une centaine de kilomètres au nord du fief russophone de Donetsk.

Leurs occupants en uniforme ukrainien, par groupes d'une demi-douzaine, sont assis sur les structures de métal, visages fermés ou accablés, mitrailleuses en main, coincés entre les rails et les abricotiers en fleurs des jardins des maisons voisines.

Autour d'eux, quelques dizaines d'habitants du village, certains en famille, regardent la scène, se prennent en photo, les interpellent. Leur objectif: empêcher leur passage, qui présage selon eux une opération contre les manifestants pro-russes contrôlant des bâtiments publics, notamment à Slaviansk.

Seuls les soldats sont visiblement armés et, à part les petits groupes de manifestants, rien n'empêche les véhicules militaires de quitter les lieux.

"Je ne sais pas où on allait, on circulait, c'est tout", balaie un soldat, cheveux ras, sur un petit blindé, provoquant le rire nerveux de son voisin. "Il n'y aucun problème, tout va bien, ces gens sont des nôtres, on se repose et on ira à la maison", poursuit-il, avant d'être interrompu par le vol, à un altitude d'à peine une cinquantaine de mètres, d'un avion de chasse.

A quelques kilomètres de là, des hélicoptères de l'armée ukrainienne ont déchargé mardi des soldats dans l'aérodrome militaire, jusqu'à récemment quasi à l'abandon. Mercredi matin, une colonne de tanks a traversé la ville. Dans le centre, six d'entre eux ont été saisis par les pro-russes, qui les ont conduits à Slaviansk.

Une autre partie des troupes envoyées par Kiev pour reprendre la main sur le Donbass, le bassin houiller russophone en proie aux tensions séparatistes, n'a pas pu aller plus loin que le passage à niveau jouxtant la station de train de banlieue de Ptchiolkino.

Accoudé contre son char, barbe de trois jours, l'air résigné et surtout fatigué, un soldat confie que le convoi arrivait de Dnipropetrovsk, une autre grande ville russophone de l'Est de l'Ukraine, quand une partie a été bloquée. Depuis, assure le jeune, homme, ils n'ont reçu aucun ordre et regardent passer, impuissants, les avions de chasse et les hélicoptères de l'armée.

Comment s'est passé l'assaut? Les "bloqueurs", qui ressemblent plutôt à de simples badauds, assurent s'être précipités des maisons voisines pour bloquer le convoi.

Antonina raconte être accourue avec son petit-fils de sa maison voisine, déterminée à servir de "bouclier humain", et avoir entendu quelques tirs avant d'arriver sur les lieux.

"Ces gars, ce sont les nôtres, ils viennent de Dnipropetrovsk, de Lougansk, ils ne veulent pas se battre contre nous mais en même temps, ils remplissent les ordres", explique-t-elle. "Ils veulent aller dans notre aérodrome pour soutenir les soldats qui sont arrivés en hélicoptères".

"Nous ne voulons pas la guerre, nous voulons simplement un référendum pour que les gens puissent s'exprimer, dire comment ils veulent vivre. Pourquoi devons-nous vivre sous l'autorité de ceux qui sont arrivés au pouvoir par la force, des fascistes", tempête-t-elle.

Dans sa soutane, le père Guéorgui, lunettes de soleil sur le nez, assure être venu sur les lieux dès la fin de sa messe "pour protester contre l'envoi des troupes sur un territoire pacifique"

"Nous n'avons pas d'armes, nous sommes pour la paix, mais nous voulons résoudre nos questions nous-mêmes, à Kiev personne ne nous écoute", assure le prêtre.

gmo/neo/plh

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