Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Japon-Corée du Sud: glace politique, feu musical

Japon-Corée du Sud: glace politique, feu musical

Quand des Japonais rencontrent des Sud-Coréens, ça peut donner la glace ou le feu. La glace c'était la semaine dernière aux Pays-Bas entre les dirigeants des deux pays, séparés juste par Barack Obama. Le feu ce fut cette semaine au Japon pour un méga concert de K-Pop.

Mercredi dernier, des milliers de fans japonais se sont rués à Yokohama (banlieue de Tokyo) pour assister à un méga-concert de groupes sud-coréens au zénith de la K-Pop (abréviation de "Korean pop"), ce mélange de boys bands déhanchés et de troupes de "lolitas" endiablées.

Près de 10.000 inconditionnels s'étaient agglutinés pour crier, chanter et se trémousser devant Supernova, Crayon Pop ou encore le boys band de crooners 2PM.

"Il suffit que je les voie et les écoute et je ne suis plus fatiguée, ils me filent un de ces tonus!", raconte Kurumi Hagi, une groupie surexcitée de 17 ans. Sa mère n'est pas en reste et elle aussi est une inconditionnelle des six garçons.

Kan Yokoyama, un quadragénaire, lui ne se lasse pas des Girl's Day en jupettes. "Je suis complètement accro. Je les ai rencontrées récemment pendant une réunion de fan. Et Hyeri, un membre du groupe, m'a montré quelques pas de danse". Il en vibre encore.

Bref, quand le pays du Matin Calme rencontre celui du Soleil Levant en musique, ça déménage et tout va bien.

Mais quand la politique prend le pas, alors là c'est une autre chanson.

Car les relations entre les deux pays sont polaires depuis plus d'un an, sur fond de contentieux territorial et de querelles historiques.

Le très nationaliste Premier ministre japonais Shinzo Abe et la présidente sud-coréenne Park Geun-Hye sont arrivés au pouvoir à peu près au même moment fin 2012 début 2013, et se sont battus froid depuis.

Tokyo et Séoul se disputent un archipel en mer du Japon (appelée mer de l'Est par les Coréens), mais surtout c'est l'héritage de la dernière guerre et de la colonisation par le Japon impérial de la péninsule coréenne de 1910 à 1945 qui pèse lourd entre ces deux alliés des Etats-Unis.

Séoul reproche notamment à M. Abe sa visite le 26 décembre au sanctuaire Yasukuni de Tokyo, où sont honorés 2,5 millions de morts tombés pour le Japon, mais aussi 14 criminels de guerre condamnés après 1945.

Ces derniers mois, Mme Park a aussi été échaudée par l'apparente intention de Tokyo de "réexaminer" les excuses officielles présentées en 1993 pour les actes commis pendant l'occupation de la péninsule coréenne, concernant notamment les femmes enrôlées de forces dans des bordels militaires, ces "femmes de réconfort" estimées à environ 200.000 à travers l'Asie.

M. Abe a démenti mais Mme Park a émis des doutes sur la sincérité de ces propos tout de même jugés "rassurants".

Sans oublier que la communauté coréenne au Japon est régulièrement la cible de militants d'extrême droite locaux au langage très cru.

Pour rabibocher ses deux principaux alliés dans la région face notamment à une Chine qui monte en puissance, Barack Obama a réussi à les asseoir la semaine dernière à la même table, avec lui au milieu, en marge d'un sommet sur la sécurité nucléaire à La Haye.

Le mot d'ordre était: éviter les sujets qui fâchent. Donc ils ont parlé sécurité nucléaire et menace nord-coréenne, l'un de leurs rares sujets de préoccupation communs.

Bien qu'il ne soit pas réputé grand polyglotte, M. Abe avait entamé le dialogue en coréen: "Présidente Park, il est agréable de vous rencontrer". Visage impassible de l'intéressée, selon les médias nippons.

"Ils ont quand même fini par se serrer la main", a commenté le porte-parole du gouvernement japonais.

Malgré cette "avancée", on est à des décibels de la chaleur survoltée de la diplomatie musicale de la K-Pop.

"En tant que société d'industrie culturelle, nous pouvons faire ce que les gouvernements ne peuvent ou ne veulent pas faire. Alors même quand il y a des tensions politiques, nous pensons que nous pouvons rapprocher nos deux pays grâce aux échanges culturels", plaide Shin Hyung Kwan, un producteur de K-Pop.

"Il faut qu'on se rapproche par ce biais, parce que si on continue à remuer le passé, ça finira toujours en affrontement", assure de son côté Kan Yokoyama, le fan de Girls Day.

oh/jlh/pn/ia

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.