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Les pro-russes à l'offensive dans l'Est de l'Ukraine

Les pro-russes à l'offensive dans l'Est de l'Ukraine

Les activistes pro-russes sont repassés à l'offensive samedi dans l'est de l'Ukraine, prenant quasiment le contrôle d'une localité et s'emparant du siège de la police dans la grande ville de Donetsk.

Six jours après une première série d'attaques à l'issue desquelles ils avaient proclamé une "république souveraine", tout en ne contrôlant que quelques bâtiments, les séparatistes ont lancé un nouveau défi au gouvernement pro-européen de Kiev, installé après le renversement d'un régime pro-russe fin février et plus que jamais confronté au spectre d'un éclatement du pays.

La Russie, qui a mis en garde Le gouvernement ukrainien contre toute répression sanglante des troubles, qu'Américains et Ukrainiens l'accusent d'ailleurs d'orchestrer, a massé jusqu'à 40.000 hommes à la frontière selon l'Otan, faisant craindre une invasion.

Tôt samedi, des hommes armés, en tenues de camouflage sans insignes, encagoulés et casqués, se sont emparés du commissariat de district de Slaviansk, ville d'une centaine de milliers d'habitants située à une soixantaine de kilomètres de Donetsk, la capitale régionale.

Dans l'après-midi, ils ont pris le contrôle du bâtiment des services de sécurité (SBU) dans la même cité, selon la police.

Les assaillants ont hissé le drapeau russe et reçu le soutien d'une bonne partie de la population, massée devant les bâtiments et scandant "Russie ! Russie !". Les manifestants se montraient très agressifs avec les journalistes occidentaux, dont ceux de l'AFP.

Aucune présence policière n'était visible, alors que le ministre de l'Intérieur Arsen Avakov avait annoncé l'envoi de "forces spéciales" chargées de donner une "réponse ferme" aux "terroristes".

Selon la police et la maire de Slaviansk, Nelly Chtepa, les assaillants sont venus de Donetsk, où les séparatistes occupent depuis près d'une semaine le siège de l'administration régionale.

Les pro-russes, qui contrôlent aussi, depuis six jours, le siège du SBU dans une troisième ville de l'est, Lougansk, réclament le rattachement à la Russie, ou au minimum un référendum sur plus d'autonomie régionale.

"Nous sommes tous d'accord", a ajouté la maire de Slaviansk, mettant en garde contre une intervention. "Toute la ville fera bouclier pour défendre les gars qui ont pris le bâtiment".

Selon le ministère de l'intérieur, les assaillants se sont emparés de "20 fusils automatiques et plus de 400 pistolets Makarov" qu'ils ont entrepris de distribuer.

Des hommes en uniforme étaient postés à un barrage à l'entrée de Slaviansk, en compagnie d'au moins un policier, et sur la route Slaviansk-Donetsk, des journalistes de l'AFP ont vu des manifestants rassemblés devant des bâtiments publics dans une autre localité.

A Donetsk, quelque 200 manifestants pro-russes ont envahi le siège de la police dans l'après-midi, a constaté une journaliste de l'AFP. Ils n'ont rencontré aucune résistance et des membres des forces antiémeutes sur place ont apparemment changé de camp, arborant des insignes pro-russes. La plupart des manifestants sont ensuite repartis, une vingtaine restant sur place.

Le gouvernement a limogé le chef des services de sécurité régionaux et celui de la police de Donetsk a démissionné.

A Kiev, Dmitro Iaroch, chef du parti nationaliste Pravy Sektor (secteur droit), qualifié de "fasciste" par les pro-russes, a appelé ses partisans à se "mobiliser" face à "l'inaction" des autorités.

Ces nouveaux assauts interviennent au lendemain d'un déplacement à Donetsk du Premier ministre Arseni Iatseniouk.

Il n'a pas eu de contacts directs avec les insurgés mais avec les principaux responsables locaux, dont Rinat Akhmetov, oligarque très influent et homme le plus riche du pays. M. Iatseniouk et ses interlocuteurs avaient publiquement convenu que la crise devait être réglée par des moyens pacifiques.

Le Premier ministre s'était engagé à proposer avant l'élection présidentielle anticipée du 25 mai des révisions constitutionnelles pour "équilibrer les pouvoirs entre le pouvoir central et les régions". Il a promis de ne toucher "sous aucun prétexte" aux lois garantissant le statut des langues autres que l'ukrainien.

Mais les séparatistes, soutenus par la Russie, exigent une "fédéralisation" de la Constitution. Ce que refuse le pouvoir pro-occidental de Kiev, non reconnu par Moscou, qui y voit la porte ouverte à l'éclatement de l'Ukraine et refuse d'aller plus loin qu'une "décentralisation".

Les troubles dans l'Est ont fait craindre aux Occidentaux une intervention russe, le président Vladimir Poutine s'étant engagé à protéger "à tout prix" les populations russes de l'ex-URSS.

Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Andrii Dechtchitsa s'est entretenu samedi avec son homologue russe Sergueï Lavrov, lui demandant de faire cesser les "provocations".

M. Lavrov a démenti toute responsabilité, jugeant au contraire "inadmissible" que Kiev parle d'utiliser la force. Il a appelé les autorités ukrainiennes à "tenir compte des exigences légitimes" des russophones.

La crainte majeure est la répétition du scénario joué en mars en Crimée, péninsule ukrainienne rattachée à la Russie après un référendum non reconnu par Kiev et les Occidentaux.

M. Lavrov a assuré vendredi que Moscou n'avait aucune intention de rattacher à la Russie les régions russophones de l'est ukrainien, ce qui irait selon lui "à l'encontre des intérêts fondamentaux" russes.

Moscou a par ailleurs jeté une ombre samedi sur la seule récente lueur d'optimisme dans cette crise, la pire depuis la fin de la guerre froide, qui menace en outre de dégénérer en une "guerre du gaz" affectant les approvisionnements énergétiques de toute l'Europe.

Alors que Washington a annoncé des pourparlers sur la crise jeudi prochain à Genève entre l'Ukraine, la Russie, les Etats-Unis et l'Union européenne, les Russes ont assuré au contraire que rien n'était arrêté, "ni l'ordre du jour, ni le format".

bur-so/bds

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