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L'afflux de réfugiés du Nigeria fait craindre un drame humanitaire au Niger

L'afflux de réfugiés du Nigeria fait craindre un drame humanitaire au Niger

"Donnez-moi à manger !" Alio, jeune réfugié qui a fui comme tant d'autres le Nigeria et les atrocités de Boko Haram, vit depuis lors un calvaire au Niger, où sévissait déjà une crise alimentaire, faisant craindre un drame humanitaire.

L'adolescent en haillons mendie pour sa sa survie aux abords d'un restaurant de Maïné-Soroa, une petite ville de la région de Diffa (plus de 1.500 km à l'est de Niamey), frontalière avec le Nigeria, où 50.000 personnes ont trouvé abri.

Toutes ont fui le nord du Nigeria, les attaques meurtrières du groupe islamiste radical Boko Haram et la répression féroce des forces de sécurité. Pour un quotidien plus calme, mais presque aussi précaire.

"Quand je trouve un peu de nourriture, je partage ça avec ma mère et mes trois frères", témoigne Alio.

Fin 2013, Nations unies et autorités nigériennes recensaient plus de 38.000 réfugiés dans la zone, parmi lesquels de nombreux Nigériens qui vivaient au Nigeria depuis des décennies.

Plus de 10.000 autres sont arrivés, dépourvus de tout, entre janvier et mars, selon Issa Hamani, un responsable local de l'Office internationale des migrations (OIM).

La quasi-totalité est hébergée dans des familles d'une centaine de localités environnantes.

Certains sont installés dans des îlots difficiles d'accès du Lac Tchad -à cheval entre le Niger et le Nigeria- où ils vivent "sous de simples moustiquaires accrochées aux arbres", selon les autorités régionales.

"On aura des soucis si les chiffres continuent de gonfler. C'est très fragile et ça peut se dégrader très vite", prévient Robert Piper, coordonnateur humanitaire de l'ONU pour le Sahel.

"Il y a déjà une crise humanitaire au Niger, en raison de la crise alimentaire, la malnutrition et des épidémies. Mais à Diffa, nous avons en plus cet afflux de presque 50.000 personnes qui cherchent à manger et à boire", s'alarme-t-il.

La région, fragile, affronte depuis trois ans une crise alimentaire due à des épisodes de sécheresse et à des crues historiques de la rivière Komadougou Yobé.

Or dans certaines localités, l'arrivée inattendue de réfugiés a "multiplié par deux" la population, provoquant des problèmes d'approvisionnement en eau potable et en soins, indique un élu local.

Les réfugiés arrivent "dans le dénuement total, affamés ou malades", d'où des "des besoins toujours croissants", relève Issa Hamani, de l'OIM.

Pour ne rien arranger, la persistance de l'insécurité au Nigeria bloque les échanges commerciaux avec Diffa.

"La crise sécuritaire chez notre voisin étouffe notre région enclavée, qui dépend largement des échanges économiques avec le Nigeria", déplore Maïna Ari, un homme d'affaires de Diffa.

Cet embargo de fait engendre des pénuries régulières des denrées ainsi qu'une valse des prix, fragilisant les ménages nigériens, en particulier ceux qui hébergent des réfugiés.

"Tout est devenu cher, déplore Mamadou Abdou, un paysan de Maïné-Soroa qui en accueille une douzaine, dont des femmes et des enfants. Je partage avec eux le peu dont je dispose. Il y a des nuits où nous dormons tous le ventre vide".

L'exil forcé est vécu comme une descente aux enfers par de nombreux réfugiés.

Drapée dans un voile bleu, Indo Abdou, une Nigériane de 32 ans, mère de cinq enfants, qui comme elle ont fui Yobe (nord du Nigeria) à la mort de leur père, tué dans le conflit, confie sa "honte" de "vivre aux crochets des autres".

"Ici, pas de boulot, pas d'argent, de terre à cultiver. Pas non plus d'école pour les enfants", peste Salé Ousmane, tout en pleurant ses boeufs laissés il y a 9 mois à Maiduguri (un bastion de Boko Haram), qu'il a quitté en hâte avec sa femme et ses six enfants.

Mercredi, le Bureau des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) à Niamey s'est inquiété de la "faible" mobilisation internationale pour le Niger, où 50.000 autres réfugiés ont fui la crise malienne.

En février, le Niger et ses partenaires ont demandé 300 millions d'euros à la communauté internationale pour se sortir temporairement de cette crise humanitaire.

"Plus de quatre millions" de Nigériens se trouvaient en "insécurité alimentaire" et "7,5 millions d'autres" étaient "à risque d'insécurité" sur l'ensemble du territoire fin 2013, d'après une enquête gouvernementale.

Seulement 2% de ces fonds étaient mobilisés fin mars.

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